L’AME (aide médicale d’Etat) permet aux étrangers en situation irrégulière d’être soignés gratuitement sur le sol français. Comme toutes les aides sociales, ce dispositif constitue une incitation à l’immigration illégale : on peut trouver dans les pays d’Afrique et du Maghreb un fascicule rédigé en français et en arabe qui explique comment en bénéficier. Il peut paraître paradoxal que des immigrés entrés en France clandestinement puissent voir leurs frais de santé pris en charge par l’Etat, comme ils peuvent travailler, se loger ou scolariser leurs enfants. Mais la République peut s’honorer de traiter avec humanité les hommes et les femmes qui résident sur son territoire, légalement ou pas.
Comme on pouvait s’y attendre, le système dérape, victime de dérives, de fraudes et d’abus. Dominique Tian, Député UMP et membre de la Commission des Affaires sociales, déclare dans une interview que « sur les contrôles effectués en 2009 dans 106 caisses primaires d’assurance maladie sur 5% des bénéficiaires de l’AME, il est montré que 50% des dossiers sont faux. Une étude de l’Onu met en avant des trafics organisés, indiquant que 20 à 25% du Subutex (substitut à l’héroïne, ndlr) distribué via l’AME, part vers des marchés illicites. »
Un article paru il y a quelques semaines dans Libération racontait l’histoire d’un Camerounais polygame, mari de deux femmes et père de 7 enfants restés au pays, qui rencontre une femme en France. Tous deux sont clandestins, l’homme est séropositif et la femme ne parvient pas à tomber enceinte. En effet, le couple désire avoir un enfant et demande à bénéficier de l’AME pour une fécondation in vitro. L’aide est accordée et la femme qui vit en foyer attend aujourd’hui un heureux événement.
Cette générosité a un coût. En 2009, 540 millions d’euros ont été débloqués pour soigner 215000 sans-papiers et la somme augmente chaque année. Pour réduire les déficits et la dette sociale, le gouvernement qui impose aux Français des réductions constantes des remboursements de leurs médicaments ou de leurs frais d’hôpitaux, envisage de restreindre l’accès et de poser quelques modestes conditions à l’obtention de cette aide.
Les députés UMP qui demandent une réforme souhaitent notamment que la fécondation in vitro soit exclue de ce dispositif ainsi que le traitement des pathologies qui sont traitées dans le pays d’origine des demandeurs s’ils résident à moins de 20 kilomètres d’un centre de soins et demandent que les bénéficiaires participent aux frais à hauteur de 30 euros par an, ce qui couvrirait 1% des coûts. L’aide serait aussi limitée aux conjoints et aux enfants et contrôlée par les préfectures.
Même si l’AME est réformée, la France restera le pays le plus généreux du monde avec ses immigrés clandestins
L’urgence médicale n’est pas menacée et les étrangers qui ont un besoin vital de soins seront toujours admis à l’hôpital avec femme et enfants. Malgré cela, les restrictions envisagées provoquent des réactions indignées des associations d’aide aux sans-papiers, de certains humanitaires qui jugent que la déontologie médicale n’admet aucune limite et de certains députés de l’opposition qui parlent, comme c’est original, de stigmatisation des immigrés et de discrimination entre malades français et étrangers.
J’aimerais entendre ces âmes généreuses expliquer aux étrangers entrés chez nous légalement, qui respectent nos lois, payent des impôts et cotisent aux caisses d’assurance- maladie au nom de quel droit des immigrés entrés illégalement devraient bénéficier de plus de droits qu’eux.
J’attends leurs arguments quand ils tenteront de convaincre les Français qui se serrent la ceinture pour éviter la ruine et dont certains n’ont plus les moyens de se soigner que seul ce poste budgétaire ne saurait souffrir la moindre mesure d’économies.
La France est le pays le plus généreux du monde avec ses immigrés clandestins et le restera même si l’AME est réformée. Si rien ne change, elle perdra les moyens nécessaires à l’intégration et à la générosité, ce qui est un peu la même chose. Dissuader l’immigration illégale qui empêche l’intégration et limiter des déficits qui menacent la pérennité des systèmes de protection sociale, sans renoncer à porter assistance à des personnes en danger, c’est l’équilibre qu’il nous faut trouver. Garder ce que nos ainés ont bâti sans perdre notre âme, entre une gauche généreuse et irresponsable et une extrême droite qui rêve d’un protectionnisme ethnique, c’est ce qu’on peut espérer de mieux pour la République. Mettons là sur la voie du milieu. Et restons zen.
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