L’islamo-nazisme existe. L’alliance, sur le web, entre salafistes et suprémacistes blancs est moins contre-nature qu’on pourrait le croire. Ils ont en commun la haine des Juifs et des Homosexuels, ainsi qu’un amour féroce pour la violence. Leurs codes et leur imagerie s’inspirent des jeux vidéo. Mais dans ce monde ténébreux, il y a plus d’individus dangereux que d’ados attardés.
Le 22 août 1914, l’un des grands espoirs de la droite nationaliste et catholique, Ernest Psichari, mourait face à l’ennemi. Son milieu familial athée et antimilitariste ne destinait pas ce petit-fils d’Ernest Renan à une vie de ferveur religieuse, mais sa carrière dans l’armée coloniale lui a apporté un idéal d’ordre tandis que la découverte de l’islam pendant son service a représenté une étape cruciale de sa conversion au catholicisme. Le défi lancé par un musulman – « Oui, vous autres, Français, vous avez le royaume de la terre, mais nous, les Maures, nous avons le royaume du ciel [1] ! » – l’a aiguillonné sur le chemin de sa propre foi. Chez certains défenseurs des traditions occidentales, cette attraction de l’islam perdure aujourd’hui, mais la quête spirituelle de Psichari s’est dévoyée en idéologies puritaines ou mortifères. Désormais, l’islam qui séduit les gens de droite est moins souvent celui, mystique, qui a influencé Psichari, que celui, politique, promu par les extrémistes salafistes.
Une première dégringolade des hauteurs spirituelles se voit à l’idéal puritain d’un Patrick Buisson qui proclame avoir « plus de respect pour une femme voilée que pour une Lolita en string de 13 ans [2] ». Mais une chute d’une tout autre nature conduit à une convergence surprenante entre des militants de l’extrême droite suprémaciste et néonazie, et des fanatiques djihadistes. On connaît l’islamo-gauchisme : c’est la sympathie affichée de politiques, intellectuels et activistes antifas pour les idées et les actions des courants islamistes. Le rapprochement se noue dans la haine d’Israël et la dénonciation du colonialisme occidental. On connaît moins ce qu’on appellera, plutôt que l’« islamo-droitisme » (terme qui serait insultant pour les droites politiques), l’« islamo-nazisme », alliance aussi contradictoire que l’islamo-gauchisme, mais dont les discours, méthodes et objectifs, très différents, sont potentiellement encore plus dangereux.
Contre-nature ?
Pour comprendre l’islamo-nazisme, il faut pénétrer dans un monde de sous-cultures numériques possédant leur jargon, leurs pratiques et leurs lieux de sociabilité en ligne. Ce monde reste insoupçonné et obscur pour
