En marge des commémorations de l’appel du 18 juin du général De Gaulle, le président Macron a recadré un élève de Troisième qui l’avait appelé « Manu ». Martin Pimentel se glisse dans l’esprit du président, quelques minutes après l’incident…
A peine la porte de sa DS7 refermée, Emmanuel Macron peste auprès des collaborateurs qui l’accompagnent : « Quel enfer ! BFM a tout filmé et ça va encore me retomber dessus ! » Il y a quelques minutes, en marge des commémorations du 18 juin au Mont Valérien, le président n’a pas pu s’empêcher de recadrer un adolescent dissipé qui a osé l’appeler « Manu ».
« Tu m’appelles monsieur le président ou Monsieur… » Emmanuel Macron recadre un adolescent qui l’avait appelé « Manu » pic.twitter.com/98VIV726Rv
— BFMTV (@BFMTV) 18 juin 2018
La voiture démarre, il reçoit un texto de Sibeth Ndiaye, sa conseillère en communication. Le président n’a pas envie de lire le message. Il sait d’avance qu’elle va le gonfler. Il se résigne et déverrouille son portable : « Parfaite réaction, parfaite ! », dit le texto.
Hey « Manu », tu le descends pour quoi faire ?
« Elle est ridicule… », pense Macron. Il la trouve de moins en moins bonne. Elle devrait s’effacer devant Roger-Petit : elle est utile en campagne pour faire de l’agit-prop. Mais pour gouverner, zéro !
Pourquoi s’être attardé près de ce collégien des beaux quartiers tout à l’heure ? A présent, le président ne sait plus s’il s’en veut toujours à lui pour ne pas avoir maîtrisé sa communication ou s’il en veut à la société française toute entière. « En France, l’ironie permanente emporte tout. On ne respecte plus rien, même pas moi ! », pense-t-il.
Il présentait plutôt bien et n’était pourtant pas méchant, ce gamin. Mais les médias, la méchanceté ça leur connaît. A tous les coups, les images sont déjà en train de faire le tour des rédactions des chaînes d’info… Que le môme se soit immédiatement excusé et que j’aie rattrapé le coup ensuite en parlant brevet et recherche de « l’idéal », personne ne s’en souviendra.
Le respect, c’est le minimum dans la République – surtout un 18 juin, surtout en présence des compagnons de la Libération. Mais cela n’empêche pas d’avoir une conversation détendue – regardez jusqu’au bout. pic.twitter.com/CWtPDAALhK
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 18 juin 2018
« Non, j’ai bien fait de le recadrer », tente malgré tout de se convaincre à voix haute le président alors que la voiture rentre dans le Bois de Boulogne. Qu’est-ce qu’il m’a chanté avant de me tutoyer déjà ? « L’internationale ». Ah ah, quel petit con ! En voilà déjà un qui ne chante pas « Don’t laïk ».
En même temps, je l’ai un peu cherché…
Mais paradoxalement, cette jeunesse des beaux quartiers que je viens de sermonner me donne plus de fil à retordre que je veux bien le dire. Elle continue de voter, elle. Pas comme celle du 9-3 qui s’abreuve de rap et n’a aucune conscience politique. Ceux-là pointent chez Uber et Deliveroo et ne savent pas qu’il existe autre chose que le libéralisme, le pied.
Mais l’autre là, visiblement, il a compris que président de la France, ça ne voulait plus dire grand-chose. Puis-je, vraiment, lui en vouloir ? Ne suis-je pas le premier d’entre eux à participer à cette déliquescence ? Je vais encore passer pour arrogant et « vertical »… En me laissant interviewer par Bourdin et Plenel, qui ne m’ont pas non plus donné du « Monsieur le président », je l’ai quand même un peu cherché. Après tout, quand on a la prétention de vouloir jeter à la poubelle l’ancien monde, il faut tout assumer…
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