La gauche n’est pas complètement morte. Il ne lui manque plus que des électeurs, et Hidalgo pourrait bien les retrouver, selon Jérôme Leroy.
On a parlé de la gauche ce week-end. Je signale le fait, parce qu’entre une éventuelle candidature Zemmour (dont le temps de parole vient enfin d’être décompté par le CSA), la rentrée en force du président Macron et les démêlés de LR, on a parfois l’impression que la gauche n’existe plus. Mais elle existe, le problème c’est qu’elle est comme dans Le cocu nombreux, la nouvelle de Marcel Aymé, elle habite plusieurs corps à la fois.
Ces corps candidats sont effectivement multiples : PS avec Hidalgo, Écolos avec on va bien voir qui, Insoumis avec Mélenchon, PCF avec Roussel, Montebourg avec Montebourg, sans compter deux probables trotskistes, -une curiosité française-, le sympathique Poutou, seul ouvrier de la bande, avec un NPA intersectionnalisé, et Nathalie Arthaud avec un discours vintage mais toujours efficace sur la lutte des classes pour LO.
Fête de l’Huma
Il fut question à gauche, ce week-end, de la Fête de l’Huma où Fabien Roussel a acté une candidature des « Jours heureux » dans son traditionnel discours clos par la Marseillaise et par l’Internationale. Spécificité de la candidature communiste : elle renoue avec des fondamentaux de gauche, c’est-à-dire une critique radicale du capitalisme qui non seulement a remarquablement prospéré pendant la crise sanitaire (on peut voir l’insolente santé du CAC 40 cette année) mais conduit aussi la planète à un suicide environnemental. Mais quand un communiste fait de l’écologie, il est pragmatique. On dispose déjà de beaux outils pour décarboner l’économie avec le nucléaire et l’hydro électricité, pourquoi ne pas les utiliser. Et puis si on remet au centre du jeu la question sociale, on n’oublie pas non plus que cette question sociale doit intégrer un discours sans fard sur la sécurité.
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Au PCF, on a appelé ça la « tranquillité publique ». L’opération visant à se distinguer, voire à rompre définitivement avec LFI après la période des années de l’alliance Front de gauche, est en passe de réussir. Très objectivement, c’est aussi le but de cette candidature. Refaire entendre une voix. Le score à la présidentielle sera ce qu’il sera. Roussel et le PCF admettent implicitement que la gauche a peu de chance et qu’il vaut mieux déjà organiser une stratégie commune pour les législatives, qui ont été l’objet de plusieurs discussions entre les envoyés des autres partis de gauche venus faire un petit coucou à la Courneuve.
Anne Hidago, go, go !
Comme par exemple Anne Hidalgo venue en visite. Le matin même, elle avait déclaré sa candidature à Rouen. C’est encore une chose que je porte à son crédit, d’avoir choisi ma ville natale que j’aime comme on aime sa jeunesse. Parce qu’il faudra bien l’avouer un jour ou l’autre à mes camarades de Causeur et aux lecteurs : j’ai une vraie sympathie pour Anne Hidalgo, le punching ball préféré de nos colonnes.
Je pense qu’on se trompe sur son compte. Elle y va plus par devoir que par ambition, ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose en politique. On lui reproche d’avoir dit qu’elle ne serait jamais candidate à la présidentielle, on oublie qu’il n’y a guère qu’elle capable de rassembler un électorat social-démocrate orphelin depuis le pénible quinquennat Hollande qui ne fut jamais que la phase préparatoire du macronisme.
Hidalgo est restée socialiste après l’élection de Macron. Et ils ne sont pas si nombreux à être resté dans la « vieille maison », comme disait Blum. On peut y voir une forme de fidélité à des idées plutôt qu’à des places. Ce ne sont plus les mêmes socialistes qu’avant 2017, ceux qui entourent Hidalgo, notamment ces maires de grandes villes ou la présidente d’Occitanie Carole Delga. Ils traversent un désert.
On reproche à Anne Hidalgo d’être maire de Paris. On le reprochait moins à Chirac mais c’est une autre histoire. Elle a manifestement décidé de retourner ça en avantage comme au judo : personne sur la ligne des challengers de Macron ne dirige depuis 2014 une aussi grosse collectivité territoriale, presque un Etat. Il paraît que les Parisiens la détestent. C’est étonnant parce qu’ils l’ont réélue en 2020 alors qu’on la donnait électoralement morte fin 2018 avec même son premier adjoint qui avait joué les Brutus. Son secret : c’est qu’elle fait la politique de son électorat.
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On peut brailler sur les 30 kms/ heure en vile et d’autres choses, c’est ce que veulent ses électeurs, c’est-à-dire ceux qui vivent à Paname intramuros. Si elle utilise la même méthode, répondre aux attentes de toute la France qui d’après la dernière enquête sur les fractures françaises parue dans Le Monde a surtout peur pour l’environnement et pour l’emploi, elle a ses chances. Quant aux procès qu’on lui fait en manque de républicanisme, on oublie la manière assez musclée dont elle a remis à sa place Alice Coffin et derrière elle les écolos radicaux de sa majorité. Un peu à la manière d’un de ses soutiens, Martine Aubry, qui a refusé l’alliance avec les Verts et a gardé sa mairie avec quelques centaines de voix d’avance en prouvant que les écolos ne pouvaient pas gagner tout seul.
Bref, on entend une petite musique chez certains observateurs, qui commencent à penser que pour le second tour, pourquoi pas ? Mélenchon se radicalise sur des positions populistes et wokistes, Montebourg qui a plutôt un bon programme espère ressusciter le souverainisme par sa gauche, mais Chevènement a déjà essayé et on a vu le résultat. On peut aussi compter sur les écolos, dont la primaire sera terminée le 28 septembre, pour faire émerger Piole ou Rousseau plutôt que Jadot.
Zemmour, une chance pour Hidalgo
C’est là qu’on peut espérer que Zemmour ne soit pas en simple tournée promotionnelle pour son livre mais aille jusqu’au bout. Zemmour est la meilleure chance d’Hidalgo. Grâce à Zemmour, les Républicains déjà en mauvaise forme avec la rivalité Bertrand-Pécresse et la création du parti d’Edouard Philippe qui vient de se déclarer pour Macron, n’arriveront pas au second tour, pas plus que Marine Le Pen, contestée en interne et obligée de se positionner en permanence par rapport à l’homme du Suicide français.
Il y a donc une place à prendre pour le deuxième tour pour Hidalgo contre Macron.
Dans ce cas-là, comme disait l’autre, tout deviendrait possible.