Manuel Valls répond à nos questions à l’occasion de la sortie de son livre Pas une goutte de sang français (mais la France coule dans mes veines), chez Grasset. L’ouvrage revient sur le parcours humain de l’ancien Premier ministre et sur son rapport charnel à la France. Jeunesse, pouvoir, descente aux enfers de la gauche, duplicité de Macron, brutalité de la chute, exil à Barcelone et retour sur le ring politique français : le puncheur de la République est de retour.
David Angevin. Le livre s’ouvre sur votre jeunesse, partagée entre l’Espagne de votre père catalan de Barcelone, et votre jeunesse à Paris, dans le Marais populaire des années 70. Très vite la politique vous passionne. À quoi ressemblait le jeune militant PS que vous étiez ?
Manuel Valls. Nous n’avions pas la télé, j’ai donc passé mon enfance à lire. C’est par la lecture — Camus, Koestler, Orwell, Soljenitsyne…— que je me suis formé et intéressé au monde des idées, puis à la vie de la cité. À 18 ans j’étais déjà un social-démocrate un peu ennuyeux (sourire) ! Je n’ai jamais été ni communiste, ni trotskiste, c’est dire ! Mon père avait été marqué par la guerre d’Espagne; j’ai été élevé dans un milieu très anti-totalitaire, que ce soit face au franquisme ou au stalinisme. Étudiant je suis déjà un socialiste rocardien, un républicain passionné par l’affaire Dreyfus, mes héros sont Clemenceau, Zola ou Péguy… je suis un démocrate convaincu qui place la liberté au-dessus de tout, le fruit de ces convictions familiales profondes.
Vous revenez dans le livre sur l’amitié entre François Mitterrand et le collaborateur René Bousquet, dont la critique vous a valu des ennuis au sein du PS. Et vous rendez un hommage appuyé à Chirac, qui lui a su reconnaître la responsabilité de la France dans la déportation des juifs.
Avec l’âge, et la prise de recul que réclame l’écriture d’un livre, je me suis attaché à ces moments marquants où, sur le plan moral, politique, historique, des hommes d’État ne se trompent pas sur l’essentiel. Je pense à Clémenceau, Churchill ou De Gaulle… des géants ! On ne peut pas dire que les deux mandats de Chirac furent extraordinaires, mais j’ai eu envie d’évoquer son remarquable discours du Vel d’hiv en juillet 1995, reconnaissant la responsabilité de l’État Français dans la déportation des juifs. Quant à la révélation tardive de l’amitié entre Mitterrand et Bousquet, en 1994, elle m’a bien entendu marqué et choqué. Les réactions ont été en effet très violentes au sein du PS à l’endroit de ceux qui, comme moi, s’en sont indignés. Cette révélation arrive à la fin de la vie d’un homme, dont le parcours fut extraordinaire dans tous les sens du terme, et à la fin d’un cycle pour la gauche. En interne, les échanges sont terribles entre ceux qui condamnent ce lien avec Bousquet — Jospin, DSK, Pierre Moscovici, Jean-Marie Le Guen, Benoit Hamon, à la tête du MJS à ce moment-là, ou moi-même — et la garde rapprochée de Mitterrand, dont Henri Emmanuelli, qui le défend avec véhémence. Elle nous reprochait de vouloir « remettre en cause l’union de la gauche », de « salir le bilan », d’être « au service de Rocard », ce genre de choses… C’était évidemment faux. Mon indignation était sincère et profonde. J’avais lu Robert Paxton, le grand historien américain qui a levé le voile sur la collaboration du régime de Vichy. J’ai gardé précieusement la lettre de Serge Klarsfeld me remerciant pour mes prises de position publiques. Quand je m’exprime à ce propos sur LCI, qui vient de naître, lors d’un entretien avec Sylvain Attal, c’est ma toute première télé. Et les anciens du PS ne supportent pas cette contestation de la part de « jeunes roquets » à qui on tend soudain le micro. Les médias étaient alors la chasse gardée des poids lourds de la politique. Les chaines info ont depuis changé cela.
