Selon un éditorial récent et lunaire du journal du soir, les idées vertes ne sont ni menacées par l’islamo-gauchisme d’une Marine Tondelier, ni par les excès écomisandres d’une Sandrine Rousseau, ni par des mouvements encore plus radicaux comme les Soulèvements de la terre. Non: le quotidien craint que les «idées vertes» de l’écologie autorisée ne soient «dérobées, détournées puis repeintes en brun».
Le Monde est très inquiet. Ce ne sont pas les dizaines d’agressions au couteau par jour ni les viols barbares comme celui qu’a subi cette jeune femme à Cherbourg qui l’inquiètent – d’ailleurs il n’évoque jamais (ou alors longtemps après) ce qu’il considère n’être que des « faits divers » sans importance. L’insécurité, la délinquance, les trafics, l’effrayante brutalité avec laquelle sont commis quotidiennement des vols, viols et agressions, le lien de plus en plus évident entre l’augmentation de ces crimes et l’immigration, n’intéressent pas Le Monde. Mais alors, quelle est la raison de cette inquiétude grandissante qui tétanise les journalistes du quotidien crépusculaire ?
Grosses ficelles
L’éditorial du 14 août dernier est intitulé “Écologie et extrême droite : un dangereux mélange”[1]. Parfaite illustration d’un journalisme qui, devenu militant, est prêt à toutes les outrances, ce papier se contente des anathèmes « contre l’extrême droite » qui font l’essentiel des arguments d’une gauche médiatico-politique qui ne parle plus qu’à elle-même et ne comprend pas, malgré sa présence presque monopolistique dans les instances médiatiques, que le « populisme » de droite gagne du terrain en France comme dans de nombreux pays européens souffrant des mêmes maux. Marine Le Pen ayant décidé de s’intéresser à l’écologie, Le Monde s’attaque au RN en usant des grosses ficelles habituelles: « Entre les mains des démagogues de l’extrême droite, l’idée universaliste et émancipatrice de la protection de la planète et des êtres vivants risque de se transformer en un vecteur de fausses théories, de nationalisme et de xénophobie. » Ce procès d’intention s’accompagne d’un panel des idées nauséabondes qui nourriraient les représentants du RN, entre autres celle d’un « parallèle entre la protection de la biodiversité et celle des “races” essentialisées » afin de « justifier leur défense du repli des peuples sur eux-mêmes et leur phobie du métissage ». Cette grossière argumentation ne distingue pas, pour les discuter, deux notions écologiques distinctes – pour le dire vite : celle combinant conservatisme et foi en l’ingéniosité humaine pour s’adapter à de nouvelles conditions de vie et celle, radicalisée, sentimentaliste et révolutionnaire, de l’écologisme anticapitaliste et « décroissant » – mais stigmatise uniquement la première en dénonçant une fantasmatique tentation écofasciste reposant, tenez-vous bien, sur… le « rejet des éoliennes » et une « défense de la voiture individuelle, des pavillons et de l’agriculture productiviste au nom de “l’enracinement” ». Bref, tout est bon, jusqu’à la bêtise, pour brunir un programme écologique opposé au programme officiel et qualifié de « greenwashing nationaliste » par les calotins de la religion écologiste guidés par les Saintes Écritures du GIEC…
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Fascisme pour fascisme, les journalistes du Monde auraient pu tout aussi bien souligner les possibles connexions entre l’écologisme contemporain – d’abord allemand (celui des redoutables Grünen), ensuite français et, dans tous les sens du terme, rousseauiste – et la loi sur la protection de la nature du Reich (Reichsnaturschutzgesetz) de 1935, loi qui renoue, écrit le philosophe Luc Ferry[2], « avec la vision romantique d’une histoire à trois temps (âge d’or, chute, restauration) » issue d’une écologie nazie qui opposa en son temps au « classicisme français, rationaliste, humaniste et artificialiste, la représentation allemande d’une nature originaire, sauvage, pure, vierge, authentique, car accessible aux “seules voies du sentiment” », et qui fut par conséquent « hostile à ce que nous appellerions aujourd’hui la “modernisation” économique ». Ces journalistes auraient ainsi pu déceler dans l’écologie sentimentaliste et irrationnelle des Verts l’espoir tout germanique du retour à une « authentique » et idyllique nature originelle, authenticité originaire dont la société, les sciences et les arts nous ont éloignés, pensait Rousseau (Jean-Jacques). Ainsi, Rousseau (Sandrine) dit préférer « les femmes qui jettent des sorts aux ingénieurs qui construisent des EPR ». D’auto-proclamés adorateurs de Gaïa souillent des œuvres d’art jugés « inutiles ». Les Verts européens, refusant « le mythe du progrès technique et de la croissance », justifient la nécessité d’une loi sur la « restauration de la nature » et des croyants fanatiques de la Nouvelle Église Verdoyante se livrent à la destruction de biens d’entreprises ou de particuliers au nom d’une vision apocalyptique du destin de « la planète ». Dire que l’écologie actuelle est nazie, fasciste ou brune, serait aussi excessif et insignifiant que les propos insignifiants parce qu’excessifs du Monde. Il n’en reste pas moins vrai que l’écologisme est une religion reposant essentiellement sur l’idée d’un paradis climatique perdu (les époques pré-industrielles)[3], d’un présent coupable de tous les maux climatiques et d’un futur climatiquement radieux parce que débarrassé de ces scories que sont, à ses yeux, le capitalisme, le progrès scientifique, la croissance, ainsi que tout ce qui constitue les fondements politiques, économiques et culturels de l’Occident. D’autres « ismes » eurent les mêmes aspirations de destruction du monde, de tabula rasa, avec les conséquences que l’on sait. Celui-ci a la particularité d’avoir mis en branle une révolution soft, sentimentaliste et émotionnelle, qui la met à l’abri (pour le moment) d’une résistance qui devrait être féroce mais qui reste molle, voire complaisante – le RN lui-même est obligé de jurer ses grands dieux qu’il n’est pas « climatosceptique » – et qui, de toute manière, est étouffée dans l’œuf par la propagande écolo dispensée à l’école et dans les médias.
Marine et les curés du climat
Marine Le Pen ayant déclaré avoir « un projet qui tient compte de l’environnement et de l’écologie », Le Monde brandit le spectre fasciste. Mais, enfiévré par sa harangue antifasciste, le journal se met à délirer. Il pose une question qu’il juge inquiétante et que nous qualifierons, pour rester poli, d’étrange : « Après avoir dérobé la laïcité, le patriotisme et la valeur travail à la gauche, le RN pourrait-il en faire de même avec l’écologie ? » Le RN n’a rien « dérobé » du tout mais s’est contenté de recueillir des valeurs orphelines, celles qui, choyées par la gauche historique, ont été abandonnées par la gauche et l’extrême gauche actuelles. Avec l’islamo-gauchisme est advenue la remise en cause d’une laïcité qui, jugée trop brutale et discriminante, est maintenant qualifiée, au sein même de la gauche, de « laïcarde ». Grâce à Sandrine Rousseau, le travail est devenu une « valeur de droite » et la nouvelle valeur de gauche est le « droit à la paresse ». Quant au patriotisme, cette valeur réputée être fondatrice de la gauche française depuis la Révolution, l’extrême gauche n’a eu de cesse ces dernières années de le confondre avec un nationalisme qui ne peut être, selon elle, que le réceptacle de pensées « nauséabondes », haineuses et xénophobes – les mots patrie, nation et France ont disparu des discours de la gauche, sauf quand il s’agit de les dénaturer. Concernant la seule écologie politique, ses excès rhétoriques, son absence d’argumentation rationnelle, ses accointances avec le wokisme et son islamo-gauchisme de plus en plus clairement affiché auraient dû jeter le doute quant à ses réelles ambitions « pour la planète » – malheureusement, en plus de soixante-huitards attardés, de jeunes bobos, élevés dans les couveuses écolo-wokes que sont devenues notre école et nos universités et hypnotisés par la vision apocalyptique des évangélistes écologiques, gonflent régulièrement les rangs de cette terrifiante religion et des sectes gravitant autour d’elle, associations et réseaux d’activistes ignares et nuisibles.
