Sophie de Menthon apostrophe le président de la République, candidat à sa succession. Elle se gendarme contre un programme encore nébuleux et fustige le manque de réformes favorables aux entreprises effectuées au cours du quinquennat.
Monsieur le président-candidat,
Ce n’est pas tant de vous écouter dont nous avons besoin, mais que VOUS nous écoutiez…
Certes, vous avez actuellement à faire face à des crises toutes plus graves les unes que les autres. Certes, vous les résolvez du mieux possible. Certes, nous avons globalement confiance en vous… Certes, nous pouvons penser que vous avez raison de ne pas aller à la télévision avant le deuxième tour où une dizaine d’opposants vous attendraient pour jouer aux fléchettes contre vous tout en minutant votre temps de parole !
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Mais, Monsieur le président, même vos plus fidèles soutiens commencent à être exaspérés. Nous avons l’impression d’être des enfants qui guettent leur père à qui ils veulent poser des questions et auxquels on répond « tais-toi ! Papa travaille, c’est très important, va dans ta chambre ! »
Quatre heures: c’est une performance, pas un programme
Insatisfaits des quatre heures de présentation de programme assénée devant la presse [1] et retraduite pas cette dernière, serait-il possible que vos propos soient plus clairs et pragmatiques, correspondent à ce que nous vivons ? J’en suis encore à décrypter le programme, et je ne vois pas qui, intellectuellement, arrive à tout « imprimer », comme disent les ados. Vous nous proposez un projet, en mieux parait-il, de tout ce que vous avez si bien fait ? Ah bon, avec plus d’écoute, en étant plus attentif ? Ça commence mal…
Pour cela, vous nous promettez, comme tous les candidats, des referendums. Mais on sait que les referendums n’engagent même pas ceux qui les lancent, s’adressent à ceux qui veulent bien voter et satisferont ceux qui ont voté oui, et encore… On se souvient tous de celui sur l’Europe…
A quand la réforme de l’État profond ?
Êtes-vous au courant, Monsieur le président, que la France fonctionne si mal, voire ne fonctionne plus ? Ce n’est pas de votre faute, mais si vous y êtes résigné, c’est plus grave. Vous souvenez-vous de « l’État profond » contre lequel vous pestiez il y a quelques années ? Oublié ? Et les missions régaliennes de l’État ? Les économies structurelles, le statut de fonctionnaire, les missions de service public qu’on pourrait déléguer au privé ? Quand consulterez-vous les entreprises au lieu de leur filer des amendes à la moindre occasion ? L’État au service d’une société de confiance ? (rires) …
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Quand desserre-t-on les contraintes de notre maillage administratif ? Où en est le déploiement de votre spoil system (système des dépouilles) pour que nos hauts fonctionnaires inamovibles ne gèlent plus tout le système ? Supprimer l’ENA ne change pas grand-chose, il faudrait peut-être plutôt contraindre ses impétrants à aller trois ans dans une PME en région ! Il reste tant d’organismes multiples et inutiles à supprimer, tant d’argent gaspillé dans des associations oiseuses… Et ces Agences régionales, et ces doublons de tout ! La réforme structurelle indispensable reste là à faire ! Ce sont par ailleurs des fondamentaux pour obtenir l’équilibre sine qua non des finances de l’État, et il semble désormais que parmi les candidats il n’y ait que Valérie Pécresse qui souhaite s’y atteler sérieusement, avec, plus modestement, Marine Le Pen. Et vous ?
Les entrepreneurs: pourquoi si peu de considération ?
Nous, les entreprises, entrepreneurs, indépendants, les 3 millions qui font la France en constituant le matelas de l’économie, les obscurs qui ne sont ni « Start up nation », n’appartiennent pas à « Choose France », ne sont pas tellement High-Tech, ni secteur d’avenir à vos yeux, vous avez grand tort de nous mépriser ou de nous laisser en avoir le sentiment. Nous ne sommes ni reçus, ni écoutés, nous nous heurtons à une France désespérante d’inefficacité et immuable. Alors, votre programme, dans ces conditions…
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Pardon, j’oubliais quand même ! Merci pour l’argent pendant le Covid. Nous vous en sommes reconnaissants, c’est vrai que nous avons été très aidés et il parait que nous n’en rembourserons rien ? Ce qui d’ailleurs finit par nous inquiéter beaucoup. Vous faites campagne avec un carnet de chèques et même vos supporters les plus acquis commencent à vous le reprocher. Le point d’indice des fonctionnaires: un cadeau électoral. Le statut de la Corse : pourquoi juste là, maintenant ?
Sophie de Menthon, bientôt reçue à l’Elysée ?
Et puis, enfin, il y a ce sentiment que vous savez tout mieux que nous. Nous avons pourtant des choses à dire, et nous voulons vous entendre. Pas seulement devant un parterre de Français triés sur le volet, qui posent des questions avec fiches préparées, ce qui ennuie tout le monde ! Alors, si vous n’avez légitimement pas envie de vous confronter à des adversaires qui ne voudront que vous flinguer, choisissez quatre ou cinq des Français qui ont des choses à dire dans leur secteur, qui subissent les tracasseries administratives, les blocages, à une heure de grande écoute et jouez le jeu ! Ils vous interrogeront, dans un langage simple, concret, de bon sens… Vous n’êtes même pas obligé de choisir des gilets jaunes…
Pas le temps ? Vous plaisantez. Pas le courage ? Je ne peux l’imaginer. Une mauvaise idée ? Pourquoi ? Cela n’intéresse pas les médias ? Bien sûr que si, les Français s’intéressent aussi à leur économie. Il est temps de faire vraiment campagne. Sinon vous allez le payer très cher dès que la vraie vie reprendra son cours.
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[1] Présentation du projet présidentiel à Aubervilliers, le 17 mars 2022
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