En 68, le climat insurrectionnel qui règne dans un Paris paralysé n’a pas bouleversé les habitudes de la haute société. Si la pénurie d’essence interdit les week-ends à la campagne, déjeuners et dîners se succèdent comme si de rien n’était… ou presque.
Le temps où la guillotine se dressait place de la Concorde n’est pas si lointain et celui des incendies de la Commune l’est encore moins. Aussi, lorsqu’un vent de fronde se met à souffler sur le Quartier latin, on frissonne dans les salons les mieux fermés du faubourg Saint-Germain et de la plaine Monceau. Si certains de leurs habitants paniquent, d’autres s’en amusent et veulent se frotter au plus près d’une jeunesse mal peignée. On évite les affrontements de rue, avec leurs jets de pavés et nuages de gaz lacrymogène, mais l’on se presse dans les hauts lieux de la mobilisation. Dans son journal[tooltips content= »Nancy Mitford, Une Anglaise à Paris, Payot, 2010. »]1[/tooltips], Nancy Mitford note : « 18 mai. – Lucy a téléphoné. Elle a mis un bonnet phrygien et s’est rendue à la Sorbonne déguisée en étudiante. Nous avons le même âge, cela devait être bizarre à voir. Elle a dit qu’ils étaient tous si beaux et si
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