L’assassinat du père Olivier Maire a donné lieu à des expressions de compassion et d’indignation de la part des politiques et d’autres personnalités publiques. Pourtant, le plus tragique dans cette affaire, c’est que ce crime aurait pu être évité et qu’on n’en tirera pas les leçons pour la prochaine fois.
Le père Olivier Maire était le supérieur provincial de France des Pères Montfortains. Il a été assassiné par un Rwandais, lundi 9 août, à Saint-Laurent-sur-Sèvre en Vendée. L’état psychologique de ce dernier apparaissant incompatible avec la garde à vue, il est hospitalisé en psychiatrie.
Le 18 juillet 2020, ce même individu avait déjà été l’auteur d’un incendie dans la cathédrale de Nantes où il était employé officieusement comme sacristain. Mis en examen, il était seulement placé sous contrôle judiciaire. Accueilli par la communauté au sein de laquelle, au bout de quelques mois, il allait tuer. Illégalement en France depuis 2012, il a fait l’objet de trois tentatives d’expulsion, une obligation de quitter le territoire lui ayant été notifiée en 2019.
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L’aberration absolue résulte du cumul de deux dysfonctionnements gravissimes : il n’est pas expulsé en 2019 et son placement laxiste sous contrôle judiciaire en 2020 interdisait que la première prescription soit mise en œuvre, même avec retard. On est contraint de considérer que deux faillites – étatique et judiciaire – se sont épaulées l’une l’autre pour empêcher une solution de bon sens.
La tragédie de la mort du supérieur est d’autant plus intolérable et scandaleuse qu’elle résulte d’une double responsabilité montrant le caractère surréaliste de notre état de droit. Un sénateur de Vendée a dénoncé lucidement et avec mesure cette situation mais souligné qu’il ne fallait pas chercher de « responsables ni jeter l’opprobre ».
Précisément si.
Le ministre de l’Intérieur a tweeté en adressant ses pensées émues à tous les catholiques. Le président de la République a fait de même en rendant hommage au prêtre assassiné. Le garde des Sceaux s’est engouffré dans le même processus de compassion et de solidarité avec les catholiques. Le Conseil français du culte musulman a exprimé son indignation.
Ce n’est pas rien mais, parlons net, tout cela est parfaitement inutile. Cette unité, ces larmes, ces tweets et ces hommages, quand le pire a été perpétré et qu’il aurait dû et pu être évité, relève d’un mélodrame politique certes sincère mais indécent. Cette apparente concorde n’est destinée qu’à occulter le fait qu’on n’ira pas à l’essentiel, pas plus que pour les autres catastrophes, essentiel qui serait d’incriminer et de sanctionner les responsables ayant en amont permis la réalisation de cette atrocité.
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Comme citoyen, je n’en peux plus de cet intolérable jeu de rôles : le tueur jouant le sien, les ministres le leur et l’émotion dissimulant que les tragédies ne naissent pas de rien mais de structures négligentes mêlées à une malfaisance personnelle. La palme de la bêtise revient une fois de plus à Christophe Castaner qui affirme qu’avoir commis ce crime était « s’en prendre à la République laïque ». Je ne vois pas le rapport. Se tromper à ce point de diagnostic est favoriser les tragédies du futur.
Larmes, tweets, hommages… J’ai le droit, sans aucune illusion mais par pur volontarisme, de questionner : et après ?
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