Notre estimé et futé confrère de Marianne2 Philippe Cohen a réussi un joli coup en se procurant une lettre adressée par Marine Le Pen à l’ensemble du corps préfectoral.
Elle est intéressante à plus d’un titre. Outre le fait qu’elle porte à l’évidence la marque d’un haut fonctionnaire fin connaisseur des arcanes de l’appareil d’Etat, elle constitue une pièce rhétorique intéressante quant à la volonté affichée par la « peste blonde » de faire prévaloir une terminologie nouvelle en parlant, par exemple, de « politique publique durable, efficace et juste ». L’affaiblissement de l’action publique est stigmatisé parce qu’elle « renforce chez un nombre croissant de concitoyens le sentiment d’injustice, voire d’abandon ». On croirait relire du Chevènement 2002 !
Pas un mot sur l’immigration au risque de faire passer l’actuel hôte de la Place Beauvau pour un ronchon archéo. La révision générale des politiques publiques est également critiquée car « se traduisant par une réduction irresponsable des capacités d’action et de réaction de l’Etat. » Comme disent les énarques, tous les ingrédients d’un diagnostic partagé sont clairement hiérarchisés. Un serviteur de l’Etat attaché à l’intérêt général souscrira assez naturellement.
Rédigée avec l’élégance sobre d’un haut fonctionnaire amoureux de la langue, cette missive mariniste a tout de la circulaire « haut de gamme », histoire de montrer que les questions de l’Etat et de la conquête du pouvoir appartiennent désormais au nouveau code génétique du FN.
Mais l’entourage de Marine n’est-il pas, une fois de plus, culturellement un peu trop en avance sur le gros des troupes frontistes ?
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