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Le Monde aime à se faire peur. Il craint que les « idées vertes » de l’écologie autorisée ne soient « dérobées, détournées puis repeintes en brun ». Peut-être redoute-t-il que d’autres idées ne connaissent le même sort. Imaginons que demain, Marine Le Pen ou, pire, Éric Zemmour, annoncent vouloir promouvoir un gigantesque Plan de recherche médicale contre le cancer. « Recherche contre le cancer et extrême droite : un dangereux mélange », titrerait sans doute alors le quotidien. « Depuis longtemps, écrirait-il, le terrain a été préparé par des théoriciens de l’extrême droite qui ont tissé des liens entre thématiques identitaires et recherche médicale. » L’air de rien, l’éventualité d’expériences chimiothérapiques réalisées uniquement sur des cobayes « racisés » ou des migrants serait évoquée – l’influence de Josef Mengele serait subtilement sous-entendue. En même temps, un « medicalwashing nationaliste » serait dénoncé. « Les progrès médicaux, conclurait le journal, courent un nouveau danger : être dérobés, détournés puis repeints en brun. » Avouez que ça fiche la trouille, non ?
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[1] https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/08/14/ecologie-et-extreme-droite-un-dangereux-melange_6185342_3232.html
[2] Luc Ferry, Le nouvel ordre écologique, 1992, Éditions Grasset.
[3] Les merveilleuses époques climatiques pré-industrielles fantasmées par les écologistes ont en réalité été caractérisées par des phénomènes paradoxaux et irréguliers. Dans son dernier, excellent et combatif essai, Le climat par les chiffres. Sortir de la science-fiction du GIEC (l’Artilleur, 2023), Christian Gérondeau cite l’historien Emmanuel Le Roy Ladurie : « L’époque romaine a bénéficié entre 200 avant J.-C. et 200 après J.-C. d’un optimum avec un climat à peu près similaire à celui du XXe siècle. À l’époque mérovingienne, une glaciation modérée a vu le jour vers l’an 500 avant un nouvel optimum connu sous le nom « d’optimum climatique médiéval » survenu entre 900 et 1300, qui fut contemporain de défrichements importants et d’un essor démographique notable. […] Plus proche de nous, un petit âge glaciaire s’ouvre au XVIe siècle et se termine au milieu du XIXe siècle. À partir de 1570 les glaciers alpins progressent fortement, quelques fois de plus de 40 mètres par an. […] À la fin du XVIe siècle, à Chamonix, la Mer de Glace atteint et détruit ainsi des hameaux voisins. Provoquée par les pluies, la famine de 1693 fit 1,3 million de morts sur 20 millions de Français. L’hiver 1709 fut l’un des plus froids jamais connus en Europe, ce qui provoqua près de 600 000 morts dans notre seul pays. […] À partir des années 1850-60, sous l’influence de belles années chaudes, c’est la fin du petit âge glaciaire avec un nouvel optimum. » Ces observations incontestables ont été avalisées par le GIEC, sous forme d’un graphique, dans son premier rapport datant de 1990. Pourtant, précise Christian Gérondeau, dans le sixième rapport du GIEC de 2021, un nouveau graphique, « issu de mystérieux “modèles” », travestit le graphique originel en gommant les écarts climatiques et en faisant surgir un seul « pic » s’élevant à partir du début du XXe siècle. Le GIEC affirme alors que « la température de la surface du globe s’est élevée d’ 1,1°C par rapport à la période pré-industrielle » mais omet de dire que cette période pré-industrielle est celle du « petit âge glaciaire » évoqué ci-dessus – tout est fait pour « faire peur », laisser croire que le « changement climatique » est un phénomène nouveau et corroborer l’idée qu’avant l’ère industrielle et l’utilisation des énergies fossiles, le climat était quasiment linéaire. Les bigots de la religion écologiste gobent sans barguigner ce catéchisme. Pourtant, « à lui seul ce graphique, qui cache en outre le fait que la température terrestre a cessé de croître depuis 2015, disqualifie le GIEC », écrit Christian Gérondeau.