La laïcité à la française, dont vous êtes un défenseur acharné, est au cœur du livre. Vous évoquez longuement cette question, en revenant sur l’affaire des trois collégiennes voilées de Creil, en 1989. Cet épisode confirma une fracture dans la société française, et au sein de la gauche. Vous aviez raison, avec d’autres, avant tout le monde. Mais les communautaristes de votre propre camp s’acharnent encore à voir en vous un « laïcard autoritaire », pour reprendre l’expression de Macron…
J’ai été élevé dans le Marais à Paris, un quartier à l’époque très populaire. Quand j’arrive à Argenteuil en 1988, je découvre la réalité de la banlieue. J’ai 26 ans, je viens d’être élu conseiller régional, et je ne quitterai plus jamais ces quartiers populaires. Je découvre sur le terrain les problèmes d’insécurité, la pression de l’islam politique, la question du voile, les atteintes à la laïcité, et tout cela me forme, me nourrit. Sur l’affaire de Creil en 1989, ce n’est pas moi qui ai raison, ce sont de grands intellectuels comme Regis Debray, Elisabeth Badinter, Alain Finkielkraut et d’autres, qui tirent la sonnette d’alarme. Je m’exprime dans le même sens. Le rapport à l’histoire de France, à la République et la défense de ses valeurs est depuis le début le fil rouge de mon engagement politique. Défendre la laïcité, c’est défendre la République et une certaine idée de la France. Lors de mon discours du 13 janvier 2015 à l’Assemblée, je suis bouleversé comme tous les Français par les attentats de Charlie Hebdo, de Montrouge et de l’Hypercasher. Je suis imprégné par l’esprit de la grande manifestation populaire et si patriote du 11 janvier. Mais si je parle avec autant de conviction c’est surtout grâce à mon expérience du terrain. Je nomme clairement les choses, l’ennemi, le terrorisme islamique. J’avais prêché un peu seul dans le désert. J’avais eu raison avant bien d’autres sur l’islamisme, la montée de l’ antisémitisme et la mise en cause de la laïcité dans les quartiers, je m’étais engagé contre Dieudonné… et soudain l’hémicycle se lève comme un seul homme et applaudit à de nombreuses reprises mes propos. Mon ami Philippe Val me dira un peu plus tard : « ce discours a été important, il t’a désigné comme l’ennemi à abattre pour les islamistes, et il a inquiété du monde à gauche ». Sous-entendu, tu es désormais un « présidentiable » évident, « tu viens de te faire plein d’ennemis». Je ne pensais pas du tout à cela à ce moment ! Jamais. Il a fallu le renoncement de François Hollande, bien plus tard, pour que je décide d’être candidat à la primaire. Mais Philippe Val avait raison : être le Premier ministre de gauche qui proclame sa foi républicaine, se montre intransigeant dans son combat contre l’islam politique, alors qu’une partie de la gauche est prête à des compromissions avec ce dernier, par conviction ou opportunisme, m’a valu beaucoup d’ennemis dans mon propre camp.
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L’islamogauchisme ne datant pas d’hier, vous ne vous doutiez pas de ces réactions ?
Bien entendu, et si c’était à refaire je prononcerais exactement le même discours. J’avais l’habitude de l’hostilité d’une partie de la gauche sur les questions de sécurité. Comme si la sécurité était un marqueur de droite ! Absurde. Clémenceau venait de la gauche républicaine, Joxe ou Chevènement ont été de grands ministres de l’Intérieur, et il ne viendrait à l’idée de personne de les traiter d’hommes de droite. J’ai toujours pensé qu’être de gauche, c’est lutter contre les inégalités. Et l’insécurité est une injustice supplémentaire qui s’attaque d’abord aux plus modestes. Mais pour certaines bonnes âmes de gauche, les délinquants ou les criminels issus des quartiers, souvent issus de l’immigration, sont d’abord des victimes du système. La culture de l’excuse l’emporte sur toute rationalité. Idem avec les musulmans, qui seraient aussi des victimes de la société capitaliste, colonialiste et raciste, comme l’a théorisé Edwy Plenel dans un livre d’une rare démagogie. Cette partie de la gauche, identitaire et racialiste, s’est inventée un nouveau prolétariat de substitution, une nouvelle clientèle électorale, et a vite oublié les ouvriers et surtout les valeurs universalistes.
« La gauche a les yeux grands fermés sur la réalité du monde », affirmait récemment Alain Finkielkraut. Pensez-vous comme lui que cette maison est devenu inhabitable pour les républicains ?
J’ai beaucoup d’admiration pour Alain Finkielktaut, dont le livre Un cœur intelligent m’accompagne partout. Il est lui même très pessimiste. Moi, j’ai encore de l’espoir. Je pense que les valeurs que nous défendons s’imposeront. Mais la gauche est bien dans une impasse, ce qui explique l’échec de 2017. Il est trop simple de mettre cela sur le dos de François Hollande et de ceux qui ont gouverné avec lui. Le désastre qu’évoque Finkielkraut est plus profond et ancien que ça. La gauche a connu des défaites terribles dans le passé, mais elle s’est relevée à chaque fois. Pas cette fois ! C’est « no future », comme disaient les punks. Et cet effondrement de la gauche n’est pas seulement français, mais européen et mondial. Les gauches sont devenues irréconciliables sur les valeurs, c’est-à-dire sur l’essentiel. Les questions fondamentales, qui touchent à la démocratie, sont remises en cause. Je comprends que les gens engagés à gauche depuis longtemps, comme Finkielkraut ou Julliard, et des millions d’autres comme eux, soient désespérés face à l’islamogauchisme, au mouvement woke et à la cancel culture. En niant le réel, en faisant sécession avec le peuple, la gauche s’est discréditée. Je le vis en 2017, je constate l’effondrement de cette gauche à laquelle j’appartenais depuis toujours. Quatre ans plus tard, elle va plus mal que jamais. On le voit avec sa lecture du conflit israélo-palestinien et son aveuglement à propos du mouvement terroriste Hamas.
