Le Travailleur théorisé par tant d’écrivains et de philosophes au XXe siècle est aujourd’hui anachronique. S’il existe toujours des millions de travailleurs, aucune Figure n’incarne désormais le dynamisme collectif et le productivisme. Il est vrai qu’une société ayant pour seul horizon les loisirs et la consommation n’en a guère besoin.
Une réforme des retraites équitable, qui tiendrait compte de la pénibilité de certains métiers, parviendrait-elle à faire oublier les inégalités dans la manière dont les travailleurs considèrent aujourd’hui leur activité selon qu’elle leur permet tout juste de gagner leur vie ou de donner sens à leur existence ? Alors que tous les métiers n’offrent pas à cet égard les mêmes possibilités, l’évolution des conditions de travail et des mentalités tend à vider la notion même de « travail » de ses contenus anciens. Corvée pour les uns, labeur gratifiant pour d’autres, le travail a peu à peu cessé d’être la « valeur » au nom de laquelle les individus étaient jusqu’alors appelés à se sacrifier, ou au moins à se dépasser. Si la libération par le travail n’a pas disparu, elle a changé de forme et l’on tend aujourd’hui à considérer qu’un effort individuel ou collectif qui ne pourrait être rapidement monnayé en RTT, en consommation et en loisirs ne mérite plus d’être consenti. Gagner sa vie, il le faut bien afin de pourvoir à ses besoins, mais de plus en plus nombreux sont les travailleurs convaincus que la « vraie vie » est ailleurs.
Rapport privilégié à la matière
C’est aussi pour cette
