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Mathilde Seigner, une erreur de casting ?


En règle générale, les petites vedettes du cinéma français ne se contentent plus de paraître négligées, elles réussissent aussi à être inutilement vulgaires, comme Mathilde Seigner. Choisie pour remettre le César du second rôle, elle a fait connaître sa déception publiquement et, bien sûr, devant Michel Blanc, désigné cette année pour son emploi dans L’exercice de l’ État, de Pierre Schöller, qui est, à mon humble avis, le meilleur film français de l’année 2011.

Madame Seigner souhaitait que la récompense allât à Joey Starr, nommé pour Polisse. Je ne veux pas comparer ici les mérites de l’un et de l’autre, je me contenterais de dire que Michel Blanc est remarquable en chef de cabinet exclusivement guidé par le sens du bien public et le service de la nation. Madame Seigner a voulu signifier son désappointement : en haussant la voix et en saluant de la main, comme une harengère qui s’exalte, elle héla son favori d’un retentissant « Didier t’es où mon Didou ? ». Dans la salle, Didou, aux anges, levait les deux pouces, par approbation. César, quant à lui, n’en dressait ou n’en abaissait qu’un seul.

Les vrais rebelles restent chez eux, et négligent ces hochets, ou bien ils manifestent leur colère en s’opposant férocement et franchement à l’adversité unanime, tel Maurice Pialat. Hué par les « professionnels de la profession », au festival de Cannes, en 1987, il leur adressa un magnifique bras d’honneur. Pialat était un seigneur, un type capable d’être grossier sans paraître vulgaire.

Madame Seigner est conforme aux temps que nous vivons, elle ressemble à ces hommes et à ces femmes, dont le nombre croît, qui nous invitent à partager bruyamment leurs préférences microscopiques, leurs bonheurs ménagers, leurs malheurs organiques, leurs désagréments intimes, leurs minuscules satisfactions, et toujours sur le mode sans gêne. On dit souvent de ces personnes qu’elles sont «natures», et l’on se réjouit de leur impudeur comme d’une preuve de sincérité.

On notera que la salle des Césars, conformiste et endormie, ne se montra nullement choquée par l’impair de Mathilde Seigner. Une partie, au moins, en rit bêtement. Michel Blanc se sortit de la situation avec un trait d’esprit, très au-dessus de la moyenne de cette réunion : brandissant sa « compression » il en proposa à Didou « la garde alternée ».

C’est ainsi que l’esprit se venge de la nature…



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Né à Paris, il n’est pas pressé d’y mourir, mais se livre tout de même à des repérages dans les cimetières (sa préférence va à Charonne). Feint souvent de comprendre, mais n’en tire aucune conclusion. Par ailleurs éditeur-paquageur, traducteur, auteur, amateur, élémenteur.

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