Avec L’Express de Bénarès. A la recherche de Henry J.-M. Levet (1874-1906), l’académicien Frédéric Vitoux ressuscite un poète oublié qui l’obsède depuis l’adolescence. L’importance de son oeuvre, réunie en un seul petit recueil, est inversement proportionnelle à sa longueur.
Il arrive, parfois, que les poèmes survivent aux poètes, qu’une poignée de vers par ici, quelques quatrains par là, hantent les mémoires alors qu’on a oublié le nom de l’auteur. C’est sur l’un de ces envoûtements étranges et soyeux qu’a voulu enquêter Frédéric Vitoux dans L’Express de Bénarès, un récit où s’entrelacent dans une élégante nostalgie des souvenirs autobiographiques et la vie de Henry J.-M. Levet (1874-1906), dont l’histoire littéraire et les aléas de la postérité ont surtout conservé les quatre premiers vers du sonnet « Outwards » :
« L’Armand-Béhic (des Messageries Maritimes)
File quatorze nœuds sur l’océan Indien.
Le soleil se couche en des confitures de crimes,
Dans cette mer plate comme avec la main. »
Ce serait une erreur de croire que ce genre de fascination pour les poètes qu’il est convenu d’appeler « mineurs » relève du simple snobisme ou d’une érudition légèrement déviante. Y a-t-il, d’ailleurs, des poètes mineurs ? Ne nomme-t-on pas ainsi par commodité des poètes moins chanceux avec le succès ?
« Je l’ai découvert à l’âge de seize ou dix-sept ans. Il ne m’a jamais quitté. »
Aussi mince soit-elle, l’œuvre de Levet a exercé une influence décisive sur ceux qu’on classerait plus tard dans la catégorie
