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Le 7 juin, votez Zamenhof


Le 7 juin, votez Zamenhof

Il y a quelques jours, Luc Rosenzweig, marchant sur les pas de Paul Thibaud, lançait un appel à l’abstention sur de solides bases : la construction européenne est épuisée et le Parlement européen une institution parodique, les citoyens ne sont donc pas tenus de se prêter à cette comédie démocratique. Je partage l’essentiel de l’argumentation de mes deux aînés mais nos chemins bifurquent pourtant.

En l’absence de reconnaissance – pas seulement arithmétique – du vote blanc, le citoyen a peu de solutions pour témoigner son mécontentement. L’abstention ne blesse personne. Elle est largement anticipée. Elle sera probablement commentée comme « historique » et fournira matière à colloque sur « le déficit démocratique de l’Union »… Bref, l’abstention attendue est déjà digérée par la machine. Dans la dernière livraison de Commentaire, Jean-Louis Bourlanges ironise sur l’avenir des élections européennes faisant mine de prophétiser, un jour, une participation à un chiffre.

Autrefois, le scrutin européen pouvait être utilisé comme défouloir. Les listes diverses récoltaient bon nombre de suffrages. Le souvenir du 21 avril et le nouveau mode de scrutin ont entraîné en 2004 un retour à l’ordre. Malheureusement, le cru 2009 s’annonce tout aussi triste.

Les sondages – photos floues et mal cadrée d’un événement qui n’aura jamais lieu – font craindre la victoire du complot des raisonnables : le duo UMP-PS attirent 50 % des intentions de vote et leurs flancs respectifs sont atomisés (LO, NPA, Front de Gauche, Libertas, DLR). Seuls les écologistes et le Modem, crédités d’une dizaine de points, sont susceptibles de gâcher la fête. Si les résultats confirmaient les sondages, tous seraient perdants à la seule exception du président de la République. S’abstenir, c’est le conforter. Quoi qu’on pense de lui, il existe un choix plus amusant.

De la cantonale partielle (dont on vit les dernières heures) à la reine des élections, la politique est une affaire de professionnels. Beaucoup de politiciens sont ridicules, aucun n’est loufoque. Les Européens offrent aux électeurs une occasion d’honorer la loufoquerie.

En juin prochain, cette option peut prendre deux visages. Dans la veine situationniste, Gaspard Delanoë avait provoqué un mini-bug démocratique en 2008 lors de l’élection municipale dans le Xe arrondissement de Paris, en neutralisant sur son patronyme un nombre anormalement élevé de voix. Avec son « Parti Faire un Tour », la gentille dinguerie avait son candidat comme la haine sinistre a aujourd’hui le sien avec Dieudonné.

À peine moins loufoque, la liste Europe Démocratie Espéranto offre une perspective historique beaucoup plus séduisante. Ni insignifiante ni gratuite, la démarche des militants de l’espéranto est d’abord d’obtenir une minuscule tribune et quelques micros. Mais contrairement à d’autres groupes d’intérêt improbables, cette liste est vraiment à sa place dans cette élection.

Face au triomphe de l’anglais d’aéroport, de New York à Shanghai en passant par Bruxelles, le mouvement espéranto mérite considération et sympathie. Au milieu du prochain siècle, quand l’Union européenne sera devenue une entité politique, quand les vieilles nations auront quitté la place, nos descendants nous reprocheront peut-être de ne pas avoir pensé plus tôt la question linguistique. De ne pas avoir, par courte vue, donné à l’Union son latin.

À plus court terme, « L’Europe des comme si… », justement évoquée par Luc Rosenzweig, est un lieu de bavardage, où le sabir technocratique le dispute aux inventions verbales les moins inspirées. L’Europe parle. Pour masquer son inaction, pour ne pas voir son épuisement. Quiconque a écouté quelques minutes au moins le « 7-10 » de France Inter « spécial Europe », connait ce langage fou, hors-sol déconnecté du réel.

La vacuité des déclarations du président Hans-Gert Pöttering nécessite une langue à part. Le président Pöttering parle français. Félicitons-le. Il est merveilleux de penser qu’à la buvette le président Pöttering peut dialoguer avec ses collègues français. Mais quand le président Pöttering vient évangéliser les foules eurosceptiques gauloises, le sublime et la dignité voudraient qu’il le fasse dans une langue dédiée. Sauf à examiner la candidature du latin (que l’époque disqualifierait probablement pour homophobie et négationnisme), l’espéranto est la seule langue susceptible de faire l’affaire.

J’imagine que les promoteurs d’Europe Démocratie Espéranto ont autre chose en tête. En lisant leur programme, je les vois sensibles au messianisme européen. Ils trouveront louche ce soutien qui mélange cynisme et moquerie, défauts étrangers au meilleur des mondes fraternel auquel ils travaillent depuis plus un siècle. En politique, on ne choisit pas toujours ses alliés, mes chers amis, je vous offre ce soutien et j’appelle tous les électeurs à ne pas s’abstenir le 7 juin. Donnons à l’Europe le sabir qu’elle mérite : l’espéranto.



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Quand David Dupré a compris qu'il ne pourrait pas vivre de la taxidermie, il a choisi comme métier son autre hobby: la politique. Auparavant, il avait pris soin de naître à Lyon en 1975

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