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Le massacre des punaises et des illusions

Un redoutable ennemi de l’intérieur…


Le massacre des punaises et des illusions
D.R.

La guerre des punaises de lit aura bien lieu…


À vaincre sans périls, on triomphe sans gloire. Les dernières campagnes ont été rudes pour Jupiter Fulgurator : Covid interruptus, guerre des masques, chasse aux vaccins, retraites, duperies de Vlad l’empaleur, divorce du couple franco-allemand, abandon des Arméniens, alertes noires en Afrique rouge, Bérézina à Bamako… Dernière déconvenue, un redoutable ennemi de l’intérieur, des hétéroptères hématophages, les punaises de lit, infestent un foyer sur dix. Clément Beaune veut « objectiver la situation avec tous les acteurs ». Au XVIe siècle, Barthélemy de Chasseneuz s’était spécialisé dans les procès d’animaux, la défense des nuisibles, rats d’Autun, charançons.

Trop c’est trop. Chef des armées, Bayard inépuisable, Emmanuel Macron prend son risque. Le président va livrer la mère de toutes les batailles, une opération spéciale contre la Cimex lectularius. Il tient sa revanche, l’acmé de son deuxième quinquennat, avec à la clé la relocalisation d’une grande industrie de l’insecticide bio. Aymeric Caron a le cafard, Sandrine Rousseau est perplexe : Baygon jaune ou Baygon vert ? Les surmulots parisiens sont-ils porteurs de punaises ?

D.R.

Le Monde sans volonté ni représentation

Le Massacre des illusions, c’est l’anthologie du savoureux Zibaldone de Leopardi. Dernier des Classiques, premier des Modernes, le génie de Recanati annonce l’existentialisme, Schopenhauer. Deux siècles plus tard, nos dernières illusions, écologiques, économiques, migratoires, éducatives tournent au cauchemar. Partout les grands remplacements, déclassements, croassements ; depuis 7, 77 ans, les mêmes indignations, postures, et impuissances. « Ils dînent du mensonge, et soupent du scandale » (Chénier).

La part de l’industrie dans notre PIB a diminué de moitié depuis 1980. La dette publique, 3050 milliards d’euros, 111,8 % du PIB, a triplé depuis 2003. Bruno Le Maire, impair la rigueur, siphonne les caisses complémentaires. Lampedusa est confrontée à une vague migratoire inédite. C’est bien évidemment la faute de l’Europe. Ne faisons rien c’est plus prudent. Ursula et Giorgia, nouvelles copines, godillent dans la mer des sarcasmes. « Chacun doit prendre sa part ». La formule est jésuite. Il y en aura pour tout le monde. La tête ou les jambes ? Suella Braverman, ministre anglaise de l’Intérieur, juriste diplômée de Cambridge, plombe l’ambiance. Elle dénonce le dévoiement de la convention de Genève de 1951 sur les réfugiés, parle de « menace existentielle » pour notre mode de vie. L’infâme est l’avenir de l’homme.

A lire aussi, Maximilien Nagy et Jeremy Stubbs: «Cruella Braverman», la ministre britannique qui pense que la Convention de Genève sur les réfugiés n’est plus adaptée à l’époque

Faites-les lire ! Pour en finir avec le crétin digital, c’est un opus de Michel Desmurget (docteur en neuroscience) qui dénonce le lavage des cerveaux et l’opium des écrans. Voyeuse, exhibitionniste, narcissique, La Petite poucette de Michel Serres surfe dans la bêtise et le néant. Le Grand Meaulnes et Fermina Marquez sont enterrés depuis belle lurette. La jeunesse donne sa langue au chat (GPT). Les BD et mangas ne sont pas une voie d’entrée vers la littérature. Pas de performance économique sans « literacy ». La lecture n’est pas valorisée par notre système éducatif, sous-performant et inégalitaire. L’écroulement du niveau scolaire est entériné. Enfumage pédago de « questions problématisées », notes bidon, tous dopés… Le syndrome du Tour de France… par deux enfants. Rue de Grenelle, dans les rectorats, c’est l’omerta, pas de vagues.

