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La contre-offensive en marche?

Sylvie Perez publie "En finir avec le wokisme" (Éditions du Cerf)


La contre-offensive en marche?
Cette semaine, l'acteur Dwayne Johnson a demandé au musée Grévin de modifier sa statue, qu'il juge trop blanche. Image: capture Facebook.

Dans son dernier essai, la journaliste Sylvie Perez décrypte parfaitement la déferlante woke et la résistance qui s’organise dans le monde anglo-saxon.


J’y suis allé à tâtons, voire franchement à reculons. Encore un livre sur le wokisme, ses dérives, son emprise, son déni du réel, son obscurantisme ; bientôt nous trouverons plus d’ouvrages dans les rayons des librairies traitant de ce thème que de bouquins sur le développement personnel. C’est dire l’enfermement du monde éditorial dans les théories fumeuses. Le wokisme comme le racisme, le cancer, le litre de super à deux euros et la famine, toute personne censée est forcément contre. Idées vaseuses où le pathétique risible concurrence l’inquisition mentale, grand mouvement de déstabilisation et d’intimidation, le wokisme combine tous les travers d’une société végétative qui se déchaîne en se cherchant un nouveau maître à penser. Le sujet m’ennuie follement. Je suis hermétique à tout esprit de sérieux qu’il vienne d’outre-Atlantique ou de nos propres universités. Je n’ai aucune fascination pour le dérèglement et la déconstruction.

Sylvie Perez n’ergote pas

Seule la permanence de la beauté m’obsède, qu’elle prenne la forme de Jacqueline Bisset, de l’île de Batz, d’une AMC Pacer ou d’un roman d’André Hardellet, ma nostalgie me protège et m’éloigne de mes contemporains. Par avance, je m’en excuse. Je tenais jusqu’à maintenant, à conserver mordicus mon confort intellectuel, désengagé et indifférent, loin du bruit des chaînes d’info et de leurs plateaux criards, adoptant un ersatz de dandysme pas tellement original mais très reposant pour mes nerfs. J’avais donc cette posture d’étranger aux débats qui agitent les sphères dites intellectuelles avant de lire En finir avec le wokisme de Sylvie Perez aux éditions du Cerf. Elle m’a déniaisé sur un sujet où beaucoup d’approximations circulent dans les médias, par inculture et surtout, par manque de travail. D’abord, on juge un livre, peu importe le genre (essai, pamphlet, nouvelles ou polar) à la qualité de son écriture. Et cet essai se révèle limpide, fluide sans tomber dans le jargon des penseurs du dimanche, amusé, enjoué, parfois ricaneur, jamais ratiocineur, il est sacrément vigoureux. Sylvie Perez aime les mots, les formules, les phrases-choc, les envolées, ça mitraille sec ! Le wokisme, « c’est le mouvement sans le progrès » écrit-elle, dès son prologue. « Les adeptes du wokisme assimilent le désaccord à l’offense », poursuit-elle, plus loin. Elle canonne avec la force tranquille des auteurs qui ont enquêté longuement et qui, en profondeur, ont sondé ce magma informe où l’ignorance avance sous le visage de l’oukase. L’effet est jouissif quand elle compile toutes les errances, les outrances, les bassesses de ce mouvement, les dingueries proférées avec rage sur le sexe, la race, l’éducation ou l’identité, nous atteignons là, l’acmé du militantisme le plus déshonorant et de la pathologie victimaire.

À relire, les bonnes feuilles du livre

La résistance encore une fois à Londres

Précise, la journaliste l’est par la multiplication d’exemples concrets sur les dérives en cascade d’un système qui a perdu la tête, de l’interview virale de Jordan Peterson en 2018 à la télévision britannique aux ravages de la cancel culture mis à jour par le Manifeste des 153 paru dans le Harper’s Magazine en 2020 qui s’alarmait déjà du climat d’intolérance. Désormais, la liberté d’expression semble prendre sa revanche. Elle n’aurait pas abdiqué. Par petites touches, minuscules coups de piolet, elle commence à fissurer le grand mur du « n’importe quoi » où toutes les exagérations verbales et doctrinales étaient assénées avec la certitude des fraîchement convertis. La journaliste nous informe des bouleversements qui traversent actuellement la société anglo-saxonne. Elle possède un coup d’avance sur ses confrères. Elle nous annonce même une nouvelle vague. La contre-offensive a déjà commencé. La résistance s’organise. « Les Anglo-Saxons, forts de leur expérience du wokisme, ont élaboré un modus operandi pour juguler une influence néo-progressiste devenue folle. Chez eux, la contre-offensive aborde sa troisième phase. Après avoir identifié le phénomène en cours, il a fallu le comprendre, pour enfin le combattre. Ainsi apparaissent maintenant, outre-Atlantique, de véritables politiques anti-wokes qui détricotent le système diversitaire avec ses commissions et entités de surveillance anti-démocratiques. Là-bas, passé la séquence théorique, on aborde la pratique : résoudre le problème ». Le voyage en absurdie arriverait-il à son terminus ?

En finir avec le wokisme de Sylvie Perez – Cerf (2023)

En finir avec le wokisme - Chronique de la contre-offensive anglo-saxonne

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Journaliste et écrivain. À paraître : "Tendre est la province", Éditions Equateurs, 2024

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