Les violences au Stade de France ont mis en lumière la délinquance endémique de la Seine-Saint-Denis. Relevant davantage de la voyoucratie plus ou moins organisée que de gangs prêts à la guerre civile, celle-ci étend toujours plus ses zones de non-droit. Mais pour ne pas « stigmatiser », la majorité des élus préfèrent la nier.
« Techniquement il faut faire attention, le stade est à Saint-Denis, pas à Paris. […] Croyez-moi, vous ne voulez pas être à Saint-Denis. Ce n’est pas pareil que Paris, croyez-moi. » La scène se passe sur le plateau de CBS Sport, le mercredi 4 mai 2022. L’ancien footballeur international Thierry Henry évoque le match Liverpool-Real Madrid qui doit avoir lieu le 28 mai au Stade de France. Il ne fait que dire ce que tout le monde sait. Mais décrire le réel de certaines banlieues déclenche immédiatement un procès en discrimination.
Cet échange fait donc immédiatement réagir Mathieu Hanotin, le maire de Saint-Denis, qui dénonce un mépris non acceptable de l’ancien champion du monde. Il appelle à regarder la jeunesse dionysienne avec plus d’empathie que d’inquiétude. Une vingtaine de jours après cet échange par réseaux sociaux interposés, les événements du Stade de France confirment la justesse du constat lapidaire de Thierry Henry : effectivement, Saint-Denis, ce n’est pas Paris. Ces événements illustrent l’extension des zones de non-droit et montrent que des équipements prestigieux ne suffisent pas à créer la mixité sociale. Pire, ils démontrent que du « côte à côte », nous sommes en train de passer au « face à face », selon le mot de Gérard Collomb.
La peur de banlieues incontrôlables
Les violences autour du Stade de France touchent en effet un lieu symbolique. Le choix de Saint-Denis était censé manifester la volonté de l’État de casser les ghettos en installant des équipements prestigieux dans des zones défavorisées. Or, comme on a pu constater très vite, pour favoriser la mixité sociale, il faut d’abord rétablir la sécurité. En attendant, la réaction des Français face aux images de ce fiasco témoigne du retour de peurs que l’on croyait disparues : celles de territoires échappant à tout contrôle, où tout déplacement, tout rassemblement est synonyme de danger. Les Français sont confrontés concrètement au fait que l’État ne peut pas garantir concrètement l’intégrité physique et les libertés sur tout le territoire. Voilà pourquoi les images du Stade de France ont traumatisé tout un pays : elles ont ravivé un sentiment d’insécurité et de déliquescence des institutions auquel le réel ne cesse de donner de la consistance.
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Avec ce qui s’est passé à Saint-Denis, tout était réuni pour réveiller ces angoisses latentes de guerre civile qu’a notamment portées la candidature d’Éric Zemmour. Pourtant, les experts du sujet estiment
