Accueil Politique Le Parti socialiste peut-il encore s’émanciper de La France insoumise?

Le Parti socialiste peut-il encore s’émanciper de La France insoumise?

Les socialistes négocient avec Bayrou pour tenter de trouver un budget de compromis, Jean-Luc Mélenchon dénonce une « forfaiture »


Le Parti socialiste peut-il encore s’émanciper de La France insoumise?
Les socialistes reçus à Bercy par le ministre Eric Lombard, 6 janvier 2025 © ROMUALD MEIGNEUX/SIPA

Consulté par l’exécutif dans la perspective d’un accord de non-censure, le PS semble s’extirper du bloc du NFP. L’ancien parti de gouvernement, néanmoins, a directement contribué au désordre politique que la France subit. Analyse.


Depuis la dissolution de juin 2024, les formations de gauche se montrent expressives quant à leur mécontentement s’agissant des rapports entre l’exécutif et le Rassemblement national. Ce dernier est parvenu à devenir une forme de parti pivot, car parmi les trois blocs qui se sont imposés dans la représentation nationale, il est le seul à ne pas se faire intransigeant dans ses relations avec les gouvernements successifs. En effet, là où le bloc du centre soutient sans difficulté particulière les positions du chef de l’État et le NFP revendique son anti-macronisme atavique, le RN est l’unique acteur à accepter, de manière positive ou négative, de modifier son attitude à l’égard de l’exécutif selon les propositions législatives qui lui sont soumises.

Mélenchon furieux

Ainsi, le gouvernement Barnier était parti de cet état de fait pour concentrer l’essentiel des tractations effectuées en dehors de sa base parlementaire avec le groupe dirigé par Marine Le Pen. François Bayrou, lui, a souhaité changer de stratégie en essayant de redéfinir les équilibres qui prévalent à l’Assemblée nationale. Son pari : s’il parvenait à extraire les Socialistes du bloc que constitue le Nouveau Front populaire, le paysage parlementaire serait suffisamment morcelé pour retirer au RN son monopole au poste de faiseur de rois. À quelques jours de son discours de politique générale, il a donc organisé des rencontres avec le Parti socialiste afin de trouver les bases d’un accord de « non-censure ».

A lire aussi, Joseph Macé-Scaron: Bayrou, le petit chose

Force est de constater que, pour la première fois en près d’un an, les dissensions internes au NFP ont été exposées dans le débat public avec virulence. Invité de Public Sénat mercredi, le député PS de l’Essonne Jérôme Guedj se félicitait par exemple des victoires politiques arrachées à Bayrou, jugeant ces conversations indispensables à la « stabilité » du pays. Pour autant, Jean-Luc Mélenchon a immédiatement signifié sur X (ex-Twitter) que le NFP était étranger à ce « plat de lentilles servi à O. Faure », tandis que d’autres élus ont rappelé dans divers médias l’intransigeance de la position de leur coalition.

Or cette soudaine exigence de stabilité politique exprimée par le PS étonne. En effet, la formation a directement contribué à la confiscation des logiques parlementaires au profit d’un régime des partis l’an dernier. Début décembre, les deux chambres avaient trouvé un accord pour présenter à leurs collègues une version amendée du projet de loi de finances de la Sécurité sociale pour 2025. Il s’agissait de la première fois en plus d’une décennie qu’une commission mixte paritaire sur pareil texte s’avérait conclusive ! En somme, ce n’est pas l’éventuelle paralysie de la logique parlementaire qui a conduit à la censure, mais l’intrusion en son sein de logiques d’appareil. Le PS, qui a rencontré nombre de difficultés électorales à l’échelle nationale ces dernières années, a dès lors trouvé opportun de terminer l’année 2024 comme il l’a débutée : en privilégiant ces logiques d’étiquettes à la mise en avant de mesures de politiques publiques qui lui étaient propres.

L’extrême gauche, c’était mieux avant !

Les commentateurs ont sévèrement jugé le Parti socialiste depuis la formation de la Nupes en 2022, lui reprochant d’avoir notamment renié ses convictions en matière de laïcité. Le PS, en réalité, ne souffre pas uniquement de la popularité électorale des Insoumis, mais aussi du fait que ces derniers ne sont pas authentiquement d’extrême gauche. Ils sont plus virulents dans leur rhétorique, c’est indéniable, et nombre de leurs propositions sont plus radicales que celles initialement défendues par Olivier Faure. Pour autant, l’absence totale de référence à l’infrastructure productive dans les discours mélenchonnistes, ainsi que les complaisances de LFI à l’égard de l’islam politique, ne correspondent en rien à un propos qui serait d’inspiration marxiste. En effet, la subvention de la consommation réclamée par le NFP et sa convergence avec les intérêts politiques d’acteurs religieux s’éloignent assurément de l’anticapitalisme au sens propre et de l’anticléricalisme viscéral de l’extrême gauche traditionnelle.

A lire aussi, Dominique Labarrière: La rentrée du numéro 10

Le PS souffre essentiellement de la quasi-disparition de son adversaire historique à gauche, à savoir le courant révolutionnaire. Aussi dérangeants que soient certains discours de LFI, en effet, le groupe dirigé par Mathilde Panot concurrence directement les Socialistes au sein de l’électorat de la gauche non communiste. En acceptant de négocier avec le gouvernement Bayrou, Olivier Faure n’entend en rien modifier sa ligne idéologique ou revenir sur les concessions de fond accordées à LFI. Il a simplement remarqué que la Ve République rendait les vociférations des tribuns électoralement inopérantes : le FN de Jean-Marie Le Pen et le PCF de la fin du XXe siècle nous l’enseignent.



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent France Inter, l’islamophilie courageuse
Article suivant Pourquoi Emmanuel Macron ne vous proposera pas un référendum sur l’immigration en 2025
Journaliste

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Pour laisser un commentaire sur un article, nous vous invitons à créer un compte Disqus ci-dessous (bouton S'identifier) ou à vous connecter avec votre compte existant.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération