Le leader de l’extrême gauche française prédit la chute très rapide de François Bayrou et annonce qu’il est actuellement à la recherche des 500 parrainages pour l’élection présidentielle. « Ça se finira entre le RN et nous », prévoit-il avec gourmandise.
Traditionnellement, en cette période de l’année, les voyantes astiquent leur boule de cristal et livrent au public leurs prédictions pour les douze mois à venir. Ce samedi 21 décembre, répondant à une interview du journal Le Parisien, c’est M. Mélenchon qui s’adonne à cet exercice. Il prédit, il vaticine, apportant à cet art un souci d’exactitude que les pythies les plus en vue ne peuvent que lui envier. « Bayrou ne passera pas l’hiver », assène-t-il, sûr de lui. Certes, il n’est pas le seul à le penser, mais ce en quoi il se distingue est la précision de l’annonce. Qu’on en juge ! Selon lui, le gouvernement Bayrou tombera très exactement le 16 janvier, quarante-huit heures après son discours de politique générale devant l’Assemblée nationale. La cause ? Le recours au 49-3 pour le vote du budget que prédit aussi le visionnaire, assorti de la motion de censure qui s’ensuivra mécaniquement et dont il se targue de savoir à l’avance qu’elle sera effectivement votée, la gauche faisant le plein notamment avec l’apport des égarés dont notre devin se fait fort d’annoncer « le retour au bercail », autrement dit dans les rangs disciplinés de la gauche sous influence. À moins, envisage-t-il aussi, que le couperet ne tombe avant cela lors du vote de confiance que lui et ses amis auront exigé d’emblée…
M. Mélenchon prophétise aussi la fin anticipée du long séjour élyséen de M. Macron. Non seulement, il le voit venir, mais il le prépare. Lorsque le journaliste lui demande s’il sera candidat à une présidentielle anticipée en 2025, la réponse fuse : « Une candidature insoumise sera proposée comme candidature commune à ceux qui le voudront, livre-t-il. Notre équipe nationale proposera un nom aux parlementaires Insoumis qui trancheront. » Le programme sera prêt en janvier. « Nous sommes unis, prêts à gouverner, solides ». On n’en saura pas davantage, l’interviewé n’allant pas jusqu’à prédire le nom qui pourrait sortir du chapeau. Suspense insoutenable. Nous autres avons bien une petite idée. Et M. Mélenchon aussi, probablement.
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Le journaliste fait alors observer que ce projet de candidature exclusivement insoumis pose la question de savoir si le NFP (Nouveau Front populaire) existe encore. Là, surgit une réplique des plus imagées : « La preuve du pudding, c’est qu’on le mange. » Cela signifierait-il que la meilleure preuve de l’existence du NFP serait que, à terme, comme le pudding, il devrait se faire dévorer ? Même dans le cadre d’une interview de presse, il arrive que l’inconscient parle tout haut. En fait, le leader de LFI se persuade que la discipline qui a prévalu pour la précédente motion de censure contre le gouvernement Barnier rejouera à l’identique le moment venu. « On votera la censure ensemble ! » annonce-t-il sans le moindre doute. Il ne croit pas en effet un seul instant à ce que raconte François Hollande, à savoir que les socialistes auraient repris leur liberté. Là, on devine le haussement d’épaules. « Être appelé à l’humilité par des gens qui ont fait 1,75% à la présidentielle, c’est toujours cocasse. » Et d’ajouter : « Le PS fait un très mauvais choix avec Hollande. » À propos de choix discutables, la question de savoir si celui de la ligne politique qu’il observe depuis les attentats du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 ne serait pas de ceux-là, il répond non, catégoriquement. « D’autres ont affiché un désaccord avec nous et se sont aveuglés devant le génocide. Notre politique ne sera jamais opportuniste (…) Nous tournerions le dos à ceux que nous voulons représenter. Pour nous, avoir gagné l’estime de la classe ouvrière, l’affection des quartiers populaires, le soutien majoritaire des jeunes, celui d’intellectuels critiques, est notre raison d’être. » Puis, un peu plus loin, vient ce moment de lamentation qui fait monter la larme à l’œil : « Notre diabolisation nous met en danger physique mais elle nous gagne le respect de ceux qui ne supportent plus ce système. On serre les dents et on avance (…) Je suis de loin le premier à gauche, et les autres passent leur temps à me taper dessus. » La larme écrasée sur la joue, nous compatissons. Mais nous voici de retour dans le registre de la prédiction : « Ça se finira entre le RN et nous ! » Le RN qu’il compte battre « en faisant campagne ». On l’a battu comme ça aux législatives, justifie-t-il… Sans aucun doute, le Lider Maximo LFI voit-il donc se profiler une nouvelle fois, au second tour, le ralliement mercenaire et contre-nature, contre décence, contre honneur, des Attal, Bertrand, Philippe et comparses? Bien évidemment, le mage extralucide berce cette espérance. Il compte manifestement sur un remake du barrage républicain qui a si bien fonctionné en juin. Car lorsqu’on lui objecte que les sondages le placent loin derrière Marine Le Pen, il y va d’un nouvel haussement d’épaules : « Et alors, ils se trompent tout le temps. C’est donc bon signe ! » D’ailleurs, il s’y voit tellement à l’Élysée que la quête aux cinq cents parrainages, condition indispensable pour pouvoir être candidat, est d’ores et déjà sur les rails. M. Mélenchon en parle comme d’une simple formalité. À voir. Il s’agit de trouver cinq cents personnalités élues représentant au moins trente départements ou collectivités d’outre-mer (sans dépasser un dixième, soit 50 pour un même département), chacune ne disposant que d’un seul parrainage et celui-ci, détail qui a son importance, étant rendu public. Aussi, une petite question se profile quand même : sera-ce si aisé de trouver cette fois cinq cents notables que les outrances, les options post massacres du Hamas, les ambiguïtés autour de l’antisémitisme du candidat Mélenchon n’auront pas refroidis ? Il ne semble pas que l’intéressé, tellement sûr de son fait, ait cherché la réponse dans sa boule de cristal. On ne saurait penser à tout.
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