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Les entrepreneurs montrés de l’index… senior!

Par Sophie de Menthon, présidente du mouvement patronal Ethic


Les entrepreneurs montrés de l’index… senior!
Manifestation contre la réforme des retraites, Paris, 19 janvier 2023. © OLIVIER CHASSIGNOLE/AFP

Réforme des retraites. Dans les seules nouvelles propositions vraiment concrètes évoquées par la Première ministre, Elisabeth Borne, on trouve le projet de « sanctions » des entreprises ayant de « mauvaises pratiques » dans l’emploi des séniors (une taxation supplémentaire !). Sans compter – si l’on peut dire – les ruptures conventionnelles, que le gouvernement entend également taxer davantage.


Dernière minute ! Coup de théâtre, hier soir, à l’Assemblée nationale. Les députés ont rejeté l’article créant un « index seniors » dans les entreprises par 256 votes contre 203. Cet index visait à inscrire le nombre d’employés seniors, et les actions de l’entreprise mises en œuvre pour favoriser leur emploi…

Le gouvernement, continuant dans le régime amendes et contraintes supplémentaires, se met peu à peu à dos tous les entrepreneurs de France. Même si nous n’avons pas franchement la mentalité manif’ et encore moins grève, est-ce bien le moment ? On peut comprendre la finalité, mais la politique de la taxe et de la pénalité rend les entreprises véritablement hostiles à ces pickpockets surentraînés ! Le gouvernement veut absolument innover, pour calmer la colère qui gronde. Pour cela, quoi de mieux que de rétablir une pseudo injustice, en s’attaquant aux entreprises ? À qui d’autre s’attaquer, d’ailleurs ? On nous demande déjà d’augmenter nos salariés mais aussi de les rendre actionnaires de nos entreprises, le tout en travaillant moins…

Au moment où l’Assemblée nationale se bat sur des sujets importants mais hélas avec des objectifs exclusivement politiques, que ce soit sur le partage de la valeur ou des retraites, les entrepreneurs qui ont des propositions, ne sont écoutés que d’une oreille et seulement par quelques parlementaires motivés. Personne en revanche ne se pose plus vraiment la question des régimes spéciaux. Pourquoi donc part-on à la retraite à 56,81 ans (très précisément !) à la RATP ?

Les propositions alternatives de Sophie de Menthon

Il est donc important de redonner concrètement des pistes, sur la façon de garder le plus longtemps possible les seniors dans l’entreprise. C’est une préoccupation des patrons, qui fait l’objet de recherches appliquées, en particulier au sein du mouvement ETHIC.

Voici des mesures efficaces et pragmatiques :

  • Supprimer inévitablement le principe des pré-retraites à Pole Emploi, tentation vertigineuse aussi bien pour les employeurs que pour les salariés (« puisqu’on y a droit ! »).
  • Mettre au point des formations flash, pour le secteur tertiaire en particulier, sur la maîtrise du digital (c’est prioritaire !).
  • Accepter le principe de mi-temps dégressifs sur deux ou trois ans, et sur mesure, en accord avec les entreprises et les salariés avec formation tandem interne des juniors, par exemple.
  • Aménager des formations complémentaires, incluses dans les emplois du temps (informatique, réseaux sociaux, formation des seniors sur la digitalisation…), dès 40 ans.
  • Travailler sur la question du salaire plus élevé des seniors, dont une partie pourrait être compensée par une baisse de cotisations.
  • Vraiment prendre en compte la pénibilité des emplois, et prévoir une deuxième carrière pour les seniors, dès l’apprentissage, pour les métiers les plus physiques. Rien ne sert de le dire si ce n’est pas immédiatement intégré dans les cursus d’apprentissage !
  • Créer un CDD de cinq ans, renouvelable, réservé aux seniors à partir de 58 ans avec charges allégées, pour inciter à leur recrutement. Il faut savoir, toutefois, que plus l’âge de la retraite est reculé, plus on recrute des salariés plus âgés (cela se vérifie dans tous les pays d’Europe).
  • Dans un autre ordre d’idées, il faut veiller à alléger le contexte général de l’emploi. Ainsi, lorsqu’un salarié a eu un accident dans sa carrière, le report de l’inaptitude sur le dernier employeur est injuste : la dernière entreprise n’a pas à subir seule financièrement la prise en charge de toute une vie d’un travailleur malade ou fragile…

Le travail c’est la santé !

Et puis, il faut redonner le goût du travail avec un discours politique et un discours entrepreneurial dès l’école. Or le glissement vers le confort, la paresse, le temps libre, la redondance de l’accusation de « pénibilité » (pour un peu c’est le retour à Zola) devient une intoxication nationale. Que dire devant des assertions telles que « il ne faut pas perdre sa vie à la gagner ! ». Comme le dit Luc Ferry : « La disparition de la foi religieuse fait que le paradis qu’on gagnait dans l’au-delà se trouve désormais dans la promesse d’une retraite miraculeuse ! »

Enfin, laissez travailler plus longtemps ceux qui le veulent ! Question de bon sens qui ne doit pas être très difficile à appliquer. À l’hôpital, nos meilleurs médecins, à la longue expérience, n’ont pas le droit de continuer à exercer ! Un philosophe de 72 ans ne peut pas non plus donner un cours à la Sorbonne, alors qu’il en donne à travers toute la France dans le privé, moyennant finances… Le comble c’est de vouloir faire travailler les gens plus longtemps et « en même temps » de l’interdire à ceux qui veulent de le faire.

Un désert d’objectivité et de bonne volonté…

Il faut aussi arrêter à tout prix de désigner les entrepreneurs qui réussissent, en têtes de turcs de tous ceux qui n’ont pas un pouvoir d’achat suffisant. Il semble que tout raisonnement sain soit écarté au profit de querelles idéologiques dont l’entreprise est hélas le cœur.

Le spectacle de l’Assemblée nationale est navrant, et devient le socle d’une forme de décadence de notre pays. Des vociférations, des huées, des contradictions, des guéguerres !

Un exemple désastreux pour les citoyens que nous sommes tous, et évidemment pour beaucoup de salariés qui font en réalité grève contre ceux qu’ils ont élus plutôt que contre une réforme qu’ils ne comprennent pas de toute façon.

Le redressement de la France passe par l’entreprise, c’est sa colonne vertébrale, quelle que soit sa taille ou son secteur d’activités. Va-t-on enfin le comprendre ? Il est presque trop tard…



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