Le très beau film d’Alexandre Sokourov, L’Arche russe, ressort au cinéma. Ce qui ne doit pas ravir la critique qui en avait fait en 2002 un film « réactionnaire ».
On ne saurait trop féliciter les responsables de cette nouvelle sortie du sublime film L’Arche russe, que le cinéaste Alexandre Sokourov réalisa en 2002. Un joli pied-de-nez tout d’abord à une certaine critique bien-pensante qui a toujours détesté cette œuvre immédiatement classée « réactionnaire ». Et une belle occasion de la découvrir ou de la redécouvrir sous son meilleur jour, c’est-à-dire sur le grand écran d’une salle de cinéma.
Un monde perdu
L’arche du titre, c’est le coffre qui au XVIe siècle contenait des trésors et des archives. Soit une véritable plongée dans les salles du musée de l’Ermitage, à Saint-Pétersbourg. Naviguant de pièce et pièce, Sokourov filme le temps de l’Histoire en marche, embrassant dans un même mouvement des siècles disparates et des destins divers.
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Une insondable nostalgie mélancolique préside aux destinées de ce voyage ininterrompu. Les époques, les artistes et les œuvres revivent sous nos yeux émerveillés. C’est un monde disparu que filme le cinéaste, à la manière de Visconti dans Le Guépard. Les deux films ont d’ailleurs en commun une virtuose scène de bal, comme s’il s’agissait de filmer le deuil au travail à travers ces couples virevoltants.
Mais le propre du cinéma est alors de les fixer à jamais : si ni la mort ni le soleil ne se peuvent fixer en face, comme le disait La Rochefoucauld, le cinéma est capable, lui, d’accomplir ce prodige, tout en nous faisant demeurer vivants.
L’Arche russe, d’Alexandre Sokourov. Sortie le 20 mars 2019.