À trois ans de l’élection présidentielle, l’ancien Premier ministre et la candidate aguerrie des seconds tours préparent déjà leur duel… Une démarche un peu trop hâtive, selon notre chroniqueur.
Il ne faut pas prendre tout ce qu’on lit pour argent comptant, je le sais, mais quand je lis : « Edouard Philippe-Marine Le Pen, les secrets du duel qu’ils préparent » dans Le Figaro, avec une analyse fine et détaillée qui montre à la fois une forme de complicité dans la tenue démocratique à observer et la réalité de plusieurs désaccords, je ne peux qu’estimer plausible cette esquisse du futur. Si 2027 leur permettait de s’affronter au second tour de l’élection présidentielle, on sortirait enfin d’une joute lassante à force de conformisme où, comme d’habitude, le jour suprême, Marine Le Pen ne serait pas à la hauteur et où son adversaire, avec une condescendance ironique, l’accablerait sous son savoir et son expérience.
Avec Edouard Philippe, nous aurions probablement une personnalité maîtrisée et courtoise, plus guillerette qu’Alain Juppé – ce serait facile – et qui tenterait de faire oublier les décisions que Premier ministre il avait prises et qui n’avaient pas été sans susciter de vigoureuses oppositions. Marine Le Pen se ferait un plaisir d’enfoncer le couteau dans la plaie et, par exemple, de rappeler le peu de crédit qu’on avait attaché au référendum régional sur Notre-Dame-des-Landes… Marine Le Pen se verra imputer à charge ses fluctuations sur l’Europe, sur l’euro, son manque de fiabilité sur le plan international, le défaut de crédibilité de certaines de ses propositions et le hiatus probable entre ses engagements et la réalité qu’elle aurait à affronter et qui les ruinerait. Comme aujourd’hui en Italie pour Giorgia Meloni qui est devenue classique et donc acceptable et acceptée alors qu’elle avait promis de renverser la table. On ne renverse pas la table. C’est à peine si on l’aménage.
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Le dialogue entre Edouard Philippe et Marine Le Pen tiendrait certainement, et ce serait nouveau, à un changement de tonalité. Marine Le Pen ne serait pas appréhendée comme une ennemie de la République mais comme une adversaire politique dont l’élection serait désastreuse pour la France. Cela changerait tout mais ne modifie en rien mon point de vue sur la nouvelle et dernière défaite de Marine Le Pen, à laquelle le suffrage universel préférera encore le candidat de droite « centriste ».
J’ai déjà évoqué que la seule opportunité de Marine Le Pen pour rompre son destin électoral présidentiel funeste, serait de pouvoir se colleter avec Jean-Luc Mélenchon et, bien sûr, dans ce cas, lui faire mordre la poussière. Il est facile d’imaginer ce que deviendrait le débat du second tour entre Edouard Philippe et Marine Le Pen : il serait vigoureux, sans concession mais il est clair que le RN et son programme ne seraient plus traités comme s’ils étaient interdits dans notre démocratie.
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En réalité, on a bien compris que je me suis placé dans l’optique proposée par Le Figaro mais que mon parti n’est pas celui-là. Il y a une impatience générale à venir franchir le premier tour pour au second être assuré de vaincre Marine Le Pen. Il n’y a aucune raison décisive, aujourd’hui, pour considérer qu’Edouard Philippe sera forcément l’heureux élu face à elle, et l’heureux élu pour la France ensuite. Les Républicains n’ont jamais été moribonds et le vote de la motion de rejet a démontré qu’enfin ils avaient cessé de pardonner au pouvoir les offenses qu’il essuyait de sa part. Il conviendra de chasser l’idée du candidat « naturel » que serait Laurent Wauquiez (pour Eric Ciotti) et d’insister – il n’est jamais trop tôt – pour une primaire loyale et de qualité en 2027. Avec Laurent Wauquiez évidemment, Xavier Bertrand aussi, Aurélien Pradié peut-être mais surtout David Lisnard dont tout ce qui se passe à l’heure actuelle – propos, comportements et analyses – démontre l’apport positif pour son camp, avec la certitude d’une énergie et d’une action qui ne viendraient pas atténuer les promesses mais les couronner. Il n’est pas concevable que la droite soit vouée à être déçue tout le temps. Il y aura forcément un jour une personnalité qui en son sein sera lassée de ces échecs répétés et qui brisera cette malédiction. Mais de grâce qu’on ne cherche pas, en répudiant la primaire en 2026 ou 2027, à priver le citoyen de ce miracle : une droite dont enfin il pourrait être fier !