Le président sortant, qui effectuait son premier déplacement de candidat à Poissy, a confirmé hier soir qu’il ne participerait à aucun débat avec les autres candidats avant le premier tour. Évidemment, ses petits camarades de jeu de la campagne présidentielle dénoncent un scandale démocratique…
C’est officiel. Emmanuel Macron ne débattra pas avec les autres candidats ! Il l’a confirmé hier soir, lors de son déplacement de terrain à Poissy: « Aucun président qui se représentait ne l’a fait. Je ne vois pas pourquoi je ferais différemment ».
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Ses concurrents hurlent au scandale. Mais la politique n’est pas seulement une affaire d’abnégation, de justice ou de nobles considérations. À la place de Macron, ils feraient exactement pareil. Parce qu’il a cet avantage structurel d’être le président en exercice, et surtout parce que Poutine lui offre une scène mondiale. Ce n’est pas lui prêter uniquement du cynisme que d’affirmer cela : tout politique rêve de rencontrer l’Histoire, et cette dernièrement a rarement une bonne tête. En 2003, Hubert Védrine enviait son successeur Dominique de Villepin qui avait pu faire son grand discours à l’ONU contre la guerre en Irak.
Ses rivaux ne peuvent pas le concurrencer dans son rôle de père de la nation
Emmanuel Macron n’est évidemment pas responsable de la catastrophe ukrainienne, mais elle lui permet de se la jouer mal rasé et bras de chemises dans une vidéo ou de nous dire qu’il s’intéresse aux Français, mais qu’il doit éviter la troisième guerre mondiale. Oui il a dit ça !
Il en fait toujours un peu trop, c’est qu’il veut nous montrer son âme immaculée. C’est ce que le chroniqueur Guy Carlier appelle le « théâtre aux armées ». Emmanuel Macron emploie un vocabulaire moral : « Poutine, c’est mal ». Vous pensiez que la diplomatie supposait à la fois du secret et de la froideur ? Vous vous trompiez ! Pour quelle raison Macron ferait-il campagne ? Ses rivaux ne peuvent pas le concurrencer dans son rôle de père de la nation. Ce sera donc sans lui. Ne restera qu’une bataille pour la deuxième place.
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Faut-il pour autant y voir scandale démocratique ?
La ficelle est énorme quand il ressort de son chapeau le lapin-grand-débat avec les Français comme à Poissy hier soir. C’est un débat Potemkine, avec des gens intimidés, voire sélectionnés. Macron va montrer son talent de stand-upper. Mais ce one man show entrecoupé de questions n’est pas un débat égalitaire. Cela dit, les autres candidats ne sont pas obligés de se résigner à cette vraie-fausse campagne. Ils n’ont qu’à être plus convaincants. Ils n’ont pas besoin de lui pour exposer et critiquer son bilan. Finalement, la qualité du débat dépendra largement des médias. Il y aura scandale démocratique s’ils décident que pour cause de guerre, le débat est sans intérêt ou s’ils interrogent le candidat Macron avec la révérence qu’on doit au chef de guerre. On espère que les journalistes l’interrogeront comme les autres, en lui coupant la parole à toutes les phrases comme ils le font avec Marine Le Pen ou Éric Zemmour. À la fin, les Français décideront s’ils veulent reconduire le président « Top Gun » (c’est le mot d’un pécressiste). Et s’ils le font, élu et électeurs auront cinq ans pour méditer sur la distinction entre la conquête du pouvoir et son exercice.
Cette chronique a initialement été diffusée sur Sud Radio
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