Le sentiment tragique de l’avis

Au royaume des idées, à gauche, les faits n’ont pas d’importance. Les ravis de la crèche culturelle s’aiment à tous vents. La Maison des Ecrivains et de la Littérature tisse le linceul du vieux monde dans l’entre-soi, les prix qu’on court de la révolte et une novlangue de pacotille. Grand débat d’octobre : « Qu’est-ce qui fait encore commun ? Quelque chose se passe, a lieu, qui fait converger des lignes de fuite, des lignes esthétiques, éthiques, des lignes de pensée et de création (…) À la fois ‘faire ensemble’ et ‘faire l’ensemble’, le réinventer, l’inventer peut-être. À l’écoute des écrivains et penseurs invités, nous interrogerons les formes de solidarité, de résistance, de militance qui agrègent les énergies ; les livres où les voix se partagent, s’écoutent et parfois s’entendent ; les mondes – sports, chœurs, jeux, réseaux, troupes d’acteurs, collectifs d’auteurs… – où des forces se regroupent ; les lieux communs que nous avons en partage » (site de la MEL). Le grand soir reconductible… Rue du Vieux Colombier, sur France Inter, la raison tonne en son critère ; au Bon Marché voisin, c’est l’éruption de la faim. Les pauvres ont des problèmes, les progressistes ont des principes.

Najat s’agite, Jean-Michel s’enferre, Pap s’abstient. Gabriel Attal est dans l’action. Le jeune cornac veut « reconquérir le mois de juin, parce que chaque jour, chaque cours compte ». Sa priorité absolue c’est le harcèlement scolaire. Bientôt des brigades dédiées, cours d’empathie, jeux de rôles. « Je ne reculerai devant rien, la peur doit changer de camp ». Le Garde des Sceaux, raccord, « envisage une saisine systématique du portable et sa confiscation définitive s’il a été utilisé pour le cyberharcèlement ». La fête du slip est terminée.

A lire aussi, Elisabeth Lévy: Punaises de lit: charivari contre Pascal Praud

« Il faut saisir l’occasion par les cheveux ». Emmanuel Macron connait le proverbe et ne manque pas de toupet. 1/3 marchand de falafels, 1/3 consultant, 1/3 senior Oliveira, sans oublier un quatrième tiers Monsieur Champagne, Jupiter a un avis sur tout et surtout un avis. Il passe des pactes, organise des conclaves nocturnes, fait tourner les tables. Sur TF1, dans Pif, les vestiaires, les boites de nuit, avec Mcfly, Carlito, Hugo Travers, il bat la campagne, « met sur la table », devise, sermonne, fait tout, dit tout, tout le temps. Pilier, ailier, demi d’emmêlé, soigneur, il distribue les bons points et du popcorn « à la française », à la mi-temps.

Image: Capture YouTube.

Les courtisans, prébendiers, ministres, mouches du coach, applaudissent le mime bavard, les gesticulations d’un hanneton sur le dos, cornérisé depuis deux ans. « Le moyen le plus direct de gagner la renommée est d’affirmer avec une ferme assurance et le plus souvent possible, qu’on la possède déjà » (Leopardi). Panem et circensens, à Rome, c’était pour le peuple ; les élites sont aujourd’hui contaminées. Dans les années 30 le Dr Voronoff proposait des cures de jouvence, greffait des testicules de singe pour redonner une vigueur intellectuelle et physique.

Ne jetons pas l’eau du bain avec le bébé. Jupiter et les décors du roi ont une fonction. Toute société a besoin de bouc émissaire. Les élections sont un rite d’expiation. Emmanuel Macron est un chef haï, précieux, idéal, coupable du malheur comme du pire. On ne gouverne pas innocemment. Théâtralement, l’Occident et ses élites acculturées, naïves, hors-sol, agonisent. Prise dans une tenaille maléfique, « mondialisation-reféodalisation », l’Europe s’auto-intoxique.

Pierre Manent prend de la hauteur. « Aujourd’hui, un seul interdit pèse sur l’Humanité : ne pas se diviser (…). L’Europe a décidé de partir de zéro, d’effacer les Nations, d’effacer les vieilles confessions européennes qui avait accompagné, nourri, l’histoire européenne. Partir de zéro veut dire ne plus porter aucune proposition, commencer à mettre à l’œuvre l’unification de l’Humanité, l’Europe se présentant comme la première version du brouillon de l’unification de l’Humanité, mais une Humanité qui n’est définie par aucun contenu, qui n’a aucune visée, qui n’a aucune articulation interne, une Humanité informe » (Pascal et la proposition chrétienne).

« …Quant au bonheur des masses, il me fait rire, car mon petit cerveau ne peut concevoir une masse heureuse composée d’individus qui ne le sont pas » (Giacomo Leopardi).

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