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La France, pays de liberté?

Une chronique médias de Didier Desrimais


La France, pays de liberté?
© WITT/SIPA

La presse de gauche s’est réjouie ces derniers jours de la censure du livre Face à l’obscurantisme woke. C’est inquiétant, mais il reste une raison d’espérer, observe notre chroniqueur.


Patrick Boucheron, Grand Inquisiteur au Collège de France, a encore frappé. Son pouvoir de nuisance n’est pas une vue de l’esprit, comme ont pu s’en apercevoir les auteurs de l’ouvrage collectif Face à l’obscurantisme woke. Après que cet apparatchik universitaire a craché sa bile en vilipendant « les entrepreneurs d’approximations et d’inexactitudes qui disent que ce qui nous menace aujourd’hui, c’est l’islamo-gauchisme et le wokisme », et en désignant les Presses Universitaires de France, où cet essai devait paraître, à la vindicte médiatique, Paul Garapon, le directeur de cette maison d’éditions, a lâchement décidé de suspendre la publication dudit essai. Bras droit de la censure, le journal Libération annonçait la nouvelle avant même que les auteurs ne soient mis au courant : « Les PUF suspendent la parution d’un livre anti-woke aux obsessions trumpistes. » Curieusement, Simon Blin, journaliste à Libé, ne voit aucun paradoxe dans le fait de défendre en même temps la liberté académique aux États-Unis et la censure d’un essai écrit par des universitaires en France. Il n’a pas pu lire cet essai qui n’a pas été imprimé, mais… il a vu « sa quatrième de couverture inquiétante tout en rouge et noir sur Internet ». De plus, il a appris que « la chercheuse proche de l’extrême droite Florence Bergeaud-Blacker (sic) » a contribué à cet ouvrage dont la thèse, « à l’origine très contestable (resic) », s’avère finalement « éloignée de la réalité (et sic de der) ». Par conséquent, cela va de soi, en tout cas pour Libé, « il semblait pour le moins malencontreux de maintenir la publication de Face à l’obscurantisme woke. » Même son de cloche au Nouvel Obs : « À deux doigts de se trumpiser en publiant un pamphlet anti-woke, les éditions PUF rétropédalent », titre l’hebdomadaire qui confirme par ailleurs l’influence pernicieuse de Patrick Boucheron dans cette affaire. Bref, tout ce petit monde de gauche se réjouit de la censure d’un livre que personne n’a lu mais dont la possible parution a provoqué l’ire d’un professeur au Collège de France connu surtout pour ses méthodes de barbouze.

L’historien Patrick Boucheron, auteur du best-seller « Histoire mondiale de la France » © ERIC DESSONS/JDD/SIPA

La démographe Michèle Tribalat a expliqué récemment dans ces colonnes pour quelle raison sa contribution à Face à l’obscurantisme woke a été écartée par les co-directeurs de l’ouvrage, Pierre Vermeren, Xavier-Laurent Salvador et Emmanuelle Hénin. Ces derniers n’ont pas eu le choix. Il y a quelques semaines, la direction des PUF leur aurait expressément demandé, par crainte de représailles, de supprimer l’article dans lequel elle démontre l’imposture scientifique de François Héran, professeur au Collège de France et démographe attitré de la gauche immigrationniste. Quelques semaines plus tard, sous l’impulsion de Patrick Boucheron cette fois, les PUF ont donc carrément annulé la parution de l’ouvrage en question. Le Collège de France est devenu un repaire de maîtres censeurs et de commissaires politiques. Quant à la direction des PUF, la probité et le courage ne semblent pas être ses qualités premières. Il aura suffi de quelques cris de fausse indignation, d’une mascarade de « résistance au trumpisme ambiant », d’une pantalonnade hystérique, pour qu’elle se couche, apeurée, aux guêtres de vieilles rosses qui se soucient surtout de défendre leurs privilèges et de consolider leurs positions au sein du mandarinat universitaire, du milieu éditorial ou d’établissements institutionnels (en plus d’avoir leurs ronds de serviette dans les médias publics, Patrick Boucheron dirige la collection “Univers historique” des éditions du Seuil et François Héran préside le conseil d’orientation du Musée de l’histoire de l’immigration). 

