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Double bind et win-win sont en bateau…

Un billet de Jean-Paul Brighelli


Double bind et win-win sont en bateau…
Jean-Paul Brighelli en 2009

Notre chroniqueur est au fond un grand admirateur des stratégies macroniennes. Il y décèle l’influence d’une formation élitiste — celle des prépas aux grandes écoles — et d’une structure psychique perverse. Mais que va-t-il chercher là !


Sans doute connaissez-vous le double bind (ou double contrainte) théorisé vers 1956 par Gregory Bateson au sein de l’école de Palo Alto — mais bien antérieure dans les faits. Il s’agit d’une double injonction telle que l’obéissance à l’un des termes implique une désobéissance au second : obéis aux principes religieux et enterre ton frère, susurrent les dieux à Antigone, mais obéis au roi, qui interdit d’accomplir pour lui les rites funéraires. L’exemple littéraire le plus connu a été exploité par William Styron dans Le Choix de Sophie (1979), où une mère juive arrivant dans un camp d’extermination doit choisir celui de ses deux enfants qui sera gazé — sinon, les deux le seront. Ça ne finit pas bien.

Vers un raz-de-marine le 30 juin ?

La dissolution de l’Assemblée nationale décidée par Macron obéit à ce schéma schizoïde (qui s’en étonnera ?). Soit, par un miracle peu probable, l’actuelle majorité, en s’alliant aux éléments éparts de la droite non solubles dans le RN sauve les meubles — et alors l’extrême-droite, frustrée, descendra dans la rue. Soit une marée bleu marine déferle et fait entrer un grand nombre d’incapables revanchards au gouvernement, ce qui mettra l’extrême-gauche, avec l’appui de nazislamistes, dans la rue, le fantasme de Mélenchon étant la démission de Macron lui-même, et son remplacement par un Comité de Salut public dont le Lider minimo serait le manitou, Robespierre recollé et Saint-Just ressuscité…

C’est une stratégie win-win (ou gagnant-gagnant, pour parler français). Dans les deux cas, la France est déstabilisée, la guerre civile affleure, et avec l’article 16, Macron suspend les libertés publiques — y compris celle d’organiser des élections présidentielles en 2027.

A lire aussi, Philippe Bilger: Emmanuel Macron: c’est sa faute, sa très grande faute…

Avec un peu de chance, les rodomontades présidentielles en Ukraine amèneront les services russes à en rajouter une louche dans la déstabilisation — sans compter les agents infiltrés de Daesh et les partisans des Frères musulmans : du désordre pourrait naître la charia, pensent-ils.

Gueule de bois

Nous frôlerons alors l’état de guerre, qui suspendra pareillement tout le processus démocratique à venir, et permettra au roitelet de l’Elysée d’exercer les pouvoirs législatifs et exécutifs. Macron sans ministres, décidant de tout — un rêve d’autiste aspirant à la dictature.

Voilà ce qui arrive lorsqu’on élit un homme trop jeune dans une fonction suprême. Il ne peut se résoudre à l’abandonner, au moment même où il se sent enfin prêt à l’exercer pleinement. Les gogos qui se sont laissé influencer en 2017 et 2022 par le réflexe anti-RN et ont porté au pouvoir un homme que pourtant ils n’aimaient guère ont bonne mine.

Comme ont bonne mine ceux qui, ce matin, se désespèrent du score des droites extrêmes (le sont-elles réellement ? Ils devraient aller voir dans de vrais pays fascistes). Mais enfin, ce sont les mêmes qui ont voté jadis pour ce faux-cul de Mitterrand, ont encensé Lionel Jospin, ont récidivé en élisant Hollande, se sont félicités de l’arrivée au pouvoir de Vallaud-Belkacem et de Christiane Taubira, ont nié les malversations islamistes, et autres merveilles de la société socialoccultiste, comme disait Philippe Muray.

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Normalien et agrégé de lettres, Jean-Paul Brighelli a parcouru l'essentiel du paysage éducatif français, du collège à l'université. Il anime le blog "Bonnet d'âne" hébergé par Causeur.

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