On vient d’apprendre qu’au bord du dépôt de bilan, le quotidien Libération venait d’être sauvé par l’entrée à son capital et un apport en numéraire conséquent d’un nouvel actionnaire de référence, Patrick Drahi, bien connu pour avoir emporté le jackpot du rachat de SFR au grand dam de Bouygues, devenant ainsi un des acteurs majeurs de la téléphonie mobile en France, aux côtés d’Orange et de Free. Dans la grande négociation qui a écarté Bouygues et Free (id est Xavier Niel, copropriétaire du Monde et du Nouvel Obs) du deal, l’Etat français, en la personne du ministre du redressement productif, avait fait valoir qu’il serait mieux que Drahi, juif marocain richissime résidant en Suisse et passant une partie de sa vie en Israël, fasse quelques efforts pour manifester quelque intérêt pour la défense d’entreprises françaises en difficulté.
Qu’à cela ne tienne ! Drahi dont la fortune se compte en milliards, va mettre quelques dizaines de millions d’euros pour sauver, provisoirement, un quotidien de gauche de la déconfiture, prix à payer pour que Bercy ne mette pas de bâtons dans les roues de son opération capitalistique. Drahi, à notre connaissance, n’a pas avec la gauche française les relations affectives d’un Pierre Bergé ou d’un Matthieu Pigasse. Son seul investissement (sans espoir de rentabilité) idéologique a été d’offrir à Israël une chaîne d’information continue multilingue (I24news), défendant avec talent le point de vue de l’Etat hébreu sur les affaires du monde.
Si j’étais journaliste à Libé – ce qui me rajeunirait considérablement – je lécherais chaque jour les bottes d’Arnaud Montebourg pour avoir assuré mon salaire pour quelques mois supplémentaires, et tâcherais de ne pas trop chier dans les bottes d’un Drahi peu réceptif au discours palestinolâtre du journal qu’il vient d’acquérir. Joffrin, nouveau patron de la rédaction, saura montrer la voie.
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