Nous savions déjà que les néoféministes préféraient les femmes qui jettent des sorts aux hommes qui construisent des EPR. Dernièrement, nous avons découvert que ces bonnes fées souhaitent désormais réallouer le budget octroyé au SNU à la lutte contre les « féminicides »…
Je ne saurais dire si le SNU (Service National Universel) est une bonne ou une mauvaise chose ; en revanche, je puis affirmer que cela n’a rien à voir avec le service militaire obligatoire d’antan, au contraire de ce que semble penser la militante féministe Anne-Cécile Mailfert.
Durant ce SNU de 12 jours, nos adolescents doivent porter un vêtement uniforme, hisser le drapeau tricolore et chanter la marseillaise, se désole la présidente de la Fondation des femmes lors de sa chronique hebdomadaire sur France Inter le 31 mars dernier. Elle y voit, dit-elle, une résurgence des « cultures patriarcales et militaristes » vouant « un culte aux mêmes contre-valeurs : la hiérarchie, la violence, l’obéissance, l’uniformité, l’autoritarisme et le virilisme ». Ce gauchisme anti-militariste et soixante-huitard libertaire à la petite semaine saupoudré de quelques notions wokes dans l’air du temps est aussi affligeant que les réactions des représentants du syndicat La voix lycéenne et de l’Unef qui considèrent que le SNU ne favorise pas suffisamment « l’engagement associatif, politique ou syndical (1)». Ces jeunes gens confondent apparemment un service national (militaire, universel, républicain, appelez-le comme vous voulez) qui, même mal fagoté, est normalement destiné à renforcer la cohésion sociale en confortant certaines valeurs communes (nationales, patriotiques, républicaines, etc.) et un service de recrutement à destination des syndicats, des associations et des mouvements gauchistes. La présidente de la Fondation des femmes abonde d’ailleurs dans leur sens pour ce qui est des associations.
Deux milliards d’euros que récupérerait bien Caroline de Haas…
Anne-Cécile Mailfert évoque soudainement « le corps des femmes [qui] sont des champs de bataille quand les hommes ne parlent pas de nous en conquêtes ». Quel est le rapport avec le SNU ? Nous comprendrons un peu plus tard que l’évocation étrange de cet hypothétique champ de ruines corporelles n’a servi qu’à justifier la question de savoir à quoi pourrait bien être employé un des deux milliards d’euros prévus pour le SNU obligatoire, si celui-ci venait à être abandonné sous la pression de cette jeunesse si joyeusement anti-militariste, anti-nationaliste, anti-patriotique et, bien entendu, féministe. « Il suffirait d’un petit milliard pour avoir les moyens d’une vraie politique de lutte contre les féminicides », assure Mme Mailfert. Ce montant magique, il nous semble bien l’avoir déjà entendu quelque part. Mais oui, mais c’est bien sûr : ce milliard, c’est celui que Caroline De Haas réclame à cor et à cri depuis des années, en tout cas depuis qu’elle a créé sa petite entreprise de « conseil, de formation et de communication experte de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la lutte contre les discriminations, de la diversité et de la prévention des violences sexistes et sexuelles ». Caroline De Haas a en effet co-fondé Egae, entreprise à but lucratif et aux méthodes douteuses vivant essentiellement grâce aux contrats passés avec des entreprises ou des établissements publics. Cette entreprise qui se targue de « percuter l’illusion de l’égalité » a surtout bouleversé la vie de quelques hommes soumis à des enquêtes malsaines et très orientées, au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris ou à Télérama, par exemple. Résultat : des ambiances délétères, des procès moscovites, des soupçons ruinant les carrières d’un musicien et d’un journaliste, ce dernier, licencié abusivement, ayant toutefois obtenu que les Prud’hommes condamnent l’hebdomadaire télévisuel à lui verser 90 000 euros à titre de dédommagement. Avant cela, Caroline De Haas avait fondé l’association “Osez le féminisme !” dont… Anne-Cécile Mailfert a été la porte-parole puis la présidente. En 2016, cette dernière, décidément en proie aux idées fixes, a co-écrit le rapport « Où est l’argent pour les droits des femmes ? » En 2019, elle expliquait sans rire au magazine 50/50 : « Une des raisons pour lesquelles ce secteur est sous financé […] c’est le problème du rapport des femmes à l’argent. Les femmes sont dans le soin de l’autre, la générosité, l’altruisme, elles se “sacrifient” pour les autres. Et donc la recherche d’argent pour elles-mêmes, pour leurs projets, n’est pas prioritaire. Il y aussi cette image que les femmes qui cherchent de l’argent sont des femmes vénales. Je pense que c’est une imagination de la domination masculine pour nous empêcher d’aller sur ce terrain-là. » Toujours la même ennuyeuse ritournelle. Notons que pour des gens qui prétendent combattre les stéréotypes, ils n’en manquent pas en magasin. Résumons-nous : le patriarcat, la domination masculine, et tout ça et tout ça, sont la cause de tous les maux. De tous les maux ? De tous les maux ! Comme nous allons pouvoir le vérifier immédiatement.
