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Macron ne veut pas trop se fâcher avec les militants anti-PMA

PMA: Macron joue sur du velours


Macron ne veut pas trop se fâcher avec les militants anti-PMA
Le Président Macron le 14 octobre 2019 © Photo :Jacques Witt/SIPA Numéro de reportage: 00927904_000016

A la différence de François Hollande, le Président Macron a compris qu’une bonne partie des manifestants bourgeois opposés à la PMA pour toutes vote pour lui… Alors que les députés votent la loi « bioéthique », admirez l’équilibriste!


Pour ceux qui ont fait toutes les manifs LMPT depuis 2012, la manif anti-PMA du 6 octobre avait une coloration très différente. Non pas par la typologie des manifestants, qui est la même que celle de l’époque, mais par le contexte politique.

En effet, on se souvient du caractère anxiogène des manifestations sous le binôme Hollande-Valls: humiliation des manifestants et de leurs représentants, refus de les recevoir par le pouvoir en place, déclarations clivantes des politiques, des intellectuels et de la presse : « radicaux », « haineux », « fascistes en loden » … les noms d’oiseaux avaient volé. On se souvient des petites familles bloquées sur les Champs-Elysées, écrasées contre des barrières, gazées aux lacrymogènes, des arrestations arbitraires pour « port de t-shirt », des condamnations, emprisonnements et autres gentillesses.

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Pourquoi cette humiliation programmée ? La politique ne fait jamais rien de gratuit. Cette réponse politico-médiatique au mouvement avait un sens très précis : Hollande voulait mettre en scène la « fracture politique » afin d’affaiblir la droite. Il était important de diaboliser les catholiques pour les pousser vers le FN. Cette politique a plutôt réussi à Hollande, elle a même sauvé les meubles aux régionales de décembre 2015.

Hollande, Macron: deux méthodes

La situation de Macron est très différente, car une bonne partie des manifestants du 6 octobre, ceux de l’ouest parisien, sont ses propres électeurs. Lors des présidentielles, puis des législatives de 2017, leur appétence bourgeoise a porté leur vote vers le jeune banquier dynamique (le portefeuille) et autoritaire (goût de l’ordre), et contre la candidate « populaire ». Mais paradoxalement aussi, contre leurs convictions sociétales.

Cette nouvelle configuration politique explique la « mansuétude » actuelle du pouvoir vis-à-vis des manifestants. Si le petit harcèlement habituel (approbation des parcours au dernier moment, refus des grandes artères, itinéraires bloqués, comptages « bidouillés ») fait partie de la panoplie traditionnelle pour pourrir les manifestations de droite, par contre, on constatera que ceci ne s’est accompagné d’aucune déclaration visant à humilier ou radicaliser le mouvement. Ce sont les mêmes, mais ce ne sont plus des « fascistes en loden. » Macron a pris le risque de faire passer cette loi parce que, la fracture identitaire grandissant, il ne pourra plus tenir longtemps le déni du multiculturalisme, de l’immigration sauvage « bienfaisante » et de l’islam « religion de paix et d’amour ». Alors qu’il entend durcir ses positions sur l’identitaire, Macron a besoin de donner des gages à ses électeurs de gauche.

Macron joue les équilibristes

Son idée est bien de « couillonner » (un mot que Galabru prononçait si bien !) ses propres électeurs, sans qu’ils lui en veuillent exagérément. Il pense sans doute qu’ayant abandonné leurs convictions aussi facilement en 2017, ils feraient de même aujourd’hui. Erreur : il a oublié qu’à l’époque, le repoussoir Marine Le Pen avait fait son effet. Les électeurs versaillais n’ont pas voté pour Macron, mais contre Marine Le Pen et contre un certain aventurisme politique (on pense à l’Europe).

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Si la manif avait été un flop, c’était gagné. Et cela aurait pu marcher, tant les manifestants, échaudés par l’expérience LMPT, n’y sont pas allés toujours de bon cœur. Mais forts de leur succès, ils sont regonflés à bloc. Comme me l’a dit un ami, l’important n’est pas que le pouvoir ait médiatisé qu’il n’y avait que 40 000 personnes, mais qu’il sache qu’il y en avait peut-être en réalité 600 000… Macron, une fois de plus, s’est pris les pieds dans le tapis. S’il pensait qu’il ferait passer son cadeau à sa gauche sans anicroche, c’est bien raté. Etre « ni de gauche ni de droite », c’est bien quand tout marche, parce qu’on ramasse les électeurs des deux côtés. Mais c’est vraiment un jeu d’équilibriste !

Comme l’a intelligemment remarqué Eric Zemmour dans son dernier éditorial, les ghettoïsés de la « fracture politique » (la vraie droite, en comprenant la droite catholique) devraient s’allier avec ceux de la « fracture sociale » (la France périphérique). Pourraient même s’y ajouter ceux de la « fracture identitaire » (les musulmans républicains, donc schismatiques). Le problème, c’est que si ces trois populations ont les mêmes valeurs antilibérales (les idées nationales) et antilibertaires (celles de la famille), elles n’ont pas le même ADN culturel… Elles ne se connaissent pas et ne se parlent pas. Il faudrait peut-être commencer. Zemmour conclut ainsi sa chronique: « [La seule chance des militants de la manif contre la PMA] de renverser la table est de s’allier aux vaincus de la mondialisation, aux «gilets jaunes», aux populistes, bref aux classes populaires. Sans cette alliance, sans ce «compromis historique», toutes les manifestations du monde ne serviront à rien. »



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