Faites connaissance avec Magali Lafourcade, la présidente du Comité d’éthique du Monde qui se targue de moraliser les journalistes, mais dont deux des décisions récentes sont controversées.
Magali Lafourcade gagne à être connue. Avec ses fonctions (dont un scénariste de comédie n’aurait pu avoir l’idée) de secrétaire générale de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, de senior expert pour l’Agence européenne des droits fondamentaux et de directrice de la formation continue de lutte contre le racisme à l’École nationale de la magistrature, elle a manifestement décidé d’établir un nouveau standard dans le métier de professeur de morale. Depuis 2024, la jeune femme, que l’on entend parfois sur France Culture à l’heure de la messe le dimanche matin, préside le Comité d’éthique et de déontologie du journal Le Monde.
C’est donc très légitimement, à l’occasion des 80 ans du titre, qu’elle y a publié, le 19 décembre, un article pro domo, dans lequel elle se flatte de protéger les journalistes non seulement des pouvoirs extérieurs à la rédaction (y compris les actionnaires), mais aussi d’eux-mêmes, grâce à une implacable surveillance de leurs éventuels conflits d’intérêts. Mais la diseuse de vertu ne se hausse-t-elle pas un peu trop du col ? Deux jours avant la parution de son texte d’autopromotion, on a en effet appris, dans une magistrale enquête du Figaro consacré au tropisme palestinien (voire plus) du Monde, signée Eugénie Bastié, que le comité d’éthique de Mme Lafourcade avait pris deux décisions pour le moins aporétiques cette année. D’une part, il a estimé logique de demander à la rédactrice politique Ivanne Trippenbach de s’abstenir d’écrire sur l’actualité gouvernementale tant qu’elle serait la compagne d’un conseiller à Matignon. D’autre part, elle a considéré que le reporter Benjamin Barthe (bien connu de nos services), marié à une activiste pro-Hamas (qui a notamment applaudi le 7-Octobre), pouvait continuer de couvrir le conflit au Proche-Orient.
Un « deux poids, deux mesures » qui choque bon nombre de journalistes en interne et qui confirme une fois encore combien la formule ronflante « éthique et déontologie » peut être trompeuse, surtout quand elle est brandie avec componction par une orgueilleuse « spécialiste » de la question.