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La ligue 1 de foot, ce comptoir étranger qui ne dit pas son nom

Le football français sous tutelle étrangère


La ligue 1 de foot, ce comptoir étranger qui ne dit pas son nom
Le président de la Ligue de football professionnel Vincent Labrune et le président du PSG Nasser al-Khelaïfi se rendent à un dîner d'Etat pour Xi Jinping à l'Elysée, Paris, 6 mai 2024 © JEANNE ACCORSINI/SIPA

Mardi 10 septembre la LFP (Ligue de Football Professionnel) a réélu à sa tête Vincent Labrune, un président forcément empêché: les vrais dirigeants sont les investisseurs étrangers qui ont racheté la majorité des clubs français, une OPA qui a décidé le Sénat à ouvrir une enquête.


Connaissez-vous l’honorable James Zhou ? En 2016 cet homme d’affaires chinois a racheté l’AJ Auxerre, le club bourguignon dont l’emblématique Guy Roux a assuré la notoriété pendant 44 ans… À Marseille, c’est l’Américain Frank McCourt qui est aujourd’hui propriétaire de l’OM, dont Bernard Tapie avait fait un grand d’Europe. Du côté de Saint-Etienne, les Verts, légendes des années 70, sont désormais la propriété du groupe canadien Kilmer Sports. Dans la capitale des Gaules, Jean-Michel Aulas, président du club durant 36 ans, a fini par vendre l’Olympique lyonnais à l’Américain John Textor. Promenade des Anglais, le big boss de l’OGC Nice est of course le très british sir Jim Ratcliffe. À Monaco, c’est le Russe Dmitri Rybolovlev qui dirige le club de la principauté. Le Havre, doyen des clubs français, est tombée dans l’escarcelle de l’Américain Vincent Volpe. À Paris, depuis 1991 le Qatar préside aux destinées du PSG, qu’il s’est offert pour le prestige d’associer l’émirat à la ville-lumière.

Venez comme vous êtes…

Strasbourg et Toulouse ont été rachetés par BlueCo et RedBird, des groupes d’investisseurs américains, Lille par un fonds de placement luxembourgeois. Le RC Lens appartient à un Franco-libano-arménien, le FC Nantes à un Franco-polonais, le SCO Angers à un Franco-algérien… Bref, sur les 18 clubs qui participent à la ligue 1, le championnat de France de football organisé par la LFP, il n’y a que quatre clubs qui naviguent sous pavillon français, Montpellier, Brest, Reims et Rennes.

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Pour couronner le tout, le championnat a pour nom officiel « la ligue McDonald’s », les matches sont diffusés en France par le groupe anglais DAZN, et pour sauver les meubles, la LFP s’est associée au fonds luxembourgeois CVC, qui a avancé 1,5 milliard d’euros dans l’affaire, ce qui fait de ce groupe le grand argentier du foot français.

Sur le terrain, les étrangers sont également majoritaires. D’après le site autorisé Transfertmarket, sur les 494 joueurs qui participent à la saison 24/25, 298 sont étrangers, soit 60,3%. Qui représentent 75 nationalités ! En février dernier, la Ligue donnait des exemples. Le club qui comptait alors le plus d’étrangers était l’OM : 25 sur un effectif de 37 joueurs, composant ainsi une étonnante tour de Babel avec 12 Français, 3 Camerounais, 3 Marocains, 3 Sénégalais, 2 Argentins, 2 Belges, 2 Espagnols, 2 Suisses, 1 Anglais, 1 Brésilien, 1 Centrafricain, 1 Congolais, 1 Ivoirien, 1 Gabonais, 1 Panaméen et 1 Portugais !

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Paradoxe : les meilleurs joueurs français évoluent à l’étranger, où ils touchent des salaires mirobolants que les clubs français (sauf le PSG qatari) ne peuvent leur offrir. Lors du dernier Euro de football, disputé en juin dernier, sur les 25 joueurs sélectionnés en équipe de France, 17 étaient sous-contrat à l’étranger…

L’arbitre est étranger !

Le décor ainsi planté, on peut se demander pourquoi (hormis le Qatar qui a investi à Paris pour valoriser son image) les investisseurs étrangers misent sur un foot français qui n’est rentable ni au niveau sportif (depuis l’OM de Tapie en 93 et le PSG de Canal Plus en 96, aucun club français n’a gagné une coupe d’Europe), ni sur le plan financier, puisque tous les clubs sont sur la corde raide, à l’exception du PSG qatari.

En revanche, on observe que ces investisseurs multiplient les transferts, je vends quatre joueurs et j’en achète cinq, ou inversement, flux et reflux d’argent permanents, avec des transactions où des commissions sont systématiquement versées, à des intermédiaires dont les comptes numérotés à l’étranger peuvent cacher l’identité des réels bénéficiaires.

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Dans d’autres secteurs, comme les casinos ou les sites asiatiques de paris, on parlerait de machine à laver l’argent sale… Mais dans le foot, c’est bien connu, il n’y a pas de matches truqués, pas de dopage, pas de blanchiment d’argent…

Le Sénat a néanmoins jugé nécessaire de diligenter une commission d’enquête « sur l’intervention des fonds d’investissement dans le football professionnel français », dont les conclusions seront connues dans six mois.



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