L’épisode de la déchéance de nationalité pour les terroristes, proposé d’abord par François Hollande, marque la fin de l’union nationale après les attentats. On vous taxe d’homme de droite, voire d’extrême droite…
Le symbole était évident: l’inscrire dans la Constitution alors que la mesure existait déjà notre droit administratif. Plusieurs déchéances, confirmées par le Conseil d’Etat, ont été prononcées par mon gouvernement. Et c’est encore le cas aujourd’hui. 80% des Français étaient pour. Cela n’a pas changé. L’idée que déchoir de leur nationalité française des binationaux, condamnés pour des actes terroristes, soit assimilé à un projet d’extrême droite est symbolique de la perte de lucidité dont nous parlions ! Les plus exaltés ont même comparé cette mesure à la déchéance de nationalité des juifs par le régime de Vichy !
Vous rappelez dans le livre la phrase de Macron après les attentats du Bataclan : « La France doit assumer une part de responsabilité quant au terreau sur lequel prospère le jihadisme ». Cette idée folle, consistant à chercher des excuses aux terroristes, reste partagée par beaucoup.
Quand Macron prononce cette phrase, que je prends d’abord pour une maladresse, il est en réalité déjà en campagne. Sur un modèle social-libéral ou libéral-libertaire à l’anglo-saxonne qui, comme Trudeau ou Obama, ne voit pas de problème au communautarisme. Avec derrière la tête cette idée de séduire le prolétariat des banlieues… Quant à la gauche, sur les trois grands chocs qui bouleversent les équilibres du monde —chute du mur de Berlin et du bloc soviétique, globalisation économique et remise en cause des frontières, surgissement de l’âge identitaire, notamment à partir des attentats islamistes du 11 septembre 2001— par paresse et par peur, elle n’apporte pas de réponse. Aucune. Tant que vous êtes dans l’opposition, vous faites illusion, vous pouvez vous cacher derrière l’antisarkozysme. Mais quand vous arrivez au pouvoir, toutes ces carences, ces contradictions, vous explosent à la figure. C’est le problème du quinquennat Hollande. Nous avons tenu le pays avec le président et Bernard Cazeneuve face au terrorisme, mais la gauche s’est désagrégée au fur et à mesure. Nous avons été minés par la guérilla permanente des «frondeurs». Je me suis planté sur la présentation de la réforme du marché du travail, j’ai du utiliser le 49.3 malgré la loyauté d’une majorité de députés socialistes, et le soutien de Myriam El Khomri et de Laurent Berger. Après le retrait de François Hollande, qui n’était même plus en position de se représenter, et cela venait de loin, je suis le deuxième fusible après lui, je prends la foudre. La primaire est organisée pour nettoyer la gauche de gouvernement, mais je ne le réalise pas tout de suite. De fait viennent voter principalement les militants les plus à gauche, les électeurs de Mélenchon, la gauche de la gauche… D’ailleurs, ils ne voteront même pas pour Hamon à la présidentielle, mais directement pour Mélenchon.
Cette vision de la société sociale-libérale à l’américaine de Macron, vous l’aviez senti venir avant son élection?
Il y avait sans doute chez lui cette vision du monde à l’américaine qui ne voit pas d’inconvénients aux fameux « accommodements raisonnables » chers à Justin Trudeau. Cette position est largement partagée dans les pays anglo-saxons. Il suffit de lire tout le mal que pensent les journaux américains de la laïcité à la française, les mouvements américains woke, la cancel culture, etc… Je parle dans le livre d’un moment très marquant pour moi : l’absence de Barack Obama, sans la moindre excuse, à la manifestation de Paris qui fait suite au massacre de Charlie Hebdo. Obama ne veut pas être associé à un journal soi-disant islamophobe. Il n’envoie même pas de représentant ! Après les attentats du Bataclan, quand Macron s’exprime sur la question du « terreau », je comprends que son entourage le pousse à se démarquer de moi, le « républicain autoritaire ». Pour eux, c’est « le discours de Valls et des laïcards qui tend la société », et pas les attentats islamistes… Macron se rendra compte plus tard, dans l’exercice du pouvoir, confronté aux attentats et à la pression islamiste, que la fermeté est de mise. Il a eu donc dans un deuxième temps des propos très clairs contre l’islam politique ou le séparatisme, notamment dans son remarquable discours des Mureaux. Blanquer ou Darmanin sont très engagés dans la défense des valeurs républicaines. Il subsiste cependant encore beaucoup d’ambiguïtés sur notre modèle laïque dans la majorité.
