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Macron post-Covid: des pistes pour se “réinventer”

Leçons iconoclastes d’un virus


Macron post-Covid: des pistes pour se “réinventer”
Allocution télévisée d'Emmanuel Macron, le 13 avril 2020 © Jacques Witt/SIPA Numéro de reportage: 00955772_000009

Hier soir, le président de la République a indiqué que le confinement durerait jusqu’au 11 mai, dans une allocution assez unanimement reconnue comme réussie. Lors de sa demi-heure dans la petite lucarne, avec une humilité qu’on ne lui connaissait pas, Emmanuel Macron a notamment indiqué qu’il fallait tous “sortir des sentiers battus, des idéologies, [se] réinventer.” En ajoutant “et moi le premier!”
Oh, mais la période difficile que nous traversons est déjà riche d’enseignements flagrants! Quelques pistes de réflexions.


Alors que l’information en continu peine à détacher son regard de la comptabilité morbide du Covid-19, le virus dévaste la porcelaine de nos certitudes. Certains dégâts se révéleront sans doute temporaires — on peut ainsi souhaiter rapidement ne plus avoir à remplir une attestation pour acheter une baguette. Mais la démocratie, les transports en commun comme le voilement du visage sont appelés à subir des conséquences encore difficilement mesurables, mais majeures.

Quel que soit leur régime politique, face au péril infectieux, la plupart des Nations ont opté pour un confinement plus ou moins strict en acceptant de sacrifier leur économie sur l’autel de la santé publique. Même la Chine, héritière de la Révolution culturelle ou du Grand Bond en avant et de leurs dizaines de millions de morts, n’a pas accepté que le sars-cov-2 emporte des centaines de milliers de Chinois. Xi-Jing-Ping est sans doute cynique, mais son souci d’éviter des drames individuels dans le cadre du « doux commerce » international cher à Tocqueville fera date. Cette crise sanitaire mondiale, souvent présentée comme le retour des nations ou du collectif, semble mondialement gérée sous l’angle du droit des individus à devenir centenaire — un droit que l’Occident va payer au prix d’un « tracking » à la chinoise. Les Droits de l’Homme, au nom de la sécurité, ont eu la peau des libertés individuelles en une semaine. Et si le Covid-19 démontrait plutôt l’écroulement du collectif sous les coups de boutoir de l’hyperindividualisme sanitaire ?

Mondialisation et abandon de la souveraineté nationale: confirmation de fortes intuitions!

La mondialisation, fidèle elle aussi au Ying et Yang chinois, a dévoilé deux facettes dont les conclusions restent à analyser avec plus de recul. Côté pile, la numérisation de nos vies montre ses incroyables vertus dans trois domaines majeurs au moins : le télétravail, l’enseignement à distance et la mise en commun des capacités de recherche d’un traitement ou d’un vaccin. Ceux qui n’aimaient pas internet et vivaient sans connexion savent ce que le vrai confinement veut dire. 

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Côté face, celui des flux bien réels de population et de marchandises, la globalisation révèle ses aspects les plus désastreux. La carte de la pandémie suit fidèlement celle des mégapoles diverses et denses, principaux foyers de l’infection. Sur les tarmacs, les vols à main armée de dollars des cargaisons de masques chinois à destination de l’Europe par les États-Unis prouvent les fols abandons de souveraineté commis au nom de l’optimisation libérale. Le calme qui règne dans les temples d’Angkor ou à Versailles souligne, lui, l’hérésie du tourisme de masse. Les compagnies aériennes se meurent, mais le ciel est bleu à Pékin. Il semble probable que l’on voit moins de Chinois au Mont Saint-Michel dans les années à venir.

