Les 27 chefs d’Etat et de gouvernement réunis à Bruxelles ont échangé, le 24 juin, sur la loi hongroise qui interdit notamment « la promotion de l’homosexualité auprès des mineurs ».
Le Premier ministre hongrois Viktor Orban a été la cible exclusive de ses collègues à l’exception du Premier ministre slovène qui a pris son parti et du Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki qui a rappelé que la Hongrie comme la Pologne « avait subi le communisme et l’oppression soviétique », mais en assurant que « les mentalités évoluent ». Le Premier ministre luxembourgeois, homosexuel, a semoncé Viktor Orban: « L’homosexualité, ce n’est pas un choix, tu nais comme cela » et avant le sommet le même avait dénoncé la confusion entre « pédophilie, pornographie et homosexualité ». Le Premier ministre belge n’a pas été en reste en déclarant : « Être homosexuel n’est pas un choix, être homophobe l’est ». Le Premier ministre néerlandais furieux a averti Viktor Orban qu’il pouvait activer l’article 50 du traité pour sortir de l’Union européenne. En quelque sorte, bon débarras.
Nous n’avons pas les mêmes valeurs…
Comment notre président aurait-il pu se tenir à l’écart d’un tel concert correspondant si bien aux valeurs dont il s’est fait le chantre, avec un zeste de condescendance et un peu de mépris pour ces pays d’Europe, « avec la montée, chez eux, de l’illibéralisme et d’un conservatisme anti-libéral ». On comprend bien que pour Emmanuel Macron il y a là deux plaies qu’il convient de pourfendre sans cesse puisque la question des valeurs pour l’Europe est « existentielle, principielle ». Qui oserait, avec mauvais esprit, souligner que si le président s’indigne à Bruxelles, en France en revanche les agressions contre les homosexuels se multiplient et trouvent trop rarement une juste répression ? Je n’aurais pas le courage intellectuel d’une Chantal Delsol qui, réfléchissant sur les raisons d’un antagonisme, s’interroge ainsi: « Comment comprendre qu’une communauté de liberté qui s’était étendue dans la joie après la chute du communisme, en soit venue à imposer si radicalement une seule vision éthique » ?
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Il serait inconcevable de contester le fond de ce qui a été vigoureusement asséné à Viktor Orban même si on peut discuter qu’au nom de l’Europe on ait par principe le droit de s’immiscer dans les législations internes pour dénier à l’une – toujours la même – la liberté de considérer l’homosexualité autrement et, plus globalement, d’être attachée à une autre vision de la famille et de la société. Mais la manière avec laquelle on traite Orban est choquante, comme un enfant pris en faute, à mettre au coin, face à des maîtres tellement sûrs d’eux et, paraît-il, éthiquement et collectivement impeccables…
Des valeurs europénnes ou celles de l’idéologie diversitaire?
Ce Conseil européen qui choisit ses valeurs, en privilégie certaines tenant à un humanisme abstrait et en écarte d’autres qui seraient reliées à la sauvegarde des nations – Eric Zemmour a affirmé récemment que l’UE défendait l’idéologie diversitaire plus que les valeurs européennes – est-il vraiment fondé à user de cette forme à l’égard d’un pays et d’un Premier ministre qui n’ont pas plus à rougir que d’autres de leur histoire après de terrifiantes années de glaciation ?
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Je n’aime pas le ton du Conseil européen à l’encontre de nations qui ne sont pas malfaisantes parce qu’elles ne partagent pas notre détestation pour le « conservatisme antilibéral ». Si les valeurs qui seraient si remarquables que l’Europe éclairée les partagerait obligatoirement doivent être ainsi jetées à la face de nations souveraines tels des diktats, on peut douter du futur.
Et craindre qu’un jour les progressistes autoproclamés se retrouvent entre eux après avoir chassé de leur cercle, par mépris et arrogance, les indignes décrétés tels ! Le Conseil européen, machine de guerre plus que d’apaisement et de compréhension ?
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