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Le cauchemar d’Obama


Le cauchemar d’Obama

La campagne électorale des « midterm » américaines du 2 novembre prochain prend des allures de rodéo où le peuple en délire voit les notables installés, démocrates comme républicains, mordre la poussière et quitter l’arène politique sous les quolibets des spectateurs.
La phase des primaires, qui vient de s’achever, s’est traduite par la montée en puissance des candidats, et singulièrement des candidates, soutenus par le mouvement « Tea Party », un rassemblement de toutes les droites populaires animé avec une fougue et un sens politique hors du commun par Sarah Palin, ex-candidate républicaine à la vice-présidence en 2008.

Les noms de Christine O’Donnell, Sharron Angle, Nikki Halley ou Michelle Bachmann étaient jusqu’à ces dernières semaines inconnus du grand public américain. Aujourd’hui, elles sont à la « une » de Newsweek et elles font la tournée des talk-shows télévisés, et pas seulement ceux de Fox News, la chaîne bestialement conservatrice qui domine le marché des chaînes d’infos aux Etats-Unis. Elles se sont imposées à la surprise générale pour briguer des postes de député, de sénateur, ou de gouverneur d’Etat.

Dans un de ses coups de génie communicateur, Sarah Palin vient de rassembler ces dames sous la catégorie des « mamas grizzly ». Est ainsi désignée une nouvelle race de femmes politiques dont le comportement s’apparente à celui de l’ourse commune d’Alaska, qui ne fait qu’une bouchée de tout être vivant ayant l’imprudence de s’interposer entre elle et ses oursons. Même le grizzly mâle, pourtant plus gros et plus puissant que sa compagne, fait un large détour lorsqu’il aperçoit la petite famille en train de se goinfrer de saumons le long d’un torrent.

L’impopularité de « ceux de Washington »

Toutes les dames citées plus haut ont comme caractéristique commune d’être parvenues à se frayer un chemin dans la jungle politique des Etats-Unis sans l’onction ni le soutien financier de la machine politique républicaine. Pour vaincre leurs rivaux, souvent des politiciens blanchis sous le harnois, elles se sont appuyées sur le rejet de plus en plus violent par une frange de plus en plus large d’électeurs de « ceux de Washington ». Cette impopularité vise aussi bien le locataire de la Maison Blanche, Barack Obama et son entourage, que les membres du Congrès, démocrates comme républicains. On leur reproche de vivre dans une bulle et d’avoir perdu tout contact avec la vie et les préoccupations de la classe moyenne, celle qui est frappée le plus durement par la crise économique et la montée du chômage.

Ces femmes, dont beaucoup se sont longtemps consacrées à leur fonction de mère de famille, ne sont pas des desesperate housewives de série télé. Elles sont du genre à tout surveiller autour d’elles, à harceler les professeurs quand l’enseignement dispensé à leurs chers bambins leur semble insuffisant ou trop marqué par les idées gauchistes en vogue dans les universités les plus réputées. Elles se définissent politiquement comme des common sense conservatives, des réacs de base dotées d’un credo simple et compréhensible par tous : moins d’Etat, moins d’impôts, plus de religion et d’appel à la responsabilité individuelle. Elles sont contre l’avortement, le mariage gay, la sécurité sociale pour tous et les programmes scolaires imposés par le Département de l’éducation de Washington. En politique étrangère, domaine qui n’est pas leur souci premier, elles ne s’embarrassent pas des subtilités idéologiques du « wilsonisme botté » défendu à l’époque de George W. Bush par les intellectuels néo-conservateurs. L’Amérique doit défendre ses valeurs et son honneur partout où ils sont attaqués, sans se poser trop de questions éthiques et sans viser à faire ami-ami avec ceux qui vous crachent à la figure en attendant de vous égorger. C’est dire à quel point elles sont insensibles à une « obamania » en net reflux aux USA, mais toujours vivace dans les élites politiques et médiatiques européennes.

Leur empowerment, un terme en vogue dans les milieux féministes des sections de « gender studies » dans les universités, signifiant la prise en main de leur destin par les dominés, en l’occurrence les dominées, fera sans doute l’objet d’une multitude de mémoires et de thèses dans les années à venir. On pourra y retrouver en creux une version de droite de cette idéologie du « care » dont s’est entichée notre Martine Aubry nationale. S’occuper des gens, des enfants, des malades et des personnes âgées n’est pas, selon elles, du ressort de l’Etat accapareur et redistributeur, mais celui des organisations de proximité où chacun peut exercer le don de soi et la charité prônés chaque dimanche en chaire par le pasteur du coin.

N’imaginez surtout pas ces « mamas grizzly » comme des laiderons à l’allure revêche, comme on caricature les militantes des ligues de vertu. A l’image de leur patronne, Sarah Palin, elles cultivent un look sexy et arborent en permanence un sourire dents blanches à faire damner un moine. Selon les derniers sondages, certaines d’entre elles risquent de faire tomber de leur siège des poids lourds du Congrès, comme Harry Reid, le chef de la majorité démocrate au Sénat, sérieusement menacé par la mama grizzly Sharron Angle dans le Nevada. Cette espèce trouvera-t-elle un jour en Europe un territoire favorable à son acclimatation ? Si cela devait être le cas, les Verts devront revoir leur copie relative à la protection des ours dans nos montagnes.



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