Moi qui ne suis pas très fan du travail du dimanche (sauf pour les curés, les épiciers tamouls ou djerbiens et les voyous de Causeur), je regrette qu’à l’heure qu’il est, et sans doute pour cause de repos dominical des fonctionnaires, le discours de Manuel Valls, hier devant l’Hyper Cacher, ne soit pas déjà disponible sur le site de Matignon.
En vertu de quoi, plutôt que de copier/coller ce discours, me voilà coincé devant mon Mac. Alors que j’aurais pu aller faire mes deux heures de jogging hebdo en écoutant le Best of d’Indochine sur mon Samsung Galaxy (Trois grossiers mensonges limite blasphèmes se sont glissés dans cette dernière phrase, saurez-vous les retrouver sans appeler ma maman ?).
Mais reviendons à notre premier ministre. Oui, j’aurais pu copier/coller son discours, plutôt que vous enquiquiner avec mes considérations partisanes et embrumées. (Hier soir je suis allé avec Basile arroser la sortie du numéro 2 de Limite). Et pis après, j’ai bien été obligé d’aller trinquer à la mémoire de Lemmy, enterré à 15 h (heure de Californie, donc à minuit ici) au Forest Lawn Memorial d’Hollywood. Faut pas plaisanter avec les dernières volontés d’un trépassé.
Mais re-reviendons à notre premier ministre. Et si ça se trouve, la digression qui précède n’en était pas une, car ce qu’il a dit devant l’Hyper Cacher était aussi clair, brutal, et authentique qu’un concert live de Motörhead. Vous croyez que j’exagère, jugez par vous-même avec ce court best of.
« Je l’ai dit avec mes mots, avec mon cœur, avec mes tripes, et je ne cesserai de le répéter parce que c’est une conviction profonde : sans les juifs de France, la France ne serait pas la France ! »
«Voir des Français juifs quitter, de plus en plus nombreux, leur pays parce qu’ils ne se sentent plus en sécurité… mais aussi parce qu’ils ne se sentent plus compris, parce qu’ils ne se sentent plus à leur place, aurait dû être, depuis longtemps, pour nous tous Français, une idée insupportable»
« Nous avons subi un acte de guerre et c’est une véritable guerre qui nous a été déclarée, et nous devons l’affronter et la gagner »
« Pour ces ennemis qui s’en prennent à leurs compatriotes, qui déchirent ce contrat qui nous unit, il ne peut y avoir aucune explication qui vaille. Car expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser »,
Manuel Valls a aussi dénoncé sans louvoyer la « détestation compulsive de l’Etat d’Israël« . Rappelons pour ceux qui ne saisiraient pas l’allusion que le 16 décembre denier, à la tribune de l’Assemblée, le même Manuel Valls avait solennellement condamné « toutes les campagnes » de boycott des produits israéliens et autres manifestations d’un « antisionisme qui bascule dans l’antisémitisme »
Encore sur l’antisémitisme, qui était quand même un peu le sujet du jour, Manuel Valls a fait une mise au point, peu répercutée dans nos médias et qui pourrait faire polémique : « L’antisémitisme, qu’il vienne de l’extrême droite ou de l’extrême gauche, qu’il vienne du fond des âges ou aujourd’hui d’une partie de la jeunesse de nos quartiers doit être combattu avec la même détermination »
Perso, je crois que ces mots sont raides, mais justes et balancés. Je n’y vois pas une fatwa d’antisémitisme, façon Crif ou Licra, contre tous ceux – électeurs, militants ou dirigeants – qu’on qualifie d’extrême droite ou d’extrême gauche, pas plus qu’une accusation en bloc « de la jeunesse de nos quartiers »
J’y vois une mise en garde vis-à-vis des gens qui viennent de ces franges de l’opinion ou de la population (pour parler clair : FN, gauche de la gauche, et territoires perdus). Je pense que seule une infime partie de ces trois secteurs est franchement antisémite. Mais je pense qu’à des degrés divers, on y tolère trop de simplifications, de comportements, de compromissions, qui peuvent déboucher sur une banalisation de l’antisémitisme. Et donc que la frange la plus patriote et républicaine de ces secteurs-là doit d’urgence faire le ménage, et qu’il faut l’y aider.
Car comme disait le Président Mao : « Là où le balai ne passe pas, la poussière ne s’en va pas d’elle-même. »
*Photo: © AFP THOMAS SAMSON.
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