La montée des tensions entre Pékin et Washington est la conséquence d’une redistribution des cartes de la puissance. Dans ce grand échiquier, le conseiller commercial du président américain Robert Lighthizer défend un néoprotectionnisme de choc. Quitte à durcir le bras de fer avec la Chine.
Un ignorant, un rustre et un gougnafier. L’actuel président des États-Unis est régulièrement présenté par les médias bien-pensants (presque une tautologie) comme si ces épithètes lui convenaient parfaitement. En matière de politique commerciale, son approche musclée choque beaucoup les délicates sensibilités des thuriféraires du libre-échange. Un éditorial récent du très respectable Financial Times nous informe que M. Trump, par son mépris du multilatéralisme, représente vraisemblablement une plus grande menace pour la cohésion de l’Occident libéral que Vladimir Poutine. Au mois de juin, sur sa une, The Economist, la très sérieuse revue britannique, l’a caricaturé sous la forme d’une énorme bombe étiquetée « tarifs », accompagnée de la légende : « Armes de disruption massive. » N’en déplaise à tous ceux qui dépeignent M. Trump en enfant gâté et capricieux, celui-ci parle au nom d’un courant de la pensée américaine qui voit dans le protectionnisme économique un outil légitime dans la conduite d’une politique commerciale. En outre, le président a eu la sagesse de nommer au poste de représentant américain au Commerce (US Trade Representative), l’un des hommes les plus brillants et expérimentés de ce courant, un homme qui se croit investi d’une véritable mission dans la vie : redresser les torts du commerce mondial.
Des arguments en acier
L’État de l’Ohio, dans le nord-est des États-Unis, fait partie de ce que l’on appelle la « ceinture de rouille » (Rust Belt), autrefois le cœur de l’industrie lourde du pays, aujourd’hui en déclin comparatif. Jusque dans les années 1970, on l’appelait la « ceinture de l’acier », la production de ce métal étant au cœur de son activité. C’est là, dans la ville portuaire d’Ashtabula, en 1947, que naît Robert Lighthizer, un fils de médecin, qui partira pour étudier le droit à Washington. Il passera toute sa carrière dans la capitale, mais sans couper les liens qui l’attachent à sa région natale. D’abord simple avocat, il rejoint le monde politique en 1978, travaillant pour le sénateur républicain Bob Dole. Avec l’élection de Reagan, Lighthizer devient en 1983 adjoint au représentant américain au Commerce, ce qui lui donne l’opportunité de négocier plus de 24 accords bilatéraux. Après deux ans, il devient associé