Il a changé également sur le sujet de l’écologie, avec des postures radicales de circonstances qui n’étaient pas dans son programme très « start-up nation ». Qui aurait imaginé la « convention citoyenne », ou Barbara Pompili sacrifiant le nucléaire dans son gouvernement ?
Sur le nucléaire, tout commence avant le quinquennat Hollande. Quand il est désigné candidat en octobre 2011, il se retrouve avec un bout de programme ficelé par Martine Aubry avec les écolos. Il ne le remet pas en cause. Fessenheim faisait partie du deal… Macron et Pompili ont poursuivi le mouvement engagé par la loi de transition écologique votée en 2016. Ce qui me semble essentiel désormais c’est d’assurer l’avenir de notre industrie nucléaire; il en va de notre souveraineté, de notre autonomie énergétique, de notre recherche, de notre Défense, et des milliers d’emplois dans cette filière sont en jeu.
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David Lisnard, maire LR de Cannes, s’étonnait à juste titre au cours d’un entretien dans Causeur du vide qui existe à gauche sur les positions républicaines qui sont les vôtres. Si vos convictions sont aujourd’hui majoritaires à gauche, pourquoi celle-ci est-elle orpheline d’une figure pour les incarner ?
Je connais et j’apprécie David Lisnard, et je crois moi aussi que ces positions sont majoritaires. Et tout aussi important, il y a aujourd’hui des intellectuels capables de porter ces idées : Caroline Fourest, Elisabeth Badinter, Jacques Julliard, Alain Finkielkraut, Pascal Bruckner, et tant d’autres… Ce qui n’est pas le cas aux États-Unis, en Angleterre, ou même en Espagne. Le dégagisme en 2017 s’est produit au profit d’un candidat, Macron, qui semblait cocher toutes les cases : jeune, européen, réformiste et progressiste. In fine, l’échiquier politique a été totalement détruit : à gauche pour les raisons que nous connaissons ; à droite également, elle n’a pas encore de leader ni de ligne claire, on le voit avec la préparation des régionales en PACA. Mais tout peut changer très vite.
La reconquête peut-elle venir d’un nouveau mouvement républicain transpartisan, qui s’associerait sur les valeurs essentielles et majoritaires : pro laïcité, pro autorité de l’État, pro croissance, pro nucléaire, pro science, pro écologie rationnelle ?
Pour sortir de la crise de confiance dans laquelle se trouve le pays, qui pousse de plus en plus d’électeurs à se tourner vers Marine Le Pen, il faut en effet une coalition républicaine, basée sur des convictions fortes, avec des personnes issues de tous les partis qui se retrouvent sur des valeurs claires. Ce ne serait pas le « en même temps » de Macron. Je prône une remobilisation républicaine. Les sondages favorables au RN sont parlants : Il est clair que les Français n’en peuvent plus de l’ambiance qui règne en France, des violences dans les quartiers, de l’affaissement du langage, de la remise en cause de notre Histoire par le wokisme, de l’islamogauchisme, des violences contre la police, mais aussi de la pensée unique dans les médias bien-pensants, etc… Ce n’est pas un hasard si la chaîne CNEWS bat des records d’audience, en réaction à cette pensée unique. Donc pour répondre à votre question, si je reviens dans l débat politique avec ce livre, c’est parce que j’ai envie de participer, très modestement, à la construction d’une offre républicaine crédible. Pour dire les choses encore plus clairement : la destruction systématique de la gauche gouvernementale, et maintenant de la droite gouvernementale est dangereuse pour la démocratie. Il ne peut pas y avoir un parti unique, LREM, aujourd’hui sans racines ni convictions profondes, face à l’extrême droite. Sinon Le Pen gagnera. Les électeurs fatigués de tout ce cirque vont se dire : « Le Pen n’est pas antisémite, elle a modéré son discours sur l’Europe, on ne l’a jamais essayée, et puis ça ne pourra pas être pire, etc… » Voilà ce qui se passera ! Il y a même des gens à gauche qui joueront la carte Le Pen en espérant gagner le coup d’après ! C’est pourquoi il ne faut pas se résoudre à laisser l’échiquier politique orphelin d’une offre républicaine. Je ne désespère pas que les bonnes volontés de tous bords se parlent, et travaillent ensemble pour la France et l’intérêt général. Il faut sortir de ce scénario mortifère dans lequel le pays à tout à perdre. Et éviter qu’il ne sombre dans le lepenisme.
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