Selon Palestinian Media Watch, un organisme israélien qui recueille et traduit de l’arabe des documents publiés par l’Autorité palestinienne, le Comité international de la Croix-Rouge jouerait un rôle d’intermédiaire dans le versement de salaires et de primes par l’Autorité aux membres du Hamas détenus dans des prisons en Israël. En revanche, la Croix-Rouge est accusée de ne pas faire assez d’efforts pour venir en aide aux otages israéliens à Gaza.
L’une des raisons pour lesquelles l’Europe, et notamment la France, prend trop souvent le narratif palestinien pour parole d’évangile, est l’ignorance de la langue arabe. Or, deux organismes, l’un américain, l’autre israélien, emploient des arabophones pour traduire ce que les dirigeants palestiniens ne disent jamais en anglais (et encore moins en français, langue largement devancée par le russe dans la région).
Parlez-vous arabe ?
Le premier est le Middle East Media Research Institute (MEMRI), une ONG basée à Washington, qui traduit les médias de l’arabe, du persan, de l’ourdou, du pachto, du turc et du russe. Le second est Palestinian Media Watch (PMW), un institut d’analyse israélien à but non lucratif, qui fait des recherches approfondies sur la société et les médias palestiniens afin de renseigner le gouvernement israélien, ainsi que le reste du monde. C’est PMW qui a exposé l’étendue de la glorification du terrorisme et de l’incitation au martyre opérées par l’Autorité palestinienne. En 2021, il a publié les preuves du versement de salaires aux terroristes détenus dans les prisons israéliennes, et même la grille des rémunérations. L’Autorité palestinienne paie des salaires à vie aux prisonniers détenus pendant cinq ans et elle verse des sommes importantes aux familles des terroristes qui sont morts « en martyr ». D’après PMW, en octobre 2023, l’Autorité devait verser presque trois millions de dollars aux familles des 1500 terroristes du Hamas morts lors de l’attaque du 7 octobre. Selon la loi de l’Autorité palestinienne, la famille de chaque « martyr » doit recevoir une prime de 6 000 shekels (1 511$) et une allocation mensuelle à vie de 1 400 shekels (353$), l’équivalent du salaire mensuel moyen en Palestine. En outre, les 50 assassins du Hamas qui ont été capturés recevront en prison un salaire mensuel de 1 400 shekels par mois (350$), qui passera ensuite à 12 000 shekels. Ceux qui sont mariés avec des enfants auront droit à une rémunération supérieure qui peut monter jusqu’à au moins 70 000 shekels (17 590$). Le total des salaires et primes versés aux prisonniers et aux familles des « martyrs » s’élève à plus de 300 millions de dollars par an. Selon Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne : « S’il ne nous restait qu’un seul centime, nous le verserions aux familles des martyrs et des prisonniers ».
La Croix-Rouge comme intermédiaire
Le 17 décembre, PMW a publié des documents qui semblent indiquer que le transfert d’au moins certaines de ces sommes serait facilité par la Croix-Rouge. Des annonces émanant du Fatah et reproduites par PMW informent les familles de terroristes que, pour continuer à recevoir les paiements en 2024, elles doivent produire des documents fournies par la Croix-Rouge.
Par exemple, voici le texte de l’annonce publiée par le Fatah à Bethléem : « Honorables parents de prisonniers, veuillez produire un document de la Croix-Rouge internationale pour ceux qui n’ont pas été condamnés et dont les noms figurent ci-dessous ; un document de la Croix-Rouge internationale accompagné d’un nouvel ordre de détention administrative pour les détenus administratifs ; et un document de la Croix-Rouge internationale accompagné d’un verdict pour les prisonniers condamnés. Ceci afin de renouveler l’approbation de l’éligibilité monétaire [c’est-à-dire les salaires versés par l’AP pour les prisonniers terroristes] avant le 1er janvier 2023 [coquille pour 2024]. Merci ». L’annonce est suivie d’une liste de prisonniers.
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Dans le Jewish News Syndicate, Itamar Marcus, le fondateur et directeur de PMW, explique que « Le rôle de la Croix-Rouge internationale dans ce processus est central. L’organisation internationale de santé est impliquée dans ce processus, car lorsqu’elle rend visite aux prisonniers, elle est en mesure d’apporter des formulaires. La sécurité israélienne ne regarde pas les formulaires et n’empêche pas le prisonnier terroriste d’accéder aux formulaires qu’il doit signer ».
Une charité à sens unique ?
Une ONG israélienne, Shurat HaDin, a accusé la Croix-Rouge de manquer d’empressement dans ses tentatives pour rendre visite aux Israéliens pris en otages par le Hamas et soulager leur misère. Le 21 décembre, l’ONG, agissant au nom des otages libérés et des familles d’otages toujours en captivité, a intenté une action en justice, devant un tribunal israélien, contre la Croix-Rouge, accusée de n’avoir rien fait et de ne rien faire encore pour obtenir la libération des détenus – dont il reste 129 entre les mains du Hamas. Parmi les plaignantes, Raz Ben Ami, une femme de 57 ans qui a été libérée après 57 jours de détention dans des conditions inhumaines. Elle maintient que la Croix-Rouge n’a rien fait pour lui faire parvenir les médicaments indispensables au traitement de la maladie chronique dont elle souffre. Son mari, Ohad, âgé de 55 ans, est toujours prisonnier. Lors d’une visite à Tel Aviv le 14 décembre, la présidente du Comité international de la Croix-Rouge, Mirjana Spoljaric, a rencontré un petit nombre des familles d’otages dans un hôtel, pendant que les membres d’autres familles manifestaient dehors, avec un message clair pour la présidente : « De la même façon que vous vous occupez de médicaments destinés aux membres du Hamas en prison, assurez le transfert de médicaments aux otages ».
Deux devises sont supposées représenter la vocation de la Croix-Rouge : Inter arma caritas (Au milieu des armes, la charité) et Per humanitatem ad pacem (Pour l’humanité jusqu’à la paix). Mais l’organisation basée à Genève comprend-elle toujours le latin ? Mme Spoljaric a rejeté les appels de l’État israélien à faire pression sur le Hamas car, d’après elle, en prenant de telles mesures, son organisation risquerait de perdre l’influence dont elle jouit pour opérer dans un tel conflit. Pourtant, quels sont les fruits de cette influence du point de vue des otages israélien ?
Cette réticence à agir rappelle de mauvais souvenirs. La Croix-Rouge a été obligé d’exprimer ses regrets de ne pas avoir fait assez d’efforts pour secourir les Juifs au cours de la Seconde Guerre mondiale.
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