Le poème du dimanche.
Il est évident que ce dimanche électoral va faire beaucoup d’insatisfaits car si j’ai bien compris beaucoup de gens vont voter contre et très peu pour, ce qui est toujours source d’insatisfaction. Raymond Queneau, qu’on ne présente plus, est l’inoubliable inventeur de Zazie, la petite fille qui voulait prendre le métro et ponctuait ses désillusions et ses doutes sur la condition humaine d’un très philosophique « Mon cul », parfaite maxime du scepticisme absolu.
Il n’empêche que chez Queneau, le bonheur réclame une certaine forme de sagesse, une acceptation heureuse des aléas de l’existence, sinon, on se retrouve bien malheureux. C’est que le bonheur, comme le reste et comme le prouve cette complainte, est d’abord une question d’intelligence du monde.
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Par ailleurs, on peut se demander si une des sources de l’excellente chanson Requiem pour un con de Gainsbourg n’est pas à chercher dans cette Complainte de Queneau, ce qui n’aurait rien d’étonnant étant donné la culture du bonhomme.
Complainte. J’connaitrai jamais le bonheur sur terre je suis bien trop con Tout me fait souffrir et tout est misère pour moi pauvre con Tout ce qui commenc’ va trop mal finir toujours pour les cons Tout plaisir s’efface — après c’est bien pire du moins pour les cons L’angoisse m’étreint m’étrangle et j’empire de plus en plus con Je ne sais que faire ou pleurer ou rire comme font les cons Quelquefois c’est bleu puis c’est noir de suie la couleur des cons On voudrait chanter mais voilà la pluie qui arroz’ les cons On veut espérer mais surgit l’ennui qui teinte les cons On voudrait danser — le sol est de boue pataugent les cons Nous sommes idiots bouffant la gadoue nous sommes des cons L’amour se balade en un autogyre au-dessus des cons Qui lèvent le nez ‘vec un doux sourire sourire de cons Attendant encor la belle aventure illusion de cons Car ils sont réduits à leur seul’nature nature de cons Les roses les fleurs et les clairs de lune c’est pas pou’ les cons Les cons ils y croient mais c’est pour des prunes aliment de cons. |