Paris (AFP) – Marine Le Pen a fait dimanche un pas de plus vers la mise à l’écart définitive de son père, estimant que Jean-Marie Le Pen ne devait « plus pouvoir s’exprimer au nom du Front national », après ses prises de position polémiques.
Cette prise de position catégorique intervient à la veille de la convocation du « patriarche » frontiste devant le bureau exécutif du FN, la plus haute instance du parti, qui se réunit lundi en formation disciplinaire pour étudier d’éventuelles sanctions contre lui.
« Jean-Marie Le Pen ne doit plus pouvoir s’exprimer au nom du Front national, ses propos sont contraires à la ligne fixée », a tranché la présidente du FN sur le plateau du Grand Rendez-vous Europe 1-Le Monde-iTELE. « Il ne faut pas que ses propos engagent le mouvement ».
Président d’honneur du mouvement qu’il a cofondé, Jean-Marie Le Pen a multiplié les provocations début avril : réaffirmation de sa position sur les chambres à gaz « détail » de l’Histoire de la guerre, défense du maréchal Pétain et du « monde blanc », et critique en règle de la démocratie comme système politique.
« Les derniers actes qui ont été les siens sont inadmissibles », a jugé la patronne du FN, qui a « le sentiment qu’il ne supporte pas que le Front national continue à exister alors qu’il n’en a plus la direction ».
« Je pense qu’il outrepasse complètement les prérogatives que lui donne son statut personnel », a-t-elle affirmé. « Ce que je souhaite, moi, c’est que la volonté des adhérents du Front national soit respectée », a-t-elle déclaré, ne manquant pas de rappeler que « les adhérents du Front national (l’)ont élue avec 100% des suffrages sur une ligne politique extrêmement claire ».
« C’est celle-là qu’ils veulent voir appliquer », a martelé celle qui œuvre à la dédiabolisation du parti d’extrême droite. Les militants « ne peuvent pas imaginer que ceci soit perturbé volontairement par des actes qui finissent de manière récurrente par devenir quasiment des actes de malveillance ».
– « Un abîme de perplexité » –
Un sondage BVA-Orange-iTELE publié samedi arrive d’ailleurs à point nommé pour conforter Marine Le Pen dans sa stratégie: près d’un Français sur trois (32%) souhaite qu’elle ait davantage d’influence dans la vie politique française – son meilleur score sur cet indicateur –, alors que Jean-Marie Le Pen voit sa « cote d’influence » plonger à 2%.
BVA souligne que Marine Le Pen a « su utiliser cette séquence pour poursuivre son entreprise de dédiabolisation du FN, en marquant la distance avec son père ».
Au-delà des aspects purement politiques, Marine Le Pen semble avoir été blessée par l’attitude de son père lors du défilé traditionnel de son parti le 1er mai. Bousculant la mise en scène, « le Menhir », comme il est parfois surnommé, était monté à la tribune place de l’Opéra pour saluer la foule, à quelques mètres du pupitre où sa fille s’apprêtait à commencer son discours. Quelque peu interdite, elle était restée silencieuse jusqu’à ce que son père quitte la tribune.
« Je pense que c’était un acte malveillant de sa part, je pense que c’était un acte méprisant à mon égard », a-t-elle déploré dimanche, avant de lâcher : « J’avoue que cela me plonge dans un abîme de perplexité ».
Plus que jamais incontrôlable, Jean-Marie Le Pen, dont la présence lundi au bureau exécutif n’est pas encore certaine (« Je ferai connaître cela en temps utile. Je me repose pour l’instant », a-t-il confié samedi à l’AFP), pourrait payer au prix fort ce dernier affront personnel lors du bureau exécutif.
L’homme doit être malgré tout ménagé, tant il est « apprécié par le peuple militant du Front national » notait un élu FN de Saint-Nazaire dans le cortège parisien du 1er mai.
Les membres de la direction n’ont pas tous la même position sur le « cas Le Pen ». Mais « on se doute bien que le bureau exécutif suivra l’avis de la présidente », relève un parlementaire du parti.
*Photo : © AFP KENZO TRIBOUILLARD
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