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La pensée atomique de Jade Lindgaard
Quelques jours plus tard, en effet, Jade Lindgaard, journaliste au pôle écologie de Mediapart, était reçue par Mathieu Vidard dans l’émission écologiste pro-GIEC “La Terre au carré”, sur la radio publique abonnée à toutes les idéologies modernes, j’ai nommé France Inter. Pour mémoire, Jade Lindgaard se distingua en 2017, sur le plateau de l’émission C l’hebdo, en dénonçant l’islamophobie en France et le « système généralisé de racisme dans ce pays », et en expliquant que « l’islamisme, en tant que tel, n’est pas en soi une chose grave, c’est un phénomène qu’il faut comprendre et expliquer ». Cela situe le niveau de réflexion de la dame. Les féministes, explique notre brillante journaliste dans l’émission de Mathieu Vidard, ont été, dès les années 1970, à la pointe de la lutte contre le nucléaire. Passons rapidement sur la confusion entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire savamment entretenue par Mme Lindgaard, pour déboucher directement sur la pensée atomique suivante : « À l’époque, le nucléaire est considéré comme l’incarnation et la célébration du patriarcat. C’est une énergie brutale et hiérarchique, opaque, sur laquelle on n’a aucune prise, qui vous écrase, vous marche dessus, et ne vous laisse pas votre mot à dire. » Sic d’or pour l’ensemble de cette ahurissante allégation dont chaque terme est une bêtise. On est à peu près au niveau des réflexions de Dame Rousseau dénonçant « les relations entre colonialisme, capitalisme et patriarcat » (Par-delà l’androcène, Seuil, 2022) ;ou disant préférer « les femmes qui jettent des sorts plutôt que les hommes qui construisent des EPR » ; ou fustigeant les monstres patriarcaux et virilistes que sont les hommes s’occupant du barbecue ; ou réprimandant une Élisabeth Badinter qui, ayant critiqué ses « révélations » sur Julien Bayou, se voit accusée d’être « du côté de l’ordre tel qu’il est actuellement, qui est un ordre patriarcal » (le Grand entretien, France Inter, 3 octobre 2022).
Chose étrange : plus le patriarcat occidental a des allures de squelette, plus les néoféministes s’acharnent à briser ses inoffensifs osselets – il en est pourtant un autre, plus rudimentaire, plus brutal, plus oriental, plus patriarcalement patriarcal, pourrait-on dire, qui remporte en ce moment un beau succès dans notre pays pourtant historiquement peu enclin à ce genre de « domination », quoi qu’en disent certaines féministes. Mais visiblement, ce patriarcat-là n’intéresse pas beaucoup nos militantes qui préfèrent continuer de vilipender un fantôme, quitte à dire n’importe quoi – ainsi, Dame Rousseau qui, défendant le port du voile sous nos latitudes, pense qu’il y a « plein de motivations pour porter le voile » et que, de toute manière, « à chaque fois qu’on parle du corps des femmes, à chaque fois qu’on parle de la manière dont on doit l’habiller, on sert le patriarcat » (LCP, 4 novembre 2021). Le patriarcat, le patriarcat, vous dis-je.
[1] Propos relevés dans Politis, 27 février 2023.
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