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Les « Naufragés du Wager » et la fin du délire attalamaniaque

Coup de rouge, la chronique d’Olivier Dartigolles


Les « Naufragés du Wager » et la fin du délire attalamaniaque
Assemblée nationale, 16 janvier 2024 © Michel Euler/AP/SIPA

Habitué aux joutes médiatiques, hier comme dirigeant communiste, aujourd’hui comme chroniqueur politique, Olivier a des tripes et du cœur quand il s’agit de défendre ses idées. «J’aime qu’on me contredise!» pourrait être sa devise.


Rien n’y fait. Quand ça ne veut pas… Malgré des efforts soutenus pour atteindre l’excellence, comme on dirait à « Stan », en dépit de solutions égrainées avec l’entrain d’un serveur téléphonique : « Pour avoir des gestionnaires, tapez 1 ; pour des révolutionnaires, tapez 2 », nonobstant la promesse de « réarmement » et de « régénération », l’imaginaire politique d’Emmanuel Macron reste en cale sèche. Le libraire de mon quartier a très certainement perçu ma quête d’épopée quand il m’a conseillé de me plonger dans Les Naufragés du Wager, de David Grann (LeSous-Sol, 2023). Je n’aime rien autant que ces œuvres où le talent de l’écrivain vient harponner le réel. Le va-et-vient entre ce récit et la récente actualité politique fut tout simplement délicieux.

L’autre séparatisme

Imaginez, le vaisseau de ligne de Sa Majesté envoyé au sein d’une escouade sous le commandement du jeune officier Attal, avec un cap clair et un esprit conquérant. J’ai vécu pendant quelques jours l’emballement médiatique autour de la nomination du « plus jeune Premier ministre » comme celle du commodore Anson sur son navire. Comme frappées par une fièvre soudaine, les rédactions ont été victimes d’un délire attalamaniaque, qui, finalement, n’a pas duré une semaine.

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L’expédition, avant de passer le cap Horn des élections européennes, a connu sa première grosse vague avec Amélie Oudéa-Castéra. Je l’apprécie pour sa capacité à dire très clairement l’entre-soi bourgeois, le séparatisme des très hauts revenus. Mais déjà apparaissent à l’horizon les quarantièmes rugissants avec la colère des agriculteurs ; travailleurs de la terre et de la misère. Elle dit beaucoup de l’époque. Quand le travail ne paie pas. Quand le grand désordre libéral, illustré par les traités iniques de libre-échange, va jusqu’à atteindre votre propre dignité, le sens de votre vie.

Pour éviter les cinquantièmes hurlants et les soixantièmes déferlants, Sa Majesté et le jeune commodore Attal regardent la carte de la région. Île de la Désolation. Port de la Famine. Golfe des Peines. Rochers de la Tromperie. Baie de la Séparation des amis. Restent pour eux quelques raisons de ne pas totalement désespérer de la situation. L’équipage du Wager, avant de faire naufrage, a été fortement diminué par le scorbut. Notre système de santé connaît quelques difficultés, mais il devrait pouvoir y faire face. Après avoir échoué sur une île vierge au large de la Patagonie, les survivants s’organisent mais des mutineries éclatent. Je n’évoquerai pas ici les scènes de cannibalisme car, vraiment, nous y échapperons à coup sûr.

Rendez-vous sur l’autre rive

David Grann est un maître du récit. Plus encore, il interroge superbement sur le sens des récits. Face aux crises françaises, nombreuses et complexes, les alternatives et les possibles sont immenses à condition de les rendre désirables. Quand la politique n’est plus une espérance exagérée, elle se réduit à un tableur Excel déshumanisé.

Je vais maintenant lire le dernier Tesson. Ma sensibilité politique n’a jamais cadenassé mes goûts littéraires. Je préfère la compagnie d’un très bon livre d’un auteur de l’autre rive à une soirée avec des poètes « progressistes » qui sont déjà cuits avant même d’être maudits. Quand Ferré chantait « Thank You Satan », cela avait une autre gueule. « Pour le péché que tu fais naître /Au sein des plus raides vertus ».

Les Naufragés du Wager

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Février 2024 – Causeur #120

Article extrait du Magazine Causeur




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Olivier Dartigolles est chroniqueur politique. Il intervient sur Cnews, Sud Radio et La Terre.

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