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La liberté à deux vitesses

L’édito politique de Jérôme Leroy


Qui sont ces gens qui s’insurgent contre le passe sanitaire mais ne trouvent rien à redire à l’empilement dangereux des lois antiterroristes?


Parfois, j’aimerais bien que les gens de droite m’expliquent leur conception de la liberté. Je vais finir par croire qu’il y a une liberté de gauche et une liberté de droite. Ce serait absurde, la liberté fait partie de la devise républicaine, elle n’est donc ni de gauche, ni de droite. A moins que la République ne soit une idée de gauche, au départ. C’est bien possible, finalement, comme la Patrie qui est défendue en 1871 par les Communards et vendue par Thiers et les Versaillais qui préféraient leur privilèges de classe à l’indépendance de la France et qui recommenceront en 1940.

Passe sanitaire: levée de boucliers !

Ils ont gagné, les Versaillais, d’ailleurs et pas seulement avec la semaine sanglante de juin 71, il y a tout juste cent cinquante ans. Leur victoire posthume, c’est qu’on a fêté partout Napoléon et nulle part la Commune. Pour la gauche, qui ne pèse plus lourd électoralement, la Commune, c’est la Liberté et pour la droite c’est Napoléon. Chacun son genre de beauté. A titre personnel, bien que de gauche, je suis comme Bernanos, l’histoire de France, je la prends en bloc. Je vibre autant à L’Insurgé de Jules Vallès qu’aux Mémoires de Marbot (préface de Jean Dutourd au Mercure de France).

Mais revenons à notre bel aujourd’hui : le Conseil Constitutionnel a approuvé le passe sanitaire. Quelle levée de boucliers chez les amis de la liberté ! La dictature sanitaire est en marche nous crie-t-on sur les bancs de la droite. On m’objectera que la France Insoumise a aussi crié mais en ce moment, elle a quelques problèmes d’orientation, la France Insoumise.

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Le Passe Sanitaire, je vois bien pourquoi il gêne les libéraux, les partisans du laisser-faire économique qui pense que ce laisser-faire doit s’appliquer à tous les secteurs de l’existence. A la limite, à droite, ça ne dérange pas qu’on conduise sans permis et qu’on entre dans un restaurant ou un cinéma sans être testé ou vacciné. C’est la liberté, inaliénable, de provoquer un accident ou de contaminer son voisin quitte à l’envoyer, dans les deux cas, en réa. 

En revanche, et c’est là que je m’étonne, les mêmes qui viennent m’expliquer que la vaccination obligatoire, c’est le goulag, que se promener avec un QR Code dans un téléphone géolocalisable, c’est donner des gages à Big Brother (Ces temps-ci, il s’appelle Bill Gates), ces mêmes amis de la liberté ne voient aucun inconvénient aux lois sécuritaires et antiterroristes qu’on vote en France après chaque attentat ou chaque fait-divers horrible.

La sécurité, oui, mais laquelle?

Et de mettre en avant la sécurité. Attention, pas la sécurité sociale (un truc de communiste), pas la sécurité sanitaire (un truc de communiste aussi), pas la sécurité au travail (toujours un truc de communiste) mais seulement la sécurité des biens et des personnes. Ou plutôt la sécurité des personnes qui ont des biens, parce que la dotation policière dans les quartiers, à part les Bac, c’est pas vraiment ça…

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A titre d’exemple,  regardez la dernière la loi antiterroriste en date, celle votée il y a quelques jours qui ne sera jamais que la vingt-deuxième depuis 1986 avec une accélération très nette depuis les attentats. L’ami de la liberté de droite me répondra que c’est pour lutter contre le terrorisme islamiste. Il n’empêche qu’en 2008, quand l’antiterrorisme s’est ridiculisé dans l’affaire de Tarnac, les jeunes gens de la mouvance « anarcho-autonome » du Plateau de Millevaches, n’étaient pas des islamistes et pas non plus des terroristes. Que la multiplication des fichages, la possibilité accrue des écoutes téléphoniques et des intrusions dans les données personnelles, les perquisitions administratives, la durée des interrogatoires sans avocat, tout cela  devrait tout de même inquiéter l’ami de la liberté, même de droite. Au moins autant que le fait qu’on lui interdise d’aller voir un film parce qu’il n’a préféré sa liberté individuelle à celle, collective, de toute une société.




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