Accueil Politique Le dopage, coco, il n’y a que ça de vrai…

Le dopage, coco, il n’y a que ça de vrai…


Le dopage, coco, il n’y a que ça de vrai…

dopage marie buffet

Comme d’habitude, quand le PCF se résigne à servir de faire-valoir aux socialistes, la participation des ministres communistes au gouvernement jospin (1997-2002) s’est terminée par une déconfiture électorale. En 2002, la ministre de la Jeunesse et des Sports Marie-George Buffet, qui était aussi secrétaire nationale du parti, avait ainsi vu Robert Hue obtenir 3, 37% à la présidentielle. De son côté, Buffet, à la présidentielle suivante, en 2007, atteindra le score historiquement le plus bas d’un candidat communiste : 1, 93%.
Si l’on reparle aujourd’hui de la présence des ministres communistes sous Jospin, c’est que leur bilan avait plutôt été jugé, on nous passera l’expression, globalement positif. Gayssot, aux Transports, avait réussi à calmer assez vite une grève dure des routiers sans en arriver aux excès de Balladur qui avait envoyé les chars de l’armée tracter les camions. Il avait été à l’origine de la politique des radars routiers qui fut poursuivie sans faillir par les gouvernements suivants et n’est pas pour rien dans les records historiquement bas de morts sur la route ces dernières années.
Marie-George Buffet, elle, s’était illustrée dans sa lutte contre le dopage, dont tout le monde s’accorde, notamment depuis l’affaire Armstrong, à reconnaître que c’est le problème majeur du sport spectacle.  Elle aurait peut-être d’abord dû songer à doper les scores électoraux du Parti, mais la lutte antidopage fut sa grande cause dès son entrée en fonction.
Il apparaîtrait, avec le recul, que les choses n’aient pourtant pas du tout, mais vraiment pas du tout, été faciles pour elle. Elle a été appelée  mercredi dernier à témoigner devant une commission sénatoriale présidée par l’UMP Jean-François Humbert pour évaluer l’efficacité des politiques de lutte contre le dopage.
Marie-George Buffet, qui en avait lourd sur la patate, a lâché un certain nombre d’informations jusque-là inédites. Elle est ministre en 1998, année stratégique s’il en est, puisque la France organise son Mondial de football. À l’époque, il n’y a pas encore l’AFLD (Association de Lutte Française contre le Dopage) créée en 2006 ni même l’embryon que Buffet a institué en 1999, le Conseil de Prévention et de Lutte contre le dopage. Quand elle ordonne un contrôle antidopage à Tignes, où l’équipe de France est en préparation, elle ne dispose que des contrôleurs du ministère.
C’est une levée de boucliers sans précédent. L’intrusion des petits fonctionnaires chez les seigneurs du ballon rond est vécue de la même manière que celle des inspecteurs du travail dans une usine. C’est quoi, cette idée tellement française, minable, peine-à-jouir, de vouloir faire respecter la loi contre la performance à tout prix, de vouloir se préoccuper de la santé quand de tels enjeux sont sur la table ? Ah quelle petite mentalité !  « Les médias me sont tombés dessus de manière très violente, il y a eu un déferlement où on m’accusait d’empêcher l’équipe de France de se préparer dans de bonnes conditions. Je me suis sentie isolée et j’ai flanché, j’ai presque été amenée à m’excuser » s’est ainsi confiée Marie-George Buffet devant la commission.
Avant les JO de 2008, pour lesquels Paris est ville candidate,  on retrouve là aussi une logique de pure mise en concurrence des pays qui doivent accepter un « moins disant » en matière de contrôle s’ils veulent avoir une chance de gagner. Le CIO, par l’intermédiaire de monsieur Verbrugghen, président de l’Union Cycliste Internationale, de Jean-Claude Killy et de Guy Drut, demande ni plus ni moins à Jospin de faire écrire à sa ministre des Sports une lettre précisant que « la totalité de la loi française ne s’appliquerait pas pendant les jeux ». Autrement dit, renoncer à une part de sa souveraineté en échange des JO. « Cela a été une pression extrêmement forte, on a remis la lettre à M. Verbruggen en haut de la Tour Eiffel, mais pendant l’audition de la délégation française à Moscou, Lionel Jospin a été interrogé à trois reprises, donc la pression s’est exercée sur la France jusqu’au bout. » On est à la limite du roman d’espionnage, non ?
Et dire qu’on a si longtemps daubé sur le dopage institutionnalisé dans les pays du Bloc communiste, toujours à la recherche de l’athlète prométhéen qui permettrait d’imposer l’image du surhomme rouge au monde fasciné. On se souviendra de l’incroyable Rocky IV en 1985, sommet hollywoodien de propagande reaganienne, où l’on voit Rocky, joué par Sylvester Stallone, comme un tenant des bonnes vieilles méthodes naturelles d’entraînement face au terrifiant Dolph Lundgren, dopé technologiquement en laboratoire.
Le message était clair : à l’Ouest, on est sain,  on a le souci de vaincre dans l’honneur, l’essentiel c’est de participer. Mais à l’Est, la priorité est à la fabrication de robots décérébrés qui n’ont pour horizon ultime que la performance spectaculaire et qui vaincront pour imposer la marque USSR contre la marque USA.
Les récentes révélations de Marie-George Buffet semblent nous montrer que Rocky IV était effectivement prophétique. Certes, le sport n’est plus l’instrument d’une propagande politique mais il est devenu celui d’une guerre commerciale entre quelques grands logos. En cette matière comme en tellement d’autres, cela fait bientôt vingt ans que tous les coups sont permis. Les Etats-nations n’ont plus grand-chose à dire. Juste à s’adapter et à pudiquement fermer les yeux, s’ils veulent récolter quelques miettes.

*Photo : kreg.steppe.



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