Suivant le principe politicien « Fais à tes ennemis ce que tu ne voudrais pas qu’ils te fassent », Arnaud Montebourg a décoché une flèche empoisonnée contre son rival Manuel Valls lors du second débat des primaires socialistes. En essentialisant l’idée d’une TVA sociale comme une mesure « de droite » -sous prétexte que certains caciques de l’UMP la soutiennent- il diabolise une piste de réindustrialisation certes coûteuse en pouvoir d’achat mais qui mérite au moins un sérieux examen[1. D’autant que sa mise en oeuvre ne nécessite pas l’accord de nos partenaires européens].
Montebourg a sans doute voulu se draper dans un ancrage « à gauche » pour mieux contrecarrer certaines basses critiques qui l’accusent de collusion avec Marine Le Pen. Cette dernière défend en effet l’établissement de protections aux frontières de la France, et non de l’Europe, afin d’entraver les délocalisations en Roumanie, en Chine ou au Maghreb. Or, la vulgate a tôt fait d’établir le sophisme suivant : « Tout protectionniste rejoint Marine Le Pen », « Montebourg s’oppose au libre-échange » donc « Arnaud Montebourg est objectivement mariniste ».
Le plus drôle dans l’histoire, ce n’est pas tant les efforts parfois pathétiques des uns pour faire bonne figure dans le grand chapiteau de l’antiracisme mais plutôt les limites du raisonnement par amalgame.
Un professionnel de la vigilance aura noté que les Identitaires mènent campagne tambour battant en faveur de la démondialisation, quitte à afficher leur soutien explicite à Arnaud Montebourg- qui s’en passerait bien. Pour développer la brèche ouverte par le député socialiste, ils ont même créé un Collectif pour la démondialisation intégrale assorti d’un site qui ressemble à s’y méprendre à une plate-forme de campagne montebourgeoise.
Malgré cette convergence de vues évidente, peu de choses rassemble les positions ethnicistes assumées du Bloc Identitaire, son projet d’une démocratie européo-régionaliste et son credo décroissant avec le jacobinisme « gaulliste de gauche » d’un Montebourg qui n’a que le mot « République » à la bouche.
In fine, seule l’opposition à Marine Le Pen unit ces deux pôles démondialisateurs. Un peu maigre comme dossier d’instruction. Mais on a déjà monté de beaux procès en sorcellerie avec moins que ça…
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