Attentats islamistes : la mobilisation ne fait que commencer


Attentats islamistes : la mobilisation ne fait que commencer

charlie hebdo terrorisme

C’est tout un symbole, ont répété en chœur les commentateurs sur les plateaux, que de voir le Palestinien Mahmoud Abbas et l’Israélien Benyamin Netanyahou à quelques mètres l’un de l’autre, au premier rang du cortège des chefs d’Etats. Ces deux là incarnent parfaitement l’union sacrée née des « Trois affreuses » journées que nous venons de vivre : une communion dans l’émotion,  donc extrêmement fragile, qui cache des divisions profondes. Nous avons tous reçu un coup de poing dans le ventre, nous avons tous mal. Mais nous ne sommes pas d’accord sur l’identité de l’ennemi, et encore moins sur la marche à suivre pour mettre fin à ce déferlement de violence et de haine. Sur ce point, les Français ne sont pas plus unis que Netanyahou et Abbas.

Pour autant, aussi précaire soit ce moment de grâce et de communion, de nombreux Français aimeraient en vivre de semblables plus souvent. Or, le défi lancé par les terroristes islamistes qui ont frappé les 7, 8 et 9 janvier, exige non seulement de prendre rapidement des mesures de sécurité, mais aussi de remettre en question le fonctionnement de notre société.

Concernant la dimension sécuritaire, la première leçon à tirer est la nécessité de renforcer, voire de refondre notre dispositif de protection contre les attentats. Certes, il s’agit de soutenir nos services de renseignement pour leur donner les moyens d’empêcher les passages à l’acte. Mais le nouveau terrorisme est malheureusement beaucoup plus rudimentaire, donc plus difficile à détecter, que ses devanciers qui se sont succédé depuis les années 1960. En conséquence, il faut que les forces défensives disponibles sur le terrain tous les jours – policiers, gendarmes, garde du corps – soient en mesure d’agir dès les premiers secondes, dans ce très court laps de temps qui fait la différence entre un incident et une catastrophe nationale, voire mondiale.

Ce n’est pas faute de courage : le policier du Service de protection des hautes personnalités chargé de la protection rapprochée de Charb, comme son collègue tombé sous les balles des frères terroristes après avoir tiré sur eux, n’en manquaient pas. Malheureusement, ni l’un ni l’autre n’ont pu changer le cours de l’histoire. Tout doit être mis en œuvre pour que, à l’avenir, de telles rencontres de hasards entre les représentants armés de l’Etat et des terroristes aient une tout autre issue. Faisons au moins en sorte de faciliter la tâche du RAID ou du GIGN, unités de très grande qualité qui par définition arrivent très tard sur les lieux. Cela suppose beaucoup de moyens, d’efforts, d’équipements et d’entraînement, mais nous n’avons pas le choix.

Reste la question la plus difficile : comment passer d’un combat contre les moustiques à l’assèchement méthodique des marécages. La seule façon d’y parvenir, c’est de convaincre les Français musulmans d’effectuer leur autocritique de façon à ce que personne ne se sente plus jamais légitime pour commettre des actes terroristes au nom de l’islam. Or, aujourd’hui, une minorité trop importante parmi les musulmans de France se montre exagérément compréhensive à l’égard des tueurs. Ils sont trop nombreux à penser que Charlie « l’avait bien cherché », que le 11 septembre n’est qu’un complot du Mossad, que Merah est un héros. Il y a un terreau, sur lequel poussent ceux qui finissent par passer à l’acte. L’école républicaine ne nous sauvera pas si les familles, les voisins, les milieux dans lesquels grandissent les enfants musulmans en France ne sont pas républicains.

Enfin, il faudrait prendre au sérieux le terme de « guerre ». Si, dans une guerre, la première victime est la vérité, la deuxième est la liberté. Si on veut surveiller 5 000 djihadistes, prévenir des attentats et empêcher les médias de fournir de précieuses informations aux terroristes comme on l’a vu ces derniers jours, il faudra se résoudre limiter la liberté de l’information.

Pour que le formidable élan d’énergie né dimanche se transforme en état d’esprit durable et en politiques nationales pérennes, il faut affronter un débat douloureux, tout en trouvant la force de surmonter la discorde qui succèdera nécessairement à l’union nationale. Respecter et écouter ceux qui ne pensent pas comme nous, répondre aux arguments par des arguments : à la fin des fins, c’est ça la République.

*Photo :  SEBASTIEN SALOM-GOMIS/SIPA. 00701436_000003. 



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est historien et directeur de la publication de Causeur.

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