L’interprétation socio-économique de pareils troubles oublie les déterminations identitaires fortes qui pourraient expliquer que la banlieue se transforme ainsi en Far West. Quant à l’interprétation identitaire, évidente, elle peut oublier aussi d’autres causes. La société française n’a-t-elle plus pour intégrer ses populations les plus récentes qu’un matérialisme nihiliste à offrir?
Vendredi dernier, un rodéo urbain en Seine-Saint-Denis défrayait la chronique. Une famille avec un enfant en bas âge marchait sur le parvis piéton de la mairie de Saint-Denis quand elle s’est vue encerclée par une dizaine de voitures. Les puissantes berlines louées à l’occasion d’un mariage ont soudainement déboulé, tournoyant toujours plus près de la famille tétanisée. Rouler des mécaniques ne suffit pas, il faut tirer à point. Ce que n’a pas manqué de faire le troupeau vrombissant. Des tirs de mortier ont détoné dans l’artère commerçante du centre-ville où il s’est rué. Un membre de cette famille a depuis déposé plainte au parquet de Bobigny. Son médecin lui a prescrit une incapacité temporaire de travail de trois jours, signalant chez son patient « un syndrome anxieux, un sentiment d’humiliation et des idées noires ». Et c’est en effet une rageuse ou fataliste impuissance qui pourrait étreindre les victimes comme les autres. Bien que la police municipale ait relevé l’identité de deux cow-boys de l’équipée sauvage, aucun n’a été interpellé. Tel n’a pas été pris qui croyait prendre, et sans doute a réellement pris son pied. Rien ne semble à l’avenir prémunir d’autres passants du même sort que l’agneau de La Fontaine. Sans autre forme de procès, car la raison
