Lors de son allocution télévisée, le président Macron a rappelé aux Français que la crise sanitaire n’était pas dernière nous. Il a annoncé la vaccination obligatoire des soignants, et l’extension du maudit passe sanitaire. De quoi donner du grain à moudre à ceux qui craignent une « dictature sanitaire”. Le coronavirus va nous gâcher l’été, mais il a déjà gâché ce “moment” présidentiel où le chef de l’État aurait préféré se montrer grand réformateur !
Jusqu’au tout derniers jours précédant son allocution télévisée, le président de la République a gardé espoir. Il a voulu croire que les beaux jours étaient bel et bien revenus. Le pays n’était-il pas déconfiné depuis mai ? Les discothèques n’avaient-elles pas rouvert leurs pistes de danse aux fêtards depuis ce weekend ?
Finis les beaux jours…
Emmanuel Macron, grand réformateur, aurait tant aimé consacrer son intervention de 20 h aux réformes ! Celles pour lesquelles la macronie se leurre à croire qu’une majorité de Français l’a élu face à Marine Le Pen. Oui, son idée première était d’esquisser hier soir les dix prochains mois à venir qui nous séparent de la présidentielle. Ne plus parler du Covid, et définir un nouveau cap pour le pays. Las, il a finalement été contraint d’accorder plus de la moitié de cette curieuse “allocution du 14 juillet” au maudit virus.
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Les échos qui lui parvenaient du ministère de la Santé depuis le weekend n’étaient pas bons. Interrogé sans cesse sur ces curieux soignants qui traînent des pieds et évoquent leurs conditions de travail quand on leur parle vaccination et protection des patients, le ministre de la Santé répétait que le variant Delta, plus contagieux, était devenu majoritaire dans les nouvelles contaminations. “Nous sommes au départ de quelque chose qui ressemble à une vague épidémique” alertait-il sur Radio J dimanche. Si rien n’est fait, la nouvelle vague éclabousserait nos hôpitaux dès août. “Il va se passer la même chose que l’été dernier” s’inquiétait le bon docteur Véran.
Rien ne va plus, marche arrière
Réuni lundi matin autour du grand manitou, le conseil de défense sanitaire est venu confirmer toutes les craintes présidentielles. La campagne de vaccination tourne au ralenti, et on ne peut pas stopper l’épidémie tant que seuls 40% des Français ont reçu les deux doses.
Hier soir à 20 heures, après s’être félicité du “vigoureux rebond” de notre économie (la croissance de la France pourrait atteindre 6% en 2021), après avoir loué les plans de sauvegardes du gouvernement par secteurs et nos écoles qui sont restées fermées moins longtemps qu’ailleurs, Emmanuel Macron a donc annoncé une nouvelle batterie de mesures contraignantes. Il a surtout lancé un appel solennel à la vaccination. Le pays étant “confronté à une reprise forte de l’épidémie”, il a annoncé qu’une “nouvelle course de vitesse” était engagée. La vaccination immédiate des soignants devient obligatoire, des sanctions ou l’impossibilité de travailler étant envisagées pour ces derniers à partir du 15 septembre. Et si ça ne va pas mieux, le président n’exclut pas non plus la vaccination obligatoire de tous les citoyens. Le parlement est convoqué le 21 juillet pour voter une nouvelle loi sanitaire.
De son côté, el famoso passe sanitaire devient exigible dans les cinémas, musées ou parcs de loisirs. Et en août, il sera également demandé dans les transports, à l’entrée des cafés, des restaurants ou dans les grands magasins. Les tests PCR, enfin, deviendront payants à la rentrée, le président confessant que cette mesure vise à inciter à la vaccination plus qu’à faire réaliser des économies à la Sécurité sociale. Pour terminer, l’état d’urgence sanitaire et le couvre-feu sont instaurés à la Martinique et à la Réunion.
Vaccin : Oui, il y a des risques !
Pour l’exécutif, la priorité des priorités, on l’a bien compris, est l’augmentation de la couverture vaccinale. Elle constitue selon le chef de l’État la grande nouveauté de cette saison 2021, notre “atout-maître” dans la lutte contre l’épidémie. Tout le discours présidentiel d’hier visait en réalité prioritairement à encourager le ventre mou des non-vaccinés pas totalement réfractaires à la piqûre. Les citoyens réellement opposés à la vaccination, s’ils sont bruyants, sont en réalité moins nombreux.
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Mais n’y a-t-il pas des risques à se faire vacciner avec un vaccin si récent ? Le débat va bien sûr repartir de plus belle. Et alors que l’accès au bistro sera refusé aux non-vaccinés, il sera difficile de donner entièrement tort à ceux qui crient à la “dictature sanitaire”. Et oui, il y a assurément des risques. Le risque de retrouver des interactions sociales normales, d’abord. Et, qui sait, bientôt un retour à la vie normale. Des risques d’effets secondaires, aussi, mais comme pour tous les vaccins et pour beaucoup de médicaments.
Et vive la France !
Le gouvernement parie sur un été de mobilisation, après ce qu’il considère peut-être comme un coupable relâchement de la société…
En attendant, nos belles réformes économiques sont au point mort. Le chef de l’État s’est certes félicité du rebond de croissance. Il a indiqué qu’il comptait réinscrire le pays “dans une trajectoire vers le plein-emploi” à la rentrée et s’est réjouit de ses résultats en matière de réindustrialisation (pourtant fort timides, la France étant invitée à applaudir l’ouverture d’une pauvre usine de paracétamol, et une autre de batteries automobiles). Le président Macron a en revanche indiqué que la nécessaire réforme des retraites était différée jusqu’à ce que “les conditions sanitaires soient réunies…” Comme il nous a aussi dit qu’il faudrait vivre avec le virus en 2022, cela signifie donc bien que ce n’est pas prévu pour ce quinquennat.
Mais bonne fête nationale quand même !