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Le FN est le problème du PS


Le FN est le problème du PS

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Au plan électoral, c’est désormais une évidence. Parti protestataire, le FN attire à lui une fraction des mécontents que fabrique toute majorité en place. Ainsi, entre 2007 et 2012, les déçus viennent de la droite : le score du candidat FN à la présidence de la République grimpe de 10,7 % à 17,9 %. Depuis l’élection de François Hollande, les déçus viennent de la gauche ; le FN grossit désormais aux dépens du PS. On le verra peut-être en 2017, sans doute en 2014 et 2015, avec les élections locales, européennes et régionales, mais on peut d’ores et déjà le constater grâce aux diverses élections partielles, législatives et cantonales, dont les enseignements sont limpides : le FN fait jeu égal avec un PS en voie d’effondrement, si bien que la droite n’a besoin d’aucune alliance pour gagner.[access capability= »lire_inedits »]
Au regard des législatives partielles de 2012-2013, le rapport de force entre la gauche de gouvernement – la gauche hors extrême gauche et Parti de gauche – et la droite de gouvernement – la droite hors extrême droite et Front national – s’est déjà inversé. En juin 2012, dans les circonscriptions métropolitaines concernées par une partielle, la première devançait à peine la seconde (l’écart était de 0,5 point) ; depuis 2012, la droite de gouvernement est en tête avec une avance de… 17,6 points ! De son côté, le FN progresse de 3,7 points au point de faire jeu égal avec le PS[1. Cf. l’étude à ce sujet publiée par la Fondation pour l’innovation politique sur son blog « Trop Libre », le 22 juin 2013 : « Ce que révèlent les élections législatives partielles » (www.fondapol.org).] (voir encadré).
La progression de l’UMP et de l’ensemble de la droite de gouverne- ment rend donc caduque la stratégie du rapprochement avec le FN. La droite a d’autant moins besoin d’une alliance avec le FN que celui-ci progresse au détriment du PS. Si, comme d’habitude, ces élections partielles ont été marquées par une abstention massive, tout donne à penser qu’une plus forte mobilisation, lors d’élections générales, ne modifiera pas cette nouvelle donne politique. En d’autres termes, le FN est devenu le problème du PS. Signe qui ne trompe pas, désormais, lorsqu’il est présent au second tour, qu’il s’agisse d’une législative ou d’une cantonale partielle (Brignoles), ce n’est pas contre le PS mais contre l’UMP. La perspective d’un effondrement électoral du PS annonce donc des duels de second tour UMP/FN. Le risque des triangulaires sera encore plus faible si la droite a mené à bien la révolution doctrinale que commande l’épuisement de l’État-providence, gagnant ainsi la confiance et les suffrages des électeurs modérés de la gauche et du centre, lesquels, comme d’habitude, décideront de la victoire.
Au plan programmatique, un rapprochement entre la droite de gouvernement et le FN n’a pas non plus de raison d’être. Que veut le FN ? Un État majoritaire chez Peugeot SA, la planification, la retraite à 60 ans, la sortie de l’euro, le protectionnisme commercial national, etc. Le détail témoigne de la désinvolture avec laquelle le programme du FN a été conçu. Prenons l’exemple du financement de la dépendance. Nous devons trouver entre 30 et 40 milliards par an. On hésite entre la solidarité publique, qui suppose un nouvel accroissement des prélèvements, et l’assurance privée, qui fait courir le risque de fortes inégalités. Le FN a trouvé une solution : il propose de financer le nouveau risque social par un impôt sur les transactions capitalistes internationales ! Et ce « plan de financement » sera mis en place pendant la sortie de l’euro…
Certes, dans le moment où nous sommes, la droite doit repenser l’ensemble de sa doctrine. Mais si cette révision se traduisait par un rapprochement programmatique avec le FN, elle lui ferait perdre son statut de parti de gouvernement et la conduirait à l’éclatement, favorisant une recomposition politique qui offrirait à la gauche l’unique solution capable de la sauver.
Au plan social, enfin, un rapprochement avec le FN conduira la droite à tourner le dos à la « France qui vient ». Illustrons ceci par un seul indicateur : la religion. La proportion des Français se déclarant catholiques était de 81 % en 1952. Elle est tombée à 64 % en 2010[2. Sur ces questions, cf. mon livre Les Nouveaux Populismes, Paris, Pluriel, 2013.] ; en 2012, elle a encore reculé (56 %), et si l’on peut éprouver une certaine tristesse à décrire cette réalité, c’est ainsi que les Français l’ont voulue. Plus, parmi les 25-34 ans, cette proportion tombe à 43 % et à 31 % chez les jeunes de 18-24 ans. En revanche, l’affiliation déclarée à une « autre religion », qui concerne 6 % des Français majeurs en 2012, grimpe à 18 % chez les moins de 25-34 ans et à 21 % chez les 18-24 ans. Si, pour simplifier, on considère que les Français affiliés au protestantisme et au judaïsme représentent dans les jeunes classes d’âge la même proportion que dans l’ensemble de la population adulte, soit respectivement 2 % et 1 %, alors cela signifie que les jeunes Français musulmans représentent environ 15 % des 25-34 ans et 18 % des 18-24 ans. Autrement dit, les musulmans représenteront bientôt entre un cinquième et un quart de la population française. Leur tourner le dos serait suicidaire.
Ce n’est donc pas avec le FN que les partis de gouvernement accompliront leur indispensable aggiornamento. La droite doit comprendre que, pour elle, la question du FN ne se pose plus. Faute de quoi la recomposition politique se fera sans elle.

*Dix-huit mois après la victoire de la gauche, le nouveau rapport de force

Les législatives partielles intervenues depuis juin 2012 dessinent un tableau politique que l’on résumera en six points : a) le PS régresse fortement pour tomber à 18,8 % des suffrages exprimés, soit un recul de 7,5 points par rapport à 2012 ; b) la gauche de gouvernement recule de 11 points et ne réunit plus qu’un quart des suffrages exprimés (26 %) ; c) l’UMP progresse (+ 3,6 points) pour atteindre 38,1 %, soit 20 points de plus que le PS ; d) la progression de l’ensemble de la droite de gouvernement (+ 7 points) est plus forte que celle de l’UMP ; e) avec 43,6  % des voix, la droite de gouvernement surclasse nettement la gauche de gouvernement (26 %) ; f) avec 18,8 %, le FN progresse de 3,7 points, faisant jeu égal avec le PS.

Note technique : depuis juin 2012, on compte huit élections législatives partielles, dont cinq en France métropolitaine. Ce sont ces cinq élections qui constituent la base de calcul de ce bilan d’étape, soit 403 136 électeurs inscrits. Les trois autres législatives partielles, deux circonscriptions des Français de l’étranger et la 1re circonscription de Wallis-et-Futuna, n’ont pas été prises en compte. Notons simplement que, en raison de leurs caractéristiques hors normes, leurs résultats accentueraient massivement les traits relevés ici. [/access]

*Photo: LCHAM/SIPA. 00669594_000033.

Novembre 2013 #7

Article extrait du Magazine Causeur



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est directeur général de la fondation pour l'innovation politique (www.fondapol.org)

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