L’argent ne fait pas le bonheur

Le regretté Jean-François Revel avait démontré dans La connaissance inutile la capacité d’une partie de l’échiquier politique français à faire fi de toutes les données factuelles prouvant l’inanité de leurs théories. L’exemple contemporain du Venezuela illustre à merveille son raisonnement : il existe toujours des défenseurs du Maduro-Chavisme, aveugles à la situation objectivement dramatique de ce pays dévasté. Le Covid-19 nous apporte ainsi la démonstration incontestable que l’argent ne fait pas le bonheur. Avec 7% du PIB alloué à son système sanitaire, la Corée donne une leçon aux États-Unis qui y consacrent 16,7% et vont laisser mourir des gens que les Coréens auraient sauvés. Révoltés à l’idée que l’efficacité d’un service public puisse être mesuré, les dévots de la dépense publique française tendront — comme d’habitude — la sébile pour que « les soignants » puissent tirer des chèques à l’infini.

Ces jobastres devraient plutôt profiter du confinement pour se flageller sans modération. La France avec 11,3 % du PIB affectée à la santé aura un bilan probablement effroyable en comparaison de l’Allemagne où l’on trouve des masques, des tests et quatre fois plus de lits de réanimation. Pour exactement 11,3 % du PIB ! Un scandale d’État pour le meilleur système sanitaire du monde, à qui on promet déjà des milliards, mais pas la fin des 35 heures qui l’ont laminé. Où l’on s’aperçoit que pour la CGT, F.O. et les autres, un bon système doit être le plus onéreux possible avant d’être efficace. Leur survie à eux en dépend, alors si c’est au prix de quelques milliers de morts…

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La connaissance inutile

Malgré toute l’admiration que l’on peut porter à Revel, la pandémie actuelle aurait justifié un chapitre complémentaire à son livre, intitulé « le virus de l’exception ». La connaissance ne s’est pas révélée cette fois inutile, mais vraisemblablement catastrophique. Les diverses épidémies de grippes des années 50 ou 60 ont pu provoquer chaque année de 15 à 100 000 décès en France — et des millions dans le monde — dans une indifférence complète. L’ignorance n’a pas permis d’épargner ces vies-là, mais elle a permis aux autres de continuer à vivre sans euthanasier ni l’économie ni les libertés individuelles. Cette méconnaissance n’a pas non plus rempli les hôpitaux psychiatriques de nouveaux cas de paranoïa, ni confiné des femmes et des enfants avec des maris violents ou poussé au suicide des salariés licenciés et des artisans ruinés. 

Ainsi, le bilan du confinement gagnerait à intégrer ses dégâts collatéraux sur cinq à dix années. Il n’est pas certain qu’il soit flatteur pour ce « lockdown » humaniste.

Tous voilé(e)s et vacciné(e)s, inch Allah!

Plus anecdotique — quoique — la prochaine obligation de circuler masqué à la fin du déconfinement pourrait marquer la victoire éclatante du salafisme et de l’extension à l’ensemble de la population du voile dans sa version prophylactique. 

La cuisine maison sortira également victorieuse de deux mois de confinement — on réapprend à mitonner, les restaurants ont peut-être quelques soucis à se faire dans les temps à venir. 

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Des défaites, on en devine aussi bien sûr, et des surprenantes. Outre les restrictions imposées à la pratique du vélo — cet accessoire de la mobilité douce tant vantée — la disqualification sans appel des transports en commun, dont l’image de boîte de Petri paraît solidement établie, porte un coup terrible à la guerre sans merci lancée contre l’automobile. Les Renault Zoe et consorts, voire les diesels hors d’âge, reprennent des couleurs, autant comme bulle stérile que comme moyen de déplacement, sale temps pour les bouchons et Hidalgo. On signalera enfin, la brutale disparition des anti-vaccins – on attend en vain leurs protestations indignées contre la recherche d’un vaccin contre le Covid-19…

Le déconfinement nous prépare d’autres déconfitures, attachez vos ceintures !

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Diplômé d'HEC, il a travaillé de nombreuses années dans la presse ("Le Figaro", "Le Nouvel Obs", "Libération", "Le Point", etc.). Affectionnant les anarchistes de droite tels Jean Yanne ou Pierre Desproges, il est devenu l'un des meilleurs spécialistes de Michel Audiard. On lui doit deux livres de référence sur le sujet : <em>Le Dico flingueur des Tontons</em> et <em>L'Encyclopédie d'Audiard</em> (Hugo & Cie).

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