Accueil Édition Abonné Le député islamo-gauchiste, les «dragons célestes» et le «dog whistle»

Le député islamo-gauchiste, les «dragons célestes» et le «dog whistle»

Cet art de ne pas dire les choses en les disant quand même, la France insoumise l’a élevé à un haut niveau…


Le député islamo-gauchiste, les «dragons célestes» et le «dog whistle»
Le député d'extrème gauche du Nord David Guiraud, décembre 2022 © NICOLAS MESSYASZ/SIPA

Le député LFI David Guiraud a été accusé d’antisémitisme, après un post sur « X » (ex-Twitter) faisant référence aux « Dragons célestes » du manga japonais One piece. Tout comme son chef Jean-Luc Mélenchon affirmait que l’emploi du verbe « camper » associé à la visite de Tel Aviv de Mme Braun-Pivet n’avait aucune connotation particulière, le député assure ne pas avoir rejoint l’Axe.


Un langage codé antisémite ?

Il fut un temps où Léon Daudet s’écharpait sur les bancs de la Chambre des députés avec ses collègues radicaux pour la traduction d’un vers de Virgile. Mais ça, c’était avant, et depuis, nos élus et ministres, qui sont des gens comme les autres, sont surtout imprégnés de « culture » Marvel et de mangas. En 2021, dans l’émission TPMP, Marlène Schiappa citait Spider-Man. En ce début d’année, David Guiraud a fait allusion à la bande dessinée japonaise « One piece ». Une allusion qui suscite le tollé, car pas tout à fait dépourvue d’antisémitisme.

Des dragons qui dominent le monde…

Dans son fameux tweet, le député LFI, né en 1992 et apparemment imprégné de japoniaiseries animées, a en effet publié un GIF (comprendre : une image animée) dans lequel apparait un « dragon céleste ». Rien de bien méchant à première vue, si le symbole n’était pas utilisé massivement ces derniers mois sur les réseaux et les forums à la fois par l’extrême droite antisémite, l’extrême gauche antisioniste et la nébuleuse islamique. Dans cette bande dessinée japonaise, les « dragons célestes » constituent une aristocratie de méchants ultra-riches, disposant de revenus faramineux et d’esclaves, épargnés par les remontrances du Gouvernement Mondial. Un imaginaire qui a de quoi exciter tout ce que notre époque compte de complotistes. De là à faire des dragons célestes des Juifs, il n’y a qu’un pas, tant ils répondent aux fantasmes antisémites. Sur les réseaux sociaux, le rapprochement est fait depuis un bon moment, et le terme est utilisé comme un message codé pour vomir sa bile contre les Juifs en toute impunité, à l’abri des bannissements. Dans les cours d’école, de jeunes collégiens ricanent à l’évocation de la Shoah et font allusion aux dragons célestes.

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Depuis, David Guiraud, élu dans la circonscription de Roubaix en juin 2022, est monté sur ses grands chevaux… et a effacé son tweet. Le député nous propose une explication de texte : « Petit message à ceux qui me suivent car il paraît que certains utilisent mon tweet pour se lacher (sic) : laissons la religion en dehors de ca (sic). Les dragons célestes ne sont pas une religion ou une « race » et si vous le pensez vous avez mal lu One Piece. C’est une alliance militaire de gens puissants qui écrasent les autres. Ils ne sont pas détestés pour ce qu’ils sont, mais pour ce qu’ils font aux autres. Mais je ne veux heurter personne donc je prefere (sic) supprimer ». L’explication n’est qu’à demi-convaincante, car depuis janvier 2023, plusieurs articles ont illustré ce rapprochement fait par quelques petits malins entre Juifs et dragons célestes. Et cette affaire ne suit que de deux mois la sortie lunaire du député, à Tunis, qui déclarait, au lendemain du 7 octobre : « Le bébé dans le four, ça a été fait par Israël, la maman éventrée, ça a été fait par Israël ! ». Une rhétorique qui  n’est finalement pas sans rappeler celle de Thierry Meyssan, ou d’Éric Laurent, lequel expliquait en 2004 chez Thierry Ardisson que « soixante Israéliens étaient logés à proximité des terroristes du 11 septembre » et que, derrière les agissements des barbus, le Mossad n’était jamais très loin.

Coup de sifflet aux chiens de la casse

On appelle ce type de gros clins d’œil politique un « dog whistle », un « appel du pied » ou un « sifflet au chien » en bon français. Le message codé du député a d’ailleurs été bien compris par la clientèle visée. Cet art de ne pas dire les choses en les disant quand même, la France insoumise l’a élevé à un haut niveau. C’est encore M. Mélenchon qui s’est montré le plus habile dans ce domaine : le 22 octobre, toujours sur Twitter, il écrivait : « Voici la France. Pendant ce temps Madame Braun-Pivet campe à Tel Aviv pour encourager le massacre. Pas au nom du peuple français ! ». Un verbe pas choisi au hasard, là non plus, selon nombre d’observateurs. La présidente de l’Assemblée nationale y avait vu une allusion aux camps de concentration.

C’est à des petites choses comme cela que l’on s’attire la sympathie d’Houria Bouteldja et celle de Jérôme Bourbon, l’inénarrable directeur de Rivarol.




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Professeur démissionnaire de l'Education nationale

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