Selon le député, la majorité n’a pas démérité face à la crise sanitaire. Le gouvernement implique les collectivités dans la prise de décision, mais assume ses responsabilités et dit la vérité aux Français. Propos recueillis par Gil Mihaely.
Causeur. Fin mars, Olivier Véran a déclaré que nos capacités en réanimation (matériels et personnels) passeraient de 5000 à 14 500 lits. En octobre, nous étions toujours à 5 800 ! Le 28 octobre, alors que 3 000 de ces lits étaient occupés, le président s’est engagé à porter ce chiffre à 10 000 lits. Que s’est-il passé ?
Ludovic Mendes. Les annonces faites en mars ne visaient pas la création d’une capacité permanente de 14 500 lits de réanimation ! Dans un laps de temps aussi court, on peut faire un effort ponctuel, mais qui ne peut pas durer. On ne crée pas un service de réanimation du jour au lendemain. N’oublions pas que pendant les dix ou quinze dernières années, des mauvaises décisions ont été prises concernant la formation des anesthésistes, réanimateurs et des infirmiers spécialisés.
Reste qu’il a fallu imposer un deuxième confinement parce que, fin octobre, les lits promis manquaient. Le problème était donc hospitalier, et non sanitaire !
Non. Nous avons amorcé le reconfinement non pas à cause d’un taux d’occupation important en réanimation, mais parce qu’il y avait une explosion à la fois du nombre des contaminations et du nombre des malades de la Covid-19 en besoin d’hospitalisation « normale ». Mais surtout, nous nous sommes aperçus que cette fois-ci, une population différente était touchée par le virus. Contrairement à la première vague, des malades sont plus jeunes, en bonne forme physique et sans comorbidité. J’ajoute qu’in fine, les autres pays ont pris des mesures semblables.
Le président a également affirmé fin octobre que, quoi que nous fassions, près de 9 000 patients seraient en réanimation mi-novembre. Nous y sommes. Les mesures prises fin octobre n’étaient pas aussi strictes qu’au printemps, et malgré cela on est à peu près à la moitié du chiffre annoncé. Avait-il de mauvais chiffres ou est-ce qu’il applique une politique de la peur, catastrophiste pour mobiliser les citoyens ?
Si je ne me trompe pas, le président a parlé d’un total de 9 000 lits de réanimations occupés, c’est-à-dire 9 000 cas graves de la Covid… mais aussi d’autres maladies. Ceci dit, il est vrai que la situation est moins grave que celle prédite par les projections d’octobre. Dans ma région, le Grand Est, nous nous attendions à un pic important aux alentours du 15 novembre, mais nous avons eu de la chance et on n’a pas atteint ce pic. Nous avons atteint un plateau et la décrue est amorcée. Le gouvernement n’essaie pas de faire peur. Souvenez-vous du début de la crise : on annonçait des millions de morts, mais personne n’y croyait vraiment ! Pourtant c’est exactement ce qui s’est passé. En France, le gouvernement se sert des projections de l’Institut Pasteur et s’appuie sur le Conseil scientifique, en prenant aussi en compte que le virus risque à tout moment de muter et rendre la situation encore plus dangereuse et compliquée. Emmanuel Macron ne navigue pas à vue. Il navigue dans un brouillard épais. Dans une telle situation, le président et la majorité ont choisi de tenir un discours de vérité même s’il est parfois alarmiste.
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Vous parlez d’un discours de vérité, mais avez-vous oublié les palinodies sur les masques ?
Je pense que Macron a toujours été honnête, et a aussi accepté de reconnaître les erreurs qui ont été faites. C’est également vrai pour le Premier ministre et les ministres, dont celui de la Santé.
À l’issue du premier confinement, le gouvernement a également promis que les corps intermédiaires et les élus locaux seraient associés à la gestion de la crise. Face à la deuxième vague, les réflexes jacobins sont revenus…
En imposant une politique au niveau national, l’État a tout simplement pris ses responsabilités. Depuis la rentrée, sur tout le territoire, préfets, parlementaires et élus discutent, négocient et font des remontées à Paris. Et, s’il y a bien eu le regrettable « couac marseillais », c’est parce que dans ces discussions complexes, des élus ne veulent pas jouer le jeu. Heureusement, ce cas est l’exception.
N’empêche que, concernant les petits commerces, des dizaines des maires voulaient s’opposer aux mesures dictées par le gouvernement.
Là aussi, l’État a pris ses responsabilités quand certains élus, entre autres pour des raisons électoralistes, ne voulaient ou ne pouvaient pas prendre certaines décisions : dans des villages ou des petites villes, la pression sur le maire peut être énorme !
Mais les maires sont pénalement responsables. Dès lors, pourquoi ne pas les laisser gérer leurs communes dans ce qu’elles peuvent avoir de spécifique, et en assumer ensuite les conséquences ?
Parce que parfois le maire ne voit pas le tableau global. Si vous étudiez la mobilité des Français, la manière dont ils se déplacent, font leurs courses, travaillent ou se soignent, vous vous rendez compte que les zones reculées ne le sont pas tant que ça… On ne peut donc pas traiter ces villes et villages comme des îles au milieu de la mer, et il faut raisonner à une échelle qui dépasse souvent le maire. Nous, gouvernement et majorité, ne sommes pas là pour répondre à une somme d’individus localement. Nous sommes au service de l’intérêt général et nous entendons accomplir cette mission.
Une crise de cette nature et de cette ampleur exige des arbitrages difficiles. Pour sauver des vies, on grignote des libertés en limitant la circulation, le commerce, etc. Il n’est pas évident de savoir où placer le curseur entre les libertés et la préservation des vies. Philosophiquement, vous sentez-vous à l’aise avec l’endroit où votre majorité a arrêté le curseur, alors que les critiques sont très nombreuses ?
Globalement, la seule liberté vraiment remise en question, c’est la libre circulation. Les autres sont plutôt bien respectées et le Conseil constitutionnel, sollicité à plusieurs reprises, le confirme. Nous sommes dans un état d’urgence – donc d’exception – pour faire face à une situation compliquée. Si ces décisions exceptionnelles qu’exige notre situation menacent le commerce de proximité, c’est parce qu’il n’y avait pas d’autre choix. Par ailleurs, au risque de vous déplaire, j’aurais personnellement aimé que l’on aille plus loin encore sur le cas des personnes testées positives et qui ne respectent pas la règle de rester chez elles en quatorzaine. On devrait durcir la loi sur ce point. Ces personnes doivent être retenues coûte que coûte à leur domicile ou être mises dans des espaces dédiés comme des hôtels, en collaboration avec l’État (pour la prise en charge) et recevoir une amende importante en cas de manquement. Ces personnes-là mettent en danger la vie d’autrui, et aussi notre vie économique et sociale.
Iriez-vous jusqu’à rendre la vaccination obligatoire ?
Non. Il faut déjà attendre les résultats des études cliniques, et il faut que le vaccin soit validé par l’Agence nationale du médicament et l’Agence européenne. Mais sur le principe, je ne suis pas favorable à une vaccination obligatoire, parce que je reste un libéral.