Nicole Esterolle déniche des pépites de l’art contemporain. De quoi faire trembler les maîtres anciens… Aujourd’hui, le récit de la performance de l’artiste Pol Pi.
C’était un grand moment d’intersectionnalité des luttes minoritaristes : l’artiste Pol Pi, performeur transgenre et transdisciplinaire, a courageusement déconstruit le « male gaze » ou regard du mâle…
En échos à cette performance forcément transgressive, intitulée MeToo, Galatée, qui a eu lieu dans le cadre du forum du Centre Pompidou en 2020, Luce Coquerelle-Giorgi, jeune critique d’art et membre de la YACI (Young Art Critics International), a relaté l’événement. La pépite, c’est aussi son texte1.
Son sexe nous regarde le regarder
« Rituel dionysiaque ou catharsis libératrice ? Avec sa performance récente au Centre Pompidou, MeToo, Galatée, Pol Pi déconstruit avec humour et sensibilité l’idéal féminin, tout en dénonçant la violence des diktats de beauté et du male gaze. Nu, il expose son corps, ses jambes, son ventre, ses fesses… Son sexe ? Entre ses jambes, il place un téléphone portable, caméra tournée vers le public voyeur. La foule aussi est filmée, observée. Il s’assoit sur un socle, écarte les jambes, nous regarde le regarder. Le rite peut commencer. »
Le rite consiste en une étrange et indigeste confection de colliers de fraises, de coiffe de bananes et de bracelets de poivrons que le public est invité à partager. « Mélangés à du gel hydroalcoolique, ces éléments organiques évoquent le lexique sexiste employé par certains hommes pour parler des femmes comme des objets de consommation « que l’on dévore du regard ». Ce regard à la fois inquisiteur et lubrique est le symbole de la violence patriarcale. » Ah, c’est donc ça !
Mais ce n’est pas fini. Notre jeune critique frise l’orgasme woke lorsqu’elle se dit « ivre de cette performance, de cette délicatesse bouleversante de Pol Pi et de son public, qui se tiennent ensemble, sous le regard perplexe de l’ancien monde. »
Va pour la rengaine MeToo, qui devient finalement un classique, mais quid de Galatée dans cette affaire ? Où trouver cette nymphe mythique connue pour avoir la peau blanche comme du lait ? Dans cette affirmation de Pol Pi à ses idolâtres : « Non, un homme ne me définit pas, ma maison ne me définit pas, ma chair ne me définit pas, je suis mon propre chez moi. » Nous n’aurons pas la réponse alors que s’achève ainsi la performance. Nous n’y étions pas, fions-nous donc au jugement perspicace de la jeune critique : « C’était là, c’était beau. » Une nouvelle fois, l’art contemporain, à l’instar de sa critique, nous démontre malheureusement qu’il a de beaux jours devant lui.
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