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Apathie intellectuelle, duplicité dogmatique des journalistes, militantisme des universitaires de gauche, abdication, lâcheté ou complicité intéressée de professeurs et d’institutions ayant oublié leur vocation première, à savoir la libre propagation des idées et des opinions, telles sont les tares qui nécrosent les lieux de savoir et d’information dans notre pays. Au contraire de ce que voudrait nous faire croire M. Glucksmann, la France, qui a su la statufier, ne porte pas la liberté dans son cœur – et l’interdiction d’un livre par une grande maison d’éditions sous la pression d’idéologues universitaires n’est que la partie visible d’une restriction de la liberté qui s’étend jour après jour dans ce pays concepteur de lois au service d’une censure institutionnelle. La liberté d’expression est régulièrement bafouée. Cela est vérifiable un peu partout, mais surtout dans les médias publics qui ne cachent plus leur intransigeance et leur absence de pluralisme. L’emblématique radio France Inter ne s’embarrasse pas de subtilités – le pouvoir n’a même plus besoin de donner ses ordres, comme au temps de l’ORTF, certain qu’il est d’avoir dans la place des journalistes à sa botte, imprégnés des mêmes idéologies européo-mondialistes, immigrationnistes et diversitaires, et aussi déconnectés que lui du peuple français. Quant à la presse mainstream, elle est majoritairement écrite par des journalistes sortant des mêmes moules gauchisants, des mêmes écoles de journalisme noyautées par les mêmes idéologies. Globalement, nos médias divulguent les mêmes informations, orientées dans le même sens, au service des mêmes élites vivant entre elles. L’émergence de médias dissidents – ne représentant pas le dixième de l’offre médiatique mais connaissant un succès grandissant – exaspère un milieu médiatico-politique persistant à se tenir à distance d’une réalité qui contredit systématiquement ses dogmes. Les quelques modestes brèches ouvertes dans la citadelle de la pensée unique affolent et terrifient des journalistes décidés à défendre bec et ongles leur pré carré – et de fait, ce sont eux qui font encore la loi en distribuant les bons et les mauvais points, en prononçant les anathèmes, en dressant la liste des hommes et des livres à mettre à l’index et en infligeant au public un flot ininterrompu d’informations politiquement orientées, bidouillées, voire carrément mensongères, comme on peut le constater actuellement sur des sujets abordant l’immigration (La Gaité Lyrique) ou le racisme anti-Blanc (Crépol).       

La France, où la gauche et l’extrême gauche continuent de régner dans les universités et dans les médias, sera vraisemblablement le dernier bastion du wokisme. Les agissements actuels d’universitaires indéboulonnables, ceux des étudiants abrutis par la religion woke (Braunstein) et promis à un bel avenir parasitaire au sein de l’université, des médias ou du monde dit de la culture, préludent le prolongement d’une longue période d’assèchement intellectuel et d’intolérance idéologique. MM. Boucheron et Héran, mélange grossier et caricatural de rigidité robespierriste et de hargne hébertiste, sont considérés par la gauche intellectuelle comme des héros révolutionnaires. Comme leurs illustres prédécesseurs, ces agitateurs de salon disent agir au nom de la raison, de la science et de la liberté. Ils ne ménagent pourtant pas leurs efforts pour les fouler aux pieds. Ils ne sont pas les seuls. Tout ce qui constitue et forme les élites de notre pays – écoles, universités, médias, institutions publiques, juridiques ou politiques – est majoritairement entre les mains d’une gauche progressiste et intransigeante, fanatiquement woke, aux antipodes de la rationalité, de la science, de la liberté et de valeurs morales qu’elle ne cesse de louer mais qu’en réalité elle méprise.

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Démocratie, liberté d’expression, pluralité des opinions, autant de syntagmes qui sonnent creux. les Français qui font l’effort d’écouter, ne serait-ce que de temps à autre, la radio et la télévision publiques, ou qui lisent, même occasionnellement, la presse mainstream, ne peuvent que constater un état de fait évident : ces médias sont au service d’un système politique dirigé par une oligarchie européo-mondialiste, post-nationale et post-démocratique. Il est normal que MM. Boucheron et Héran aient table ouverte dans ces antres de l’information formatée et officielle. Le système établi ne saurait se passer de ces argousins universitaires toujours disponibles pour les basses-œuvres politiques. Réjouissons-nous toutefois du dénouement de cette écœurante affaire de censure: sur CNews, dans l’émission Face à Bock-Côté, après avoir appelé de ses vœux une réaction de ses collègues universitaires et des étudiants face à l’obscurantisme, aux fausses sciences et à la censure qui se propagent dans les universités, Emmanuelle Hénin, co-directrice de Face à l’obscurantisme woke, a annoncé que l’essai tant redouté par Boucheron et sa clique allait paraître au mois de mai dans une autre maison d’éditions que les PUF qui se sont couvertes de honte en se soumettant aux diktats des matons de la pensée. L’effet Streisand jouant à plein, Face à l’obscurantisme woke va vraisemblablement être un succès de librairie. Merci qui ? Merci Patrick Boucheron… 

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Amateur de livres et de musique. Dernier ouvrage paru : Les Gobeurs ne se reposent jamais (éditions Ovadia, avril 2022).

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