Accueil Économie La fausse bonne idée, c’était l’euro !

La fausse bonne idée, c’était l’euro !


Il y a quelques temps, Coralie Delaume taquinait Nathalie Kosciusko-Morizet à la suite de son réquisitoire contre la sortie de l’euro et le retour aux monnaies nationales. Au vu des lacunes de notre ministre, par ailleurs brillante polytechnicienne, il semblerait que l’économie ne soit pas une matière obligatoire pour entrer à l’X…

Sur les plateaux de télévision, la ministre de l’Environnement s’était en effet bien imprudemment avancée en sous-entendant que le retour au franc multiplierait les prix par 6,5 et conduirait donc à une perte dramatique de pouvoir d’achat pour les Français. Dans l’émission de Laurent Ruquier, suivant l’exemple de Coralie, Eric Zemmour avait littéralement ridiculisé la bien faible argumentation économique de NKM en retournant contre elle l’exemple du prix de la baguette dont le passage d’un franc à un euro illustre l’inflation consécutive à l’abandon du franc. Sur causeur, le débat entre défenseurs acharnés de l’euro et tenants d’une autre politique a suscité une passe d’armes alimentée par la réponse de Georges Kaplan à Coralie.

Un nouveau franc pas si mini que ça…

Confirmant en cela les analyses de NKM, Georges Kaplan s’en prend aux partisans d’une sortie de la monnaie unique au profit d’une monnaie commune européenne qui combinerait un retour aux monnaies nationales à l’intérieur et une devise commune vis-à-vis du reste du monde. Pour disqualifier cette solution à la crise monétaire européenne, Kaplan affirme avec catastrophisme que le nouveau franc nous ferait perdre 25% de la valeur actuelle de l’euro.
On peut pourtant lui objecter qu’en cas de sortie de l’euro, le franc ne serait pas dévalué.

Miracle ? Tour de passe-passe médiatique ? Non, il s’agit simplement du scénario retenu par les études prospectives de la banque ING. Cette institution financière souligne que la France se trouve au centre de gravité de la monnaie unique, entre la fourmi allemande et les cigales du Sud. Et si l’euro éclatait, le mark serait réévalué tandis que les peseta, lire, escudo et drachme nouveaux s’en trouveraient dévalués. Au milieu de l’ancienne zone euro, notre nouveau franc devrait conserver sa parité avec l’ancienne monnaie unique européenne, devenue entre temps une monnaie commune extérieure composée des différentes monnaies nationales. En fin de compte, le franc ne serait dévalué que par rapport au mark et au florin…

Georges au pays des merveilles libéral

Kaplan poursuit son argumentation en nous expliquant que les déficits commerciaux, partiellement causés par la surévaluation de l’euro, sont sans aucune importance. Bizarre : lorsqu’en mai, la France achète 41,6 milliards d’euros de marchandises et en vend seulement 34,2 milliards, il faudrait en conclure que le déficit commercial de 7,4 milliards qui en résulte ne pose pas problème . Bien sûr, nous pouvons toujours nous endetter à l’extérieur ou vendre nos bijoux de famille pour combler ce trou. Autrement dit, continuer à nous appauvrir.

Après cet argument fantaisiste, Georges Kaplan rejette la proposition de révision de la loi du 3 janvier 1973 qui interdit à la Banque de France d’avancer de l’argent au Trésor Public, et donc de financer l’Etat en faisant tourner la planche à billets. Contre toute velléité de changement du statu quo, Kaplan agite le chiffon rouge de l’hyperinflation et de la spoliation des épargnants dont les économies perdraient l’essentiel de leur valeur.

Or, depuis une quinzaine d’années, c’est le système actuel qui a permis l’inflation ahurissante du prix de nombreux actifs, créant des krachs en série. En outre, une monétisation responsable- qui consiste à augmenter les liquidités mis à la disposition des banques, notamment en émettant une nouvelle monnaie en contrepartie de créances – pourra nous éviter une déflation mortifère en cas de baisse de la masse monétaire.

Pour conclure ce petit billet, je ne résiste pas à l’envie de mentionner la théorie des Zones Monétaires Optimales, régulièrement avancée par des économistes libéraux tels que Jean-Jacques Rosa, Alain Cotta ou Gérard Lafay. Selon celle-ci, il est absurde de vouloir maintenir une monnaie unique pour des pays aussi économiquement hétérogènes que ceux de la zone euro. Je serais bien curieux de savoir comment faire fonctionner l’euro compte tenu des travers de cette construction baroque et artificielle.

Au final, Kaplan a raison de dénoncer une fausse bonne idée. A la nuance près que celle-ci n’est pas le retour aux monnaies nationales mais la création de l’euro. Ceux qui nous promettaient monts et merveilles, traduisez : croissance et emploi, avec l’euro nous prédisent aujourd’hui l’apocalypse si d’aventure nous quittions la monnaie unique. Qui peut encore les croire ?



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Laurent Pinsolle tient le blog Gaulliste libre.

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